Justice des mineurs: un rapport sévère des députés sur l'exécution des peines
Paru dans Justice le vendredi 10 juin 2011.
Il s'écoule en moyenne 20 mois entre la commission des faits et la date de condamnation du mineur dans le ressort de Rennes. Il est de près de 14 mois à Poitiers. Mais que se passe-t-il ensuite? C'est la question examinée dans le rapport de Michel Zumkeller (député, UMP) présenté au nom de la "mission d’information sur l’exécution des décisions de justice pénale pour les mineurs" et dont la publication vient d'être autorisée. Il porte principalement sur un dispositif mis en place en 2007 pour améliorer les délais et la qualité de l’exécution des jugements: le "BEX mineurs" ou bureau d’exécution des peines.
La mission d’information constate d'abord "l’absence de prise en compte de ses propres travaux sur plusieurs points relatifs au suivi des mineurs condamnés et la difficulté à traduire dans la pratique les objectifs ministériels (...) Quant aux BEX mineurs, les espoirs qu’ils suscitent sont, pour l’heure, déçus (...) ce projet non seulement n’est pas abouti, mais est en recul."
A Paris et Rouen, sa mise en place s'est "heurtée à l’impossibilité de trouver un local adapté, c’est-à-dire suffisamment spacieux et près de la salle d’audience". A Bobigny, site pilote, "malgré un volontarisme indéniable", le BEX ne fonctionne plus "depuis avril 2010", faute de locaux et de greffiers.
Jean-Luc Warsmann, président UMP de la mission "félicite le rapporteur pour la qualité de son travail", tout comme Dominique Raimbourg (PS) qui ajoute que "le constat est accablant", puisque "le dispositif d’exécution des peines des mineurs fonctionne globalement avec beaucoup de difficultés" et "qu’aucun système statistique ni aucun indicateur ne permet de mesurer la qualité de la prise en charge des mineurs". Pour le rapporteur, l’évaluation des dispositifs mis en place "devrait être une priorité avant l’adoption de toutes nouvelles mesures (...) Dans les tribunaux où ils fonctionnent, les BEX sont porteurs de progrès. Il faut donc faire fonctionner et analyser ce qui existe avant de tout changer."
Parmi les informations de ce rapport, à noter une réflexion de Jean-Pierre Rosenczveig, président du tribunal pour enfants de Bobigny à propos de "la difficulté rencontrée par de nombreux magistrats pour trouver une structure d’hébergement pour un jeune" alors que, d’après les statistiques du ministère de la Justice, ni les CER ni les CEF ne sont occupés à 100%: "ces structures ne devraient pas accueillir plus de 6 ou 7 jeunes car s’agissant des mineurs les plus durs, au-delà de ce chiffre tout travail efficace devient impossible". Ces établissements ont une capacité d’accueil théorique de 12 jeunes. "Leurs responsables, soucieux du bon fonctionnement de leur établissement, auraient tendance à ne pas les remplir à 100 % de leur capacité afin de permettre une prise en charge optimale des jeunes qui y sont accueillis."
En ce qui concerne les peines de travail d’intérêt général, leur nombre "n’évolue pas faute de structure d’accueil", car elles représentent "une lourde charge pour les collectivités". Quant aux EPM, les établissements pénitentiaires pour mineurs, ils accueillaient au 1er juillet 2010, 248 mineurs pour 326 places: "soit les EPM constituent une avancée par rapport à la prison grâce, notamment, à un meilleur encadrement éducatif et il faut alors au moins honorer le nombre initialement prévu, soit tel n’est pas le cas et pourquoi maintenir des structures dont le coût est élevé", puisqu'il est évalué à 325 €/jour sur la base d’un taux d’occupation de 100 %? "Quatre ans après l’ouverture du premier EPM, aucune évaluation ne [permet] de mesurer la qualité et l’incidence de cette prise en charge renforcée sur le parcours et la réinsertion des mineurs les plus gravement impliqués."