Les TICE favorisent-elles les apprentissages? Le débat est ouvert (New York Times)
Paru dans Scolaire le mardi 06 septembre 2011.
Avons-nous réellement besoin des TICE (technologies de l'information et de la communication pour l'éducation) pour apprendre? Le New York Times pose la question, en même temps que le quartier de Kyrene (Arizona) qui s'apprête à voter sur le sujet. Approuvé en 2005, le projet a déjà coûté 33 millions de $ aux habitants du district de Tempe, Phoenix et Chandler qui compte quelque 18 000 jeunes.
Mais les résultats aux tests d'évaluation ne suivent pas. En lecture et mathématiques, ils stagnent, alors qu'ils s'améliorent ailleurs en Arizona. On investit dans les matériels, mais on taille dans les budgets, on licencie des professeurs, on augmente les effectifs, on diminue la part des enseignements artistiques, musicaux, et de l'éducation physique...
Le débat mobilise des personnalités de tous les Etats-Unis. Certains plaident pour les TICE, qui permettent à chacun d'acquérir à son rythme les compétences nécessaires aujourd'hui. Ils ajoutent que les tests, standardisés, ne captent pas ces compétences nouvelles, mais Tom Vander Ark, un ancien de la fondation "Bill and Melinda Gates" reconnaît qu' "on manque de données". D'autres dénoncent une foi aveugle dans les compétences numériques, aux dépens des enseignements fondamentaux, et un raisonnement du type "investissez dans les équipements d'abord, vous poserez les questions après". Le vote, deux ans avant l'échéance du programme, dans un quartier de Chandler aura valeur de test pour tout le disctict. En jeu, 46 millions sur 7 ans. Cinq fois le budget consacré aux manuels papier.
Le New York Times revient sur l'histoire des TICE aux USA. En 1997, Bill Clinton met en place un comité pour la science et la technologie qui demande qu'on équipe le plus vite possible les écoles, bien que les résultats de la recherche fassent défaut. Depuis, de nombreuses études ont montré que la technologie avait contribué aux progrès de classes, d'établissements ou de districts, notamment en mathématiques. Mais à quoi cela tenait-il? à l'utilisation d'ordinateurs, ou à la formation des enseignants qui a précédé? Comment mener des recherches sérieuses quand les choses ne sont jamais égales par ailleurs, et quand des technologies changent si vite? D'autant que d'autres études, en nombre plus faible, donnent des résultats contradictoires. Pour l'une d'elle, les programmes du type "un portable par élève" n'ont pas d'effet majeur sur les résultats, mais ils amplifieraient les effets d'autres causes: les bons enseignants en font un bon usage, tandis que les mauvais se laissent distraire par la technologie. Pour Larry Cuban, professeur émérite de sciences de l'éducation à Stanford, la recherche ne permet pas de justifier de telles dépenses. Mais Karen Cator, du ministère fédéral de l'éducation, répond que si les évaluation standardisées ne montrent pas de progrès, il faut tenir compte de tout ce que les élèves apprennent par ailleurs, à faire des recherches sur Internet, à utiliser des outils de travail, à collaborer avec d'autres...
Le New York Time complète ces considérations sur l'état de la recherche et sur le débat politique par plusieurs petits récits de situations observées dans les classes du district, par des interviews d'enseignants, de parents, et par celle du responsable des achats. Manifestement, le débat dépasse de beaucoup les frontières de l'Arizona.
L'article du New York Times ici, celui de Numerama ici.