L'insertion professionnelle des enseignants débutants du secondaire: un projet-pilote d'accompagnement dans quatre écoles belges.
Paru dans Scolaire le mercredi 06 avril 2011.
"Près de 58% des enseignants débutants interrogés se déclarent potentiellement susceptibles de quitter la profession", signalent des chercheurs de l'université de Liège et de Mons-Hainaut, dans la synthèse d'une recheche-action, portant sur l'insertion professionnelle des enseignants débutants du secondaire. L'article détaille les volets de la recherche-action: des enquêtes par questionnaires, un projet-pilote d’accompagnement de quatre écoles hainuyères (Comté de Hainaut) et le développement d’outils à destination des acteurs éducatifs. Il invite à instaurer des dispositifs d'aide aux nouveaux enseignants, basés à la fois sur la collaboration avec les enseignants chevronnés, la co-construction des savoirs, et la responsabilisation des chefs d'établissements.
Le questionnaire porte sur des enseignants débutants de la Communauté française, comptabilisant moins de cinq années accomplies d’exercice. Parmi les 58% des enseignants susceptibles de rompre leur contrat, ils sont 37,4% à avoir envisagé de quitter le métier suite à un évènement exceptionnel, 10,7% une fois par mois, 5,9% une fois par semaine et 3,7% tous les jours.
Contrairement aux attentes, l'enquête révèle que les difficultés considérées par les novices comme les plus intenses "ont trait aux ressources matérielles" et non pas au domaine pédagogique/ didactique. Les difficultés relationnelles pouvant exister entre les débutants et leurs collègues seraient tout aussi "secondaires". "On peut supputer que les enseignants débutants éprouveraient globalement moins de difficultés à s’intégrer et collaborer au sein de la communauté scolaire qu’ils n’en ont pour obtenir des ressources matérielles adaptées à leurs besoins ou encore pour gérer certaines procédures administratives."
Si les enseignants n'évoquent pas en priorité des difficultés relationnelles, 41,43% font néanmoins part de leur isolement, d'un manque de soutien face aux difficultés. Une large frange estime devoir se conformer aux pratiques de leurs collègues plus "chevronnés" pour être plus efficace. "Cette tendance au conformisme par une recherche de rapprochement avec les pairs pourrait peut-être être en partie consécutive à ce sentiment d’isolement".
Les résultats mettent en évidence le rôle de la direction dans la promotion de pratiques professionnelles collaboratives.
Les enseignants évoquent également des lacunes dans la formation initiale reçue: "les enseignants débutants souhaitent essentiellement bénéficier davantage d’éléments proches de la réalité de terrain". Ils voudraient en outre être davantage sensibilisés à la gestion des dimensions administratives liées au métier, "plus particulièrement les contraintes administratives".
Sur cette base, de multiples outils ont été développés par l'équipe de chercheurs, pour accompagner les écoles-pilotes. Parmi ces outils, un "Radar" (aide à l’auto-évaluation des difficultés d’insertion professionnelle), un outil d’aide à la prévention/gestion du "choc de la réalité", un outil d’aide à la gestion de la relation mentorale, ainsi que deux guides proposés à l’attention des directions et des enseignants dejà expérimentés.
Le dispositif se base sur la co-construction des savoirs: "Il s’agissait concrètement de donner l’occasion aux participants d’exprimer et de confronter leurs difficultés et de les outiller pour qu’ils puissent les réduire par eux-mêmes, dans une perspective d’autosocio-construction du savoir". Objectif: promouvoir la résolution "autonome" et "collective" des difficultés d’entrée en carrière.
Les chercheurs préconisent, sur la base de retours positifs du programme, l’instauration à long terme d’un dispositif d’aide à l’entrée en carrière, dont le cadre de référence serait défini au "niveau central" du système éducatif, mais dont le contenu resterait "ouvert à la prise en compte des contextes locaux".