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Réseaux ambition réussite: un bilan "contestable" selon le sociologue Pierre Merle

Paru dans Scolaire, Orientation le lundi 14 mars 2011.

"Un bilan négatif, une politique non prioritaire", telle est l'analyse de la politique des réseaux ambition réussite (RAR) donnée par le sociologue Pierre Merle. Cette position contredit les conclusions du rapport du ministère de l'Éducation nationale, rendu en juin 2010 mais public depuis janvier 2011, qui dresse un bilan des RAR quatre ans après leur mise en place. Dans un article publié par l'Observatoire des inégalités, le sociologue oppose ainsi aux résultats jugés "encourageants" par les auteurs du rapport, un bilan "fort contestable". Il dénonce "des imprécisions, parfois même des tours de passe-passe" et, sur la base d'exemple précis, démonte plusieurs conclusions.

Le sociologue note d'abord que les auteurs du bilan concluent à la "réduction des écarts de réussite scolaire" entre les élèves des RAR et les autres. Pourtant, selon lui, les écarts les moins sensibles ne sont enregistrés que par les évaluations en fin d'école élémentaire dont "la pertinence technique fait par ailleurs polémique" et dont les résultats ne concernent qu'une seule discipline, les mathématiques. Pour l'auteur de l'article, les plus pertinentes des évaluations, qui ne sont en outre "pas techniquement contestées" sont celles qui sont réalisées en fin de troisième et s'avèrent alors "contradictoires" avec les résultats de la première: elles montrent qu' "aussi bien en maths qu'en français, les écarts de réussite entre les collégiens des RAR et les autres sont sensibles et ces évaluations".

Alors que le rapport souligne une diminution des écarts des taux de redoublement entre les élèves en collèges ambition réussite et les autres, le sociologue rappelle de son côté que "les décisions de redoublement relèvent parfois moins de l'évaluation des compétences des élèves que de directives rectorales". Les auteurs du rapport indiquent d'ailleurs "que leur constat peut être lié au projet de 'faire passer le plus rapidement possible la scolarité obligatoire à des élèves en difficultés pour leur proposer des orientations post-troisième' ", mais aussi que "les professeurs de lycée font de plus en plus souvent redoubler, en fin de seconde, les élèves issus des collèges ambition réussite".

Sauve-qui-peut des parents et des enseignants

L'hémorragie des effectifs en RAR due au "sauve-qui-peut" des parents constitue "un troisième exemple d'échec des collèges ambition réussite". En effet, alors qu'à l'entrée en 6e, un parent sur dix demande une dérogation pour ne pas scolariser son enfant dans le collège de son secteur, "quand il s'agit d'éviter la scolarité en collège ambition réussite, ce taux de demande de dérogations explose: plus d'un parent sur quatre!". Dans la même verve, Pierre Merle dénonce aussi le sauve-qui-peut des enseignants non évoqué par le rapport, "le B-A-BA de l'art du camouflage - ce que le rapport ne dit pas alors que les données existent", ironise l'auteur. Selon lui, les demandes de mutation dans les collèges ambition réussite "ont connu une progression fulgurante". À titre d'exemple, il note que "dans les collèges ambitions réussite de la capitale, le taux de demande de mutation des professeurs est passé de 27,7% en 2006, au moment de l'entrée dans le nouveau dispositif, à 47% en 2009, alors que ce taux, la même année, n'est que de 19% pour les autres enseignants parisiens… Et, dans ces collèges en péril, le taux de départ des professeurs est monté à 45% en 2009!" L'auteur s'étonne de la "drôle de conclusion" du rapport qui "sans apporter de données chiffrées, conclut toutefois à 'une modification des postures des enseignants, qui acceptent de jouer un rôle éducatif en s'investissant plus largement' ".

Le sociologue rappelait en introduction que les RAR mis en place par Gilles de Robien à la rentrée 2006, avaient "pour objet de relancer l'éducation prioritaire en recentrant les moyens financiers et humains sur des écoles élémentaires et 249 collèges dans lesquels les élèves en grande difficulté scolaire sont particulièrement sur-représentés". Une politique qu'il jugeait "a priori pertinente", puisqu'elle visait à recentrer les moyens "sur les établissements scolarisant les élèves les plus en difficulté" alors que ces derniers avaient eu tendance à se diluer "en raison de l'extension considérable des collégiens scolarisés en ZEP: 10% en 1982, 14,3% en 1996 (…) et 20% en 2004".

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