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Comprendre et accompagner la préadolescence (colloque)

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Justice, Orientation le samedi 12 mars 2011.

Le "jeu du foulard" et autres "jeux" dangereux ne concernent que les préadolescents, explique Hélène Romano, lors d'un colloque organisé hier vendredi 11 mars, par un organisme de formation continue des professionnels de santé, l'AFAR sur la préadolescence. Pour justifier la pertinence de ce terme, François Gouraud, pédiatre, décrit le phénomène pubertaire, "lent et graduel". Deux à trois ans avant les premières règles, et donc un an avant le développement des seins, ou chez les garçons, l'augmentation de la taille des testicules, un gène, "Kiss 1", activé lorsque l'individu atteint un certain poids, active à son tour l'hypothalamus, lequel active l'hypophyse, qui produisait déjà, mais en quantité bien moindres les hormones qui vont influer sur les organes sexuels. Quant à l'âge de la puberté, il est passé, si l'on prend les premières règles comme repère, de 17 ans au XIXème siècle à 13 ans et demi aujourd'hui, pour des raisons difficiles à comprendre, parmi lesquelles il faut sans doute compter les xéno estrogènes contenus dans certains plastiques et les vernis à ongles...

Jean Chambry (pédopsychiatre, comme tous les intervenants, sauf mention contraire) note d'ailleurs une nette augmentation des consultations d'urgence pour des 10-13 ans, mais Catherine Zittoun estime qu'ils "ne vont pas si mal" si on considère qu'ils subissent une sur-stimulation et qu'en même temps, les adultes, qui en ont peur, cherchent à leur imposer un carcan. Antoine Guedeney voit la préadolescence comme le moment où l'enfant commence "à se saisir de son histoire", et acquiert une certaine "capacité à négocier les conflits". Il peut "comprendre l'attitude des figures d'attachement" de sa petite enfance, et en choisir d'autres, notamment les enseignants qui "l'ont vu". 

Cette préadolescence n'est-elle pas plus culturelle que physiologique? Diane Escamilla, psychologue qui a travaillé longtemps à Dakar, rappelle que le passage de l'enfance à l'âge adulte se fait encore en trois jours d'initiation dans la brousse, mais qu'en ville, la mutation est en cours, elle est liée à l'émancipation des femmes, au recul de l'âge du mariage, et donc à l'apparition d'une vie sexuelle pré-maritale, non sans risque puisque les jeunes filles enceintes sont exclues de l'école. 

Thierry Baubet constate qu'en France les enfants issus de l'immigration ont, à cet âge, un "travail supplémentaire d'élaboration à faire", puisqu'ils vont choisir de "coller" à l'un des deux univers, celui de leursascendants , avec une revendication identitaire, ou au contraire, celui du pays où ils vivent, avec à chaque fois des représentations largement fantasmées, et, pour les parents, un sentiment d'angoisse, puisque leurs enfants les renvoient aux choix qu'ils ont faits par rapport à leur histoire.

Hélène Romano, psychologue référente pour le ministère sur la question des jeux dangereux, conteste qu'il s'agisse de "jeux" puisqu'ils n'ont aucun enjeu, et qu'il ne faut les confondre ni avec des tentatives de suicide, ni avec des bagarres. Ils répondent à une préoccupation pré-pubertaire, se réassurer, vérifier que son existence a une valeur, grâce à une ordalie du type "si j'ai survécu, c'est que je mérite de vivre". Ils permettent aussi, face à un monde adulte perçu comme dangereux, et porteur d'une menace d'anéantissement, de se donner l'illusion de contrôler son existence et celle d'autrui. 

Pierre-Henri Tavoillot, philosophe, revient alors sur le mythe de Peter Pan, dont il nous demande d'oublier la version de Disney. C'est une "tragédie absolue" que l'histoire de cet enfant qui refuse de grandir, et dont Michael Jackson est l'avatar. Nous ne devons pas "protéger l'enfance", par exemple en compliquant les sorties scolaires et les pique-niques de peur de rompre la chaîne du froid. Nous devons au contraire protéger "la volonté de grandir" des enfants.

Ionna Atger évoque en contrepoint le "caractère effrayant de la puberté", des premières règles lorsqu'elles surviennent très tôt, au CM. C'est d'ailleurs un  des facteurs de risque qu'elle a identifiés pour cette période, avec la consommation de cannabis. Mais pas la séparation des parents. 

Cette question des toxiques est reprise par Fédérico Caro Rojas (addictologue) pour qui les pré-ado qui essaient des produits courent des risques plus importants que leurs aînés puisque leur système nerveux central est en construction, mais aussi parce que le système de récompense se trouve altéré. Florent Cosseron ajoute que la consommation de cannabis est parfaitement banalisée dans les établissements scolaires, que les élèves leur veulent aux adultes de ne rien en dire. "Ils savent très bien que si les enseignants ou le principal leur en parle, c'est en fait pour parler d'autre chose", comme les résultats scolaires...

Patrick Mical, psychologue, déplace le débat sur le terrain des "Cités", où ces jeunes enfants ont un "désir inapaisable de réparation", face à une "société insolvable pour répondre à leur demande": "le tout psychologique ne peut pas plus fonctionner que le tout social, il faut mailler les deux."

 

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