Pédagogie: il est impossible de dire que telle méthode est meilleure qu'une autre, partout et pour tous les élèves (dossier de l'IFé)
Paru dans Scolaire le jeudi 29 septembre 2011.
"Certaines pratiques pédagogiques sont-elles plus efficaces que d’autres" pour les enseignements de base, lecture, écriture, calcul ? Le dossier de l'IFé (ex INRP) pose la question, mais ne lui apporte pas de réponse définitive après une revue de la littérature mondiale sur le sujet. Ainsi, pour l‘ "International Reading association" (une association d'universitaires américains), "il n’existe aucune méthode universelle qui permette d’enseigner la lecture de manière efficace à tous les élèves". Ne faut-il même pas aller plus loin, et se demander si l’efficacité est "une finalité légitime en éducation" ? Ne faut-il pas penser, avec Dewey, qu' "une école qui éduque vraiment est une école qui propose beaucoup d’expériences éducatives" pour favoriser "le fait qu’on puisse apprendre d’expériences ultérieures" ?
Il semble pourtant, à première vue, évident que toutes les pratiques pédagogiques ne se valent pas, et qu'il est légitime de vouloir identifier et promouvoir "celles qui aident les élèves à réaliser le plus efficacement possible les apprentissages souhaités", comme le souligne le chercheur Clermont Gauthier (université Laval au Québec). L'auteure, Annie Feyfant, consacre donc une large partie de son dossier aux travaux menés en faveur des pédagogies "explicites" et des "méthodes d’enseignement structurées et directives" versus "les méthodes pédagogiques constructivistes ou socioconstructiviste". Mais d'autres chercheurs contestent la pertinence de la méthodologie employée. De plus, "comment mesurer des données bien souvent impalpables ou pour le moins interdépendantes les unes des autres"? Faut-il comparer "les performances des élèves dans différents environnements d’apprentissage, quelles que soient les caractéristiques de départ des élèves"? Comment prendre en compte "l’effet enseignant"? Une synthèse de dix-sept analyses menées aux États-Unis montre que 7 à 21 % "de la variance des acquisitions entre élèves seraient attribuables à l’enseignant, notamment en début de l’école primaire". Si le caractère structurant de l'enseignement explicite "a une efficacité cognitive indéniable", estime un psychologue de l'éducation, "d’autres dispositifs, dont l’apprentissage par la découverte, donnent de tout aussi bons résultats".
Les critères d'efficacité seraient alors "le climat de discipline et de travail en classe". Un enseignant efficace a "des attentes fortes en termes de performance scolaire", il croit "en la capacité de chaque élève à apprendre à lire et écrire", évalue régulièrement leurs progrès et connait "diverses méthodes de lecture" qu'il sait "utiliser à bon escient". "Il est convaincu que le travail qu’on demande aux élèves d’entreprendre vaut la peine d’y consacrer du temps et de l’attention". Il crée "un climat de classe favorable", il "donne des consignes et des explications précises". Il s'inscrit dans un établissement dont le climat doit être "ordonné et structuré", dans une équipe enseignante cohérente, motivée et stable. Les parents sont impliqués et l'école collabore avec ses partenaires. Elle reconnait "la pertinence de l’apprentissage informel".
Il est de plus "impossible de donner une répondre tranchée" à la question posée dans ce dossier, si on y ajoute la durée: quelle est la pérennité de l’efficacité d’une pratique? La valeur ajoutée d'une pratique ou d'un enseignant, mesurée en fin d'année, se retrouvera-t-elle deux ou trois ans plus tard ?
Le dossier est téléchargeable sur le site de l'IFé, ici.