Les compétences nous obligent à réexaminer les savoirs scolaires (R-F Gauthier)
Paru dans Scolaire, Périscolaire le mercredi 08 juin 2011.
Les savoirs scolaires "se présentent souvent sous le jour de la neutralité", sans que soit justifié leur enseignement. Or "ils répondent à des choix, définissent une certaine 'vérité' (...) et procèdent toujours à une sélection et une hiérarchisation des connaissances", explique Roger-François Gauthier, dans un texte que publie la "Lettre" de Prisme.
L'inspecteur général remarque, par exemple, que l'on enseigne "certains auteurs que l’on ne lit qu’à l’école" et que certains savoirs historiques sont enseignés "en référence à des préférences nationales plutôt qu’à la vérité historique". Les mêmes questions se posent lorsqu'on passe à une approche par compétences, mais celle-ci "s’intéresse davantage que l’école traditionnelle aux apprentissages réels et aux rapports entre ces apprentissages et le monde réel". Les apprentissages sont tournés "vers l’action, la réalisation, la création, la résolution de problèmes, la performance, etc., autant de mots étrangers au monde des savoirs en tant que tel."
L'approche par les compétences rend encore "plus nécessaire d’y voir clair sur ce que sont ces savoirs", qui, "loin d’être définis comme le seul objectif de l’école, doivent maintenant compter avec d’autres objectifs d’apprentissage". Cette concurrence entre les savoirs "doit conduire à rejeter un rapport périmé au savoir, constitutif de l’horreur pédagogique, faite d’encyclopédisme sans motif, de mémorisation formelle et d’instrumentalisation au profit de la sélection".
Mais quand et comment "va se faire le repérage des compétences visées par l’école et la désignation des savoirs qui seront les ressources pour la construction et l’exercice de ces compétences"? Certains savoirs ont-ils une valeur intrinsèque, patrimoniale, philosophique, sociale, morale, épistémique? Comment va-t-on hiérarchiser les différents savoirs?