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L'Ecole a pris en charge la question multiculturelle sans que ce choix soit porté politiquement (Fr. Lorcerie)

Paru dans Scolaire le samedi 05 mars 2011.

L'Ecole a pris en charge, en faisant évoluer les programmes d'Histoire notamment, la question multiculturelle sans que ce choix soit assumé politiquement, estime Françoise Lorcerie (CNRS) qui intervenait, hier vendredi 4 mars, lors d'un séminaire organisé par l'association "Islam et Laïcité" et qui avait pour thème "l’islam et les sociétés musulmanes dans les programmes et manuels scolaires". Dans les années 70, les instructions officielles donnent très peu de place à l'Islam, sauf pour évoquer les croisades. A la fin de la décennie, elles commencent à le prendre en compte, et dans les années 90, on voit arriver en seconde "la Méditerranée, carrefour de civilisations" au XIIème siècle comme thème d'étude, sans que cela "provoque de vagues". A partir de 2002, il est mieux développé. Et on voit aujourd'hui la guerre d'Algérie et les séquences colonisation-décolonisation traitées dans les manuels qui mettent côte à côte des points de vue opposés. La chercheuse y voit l'oeuvre de quelques inspecteurs généraux et de quelques universitaires, sans que les ministres en fassent état, ni que les médias s'en saisissent, au contraire de la loi sur le port de signes religieux ostensibles.

Ces évolutions n'empêchent pas le corps enseignant d'être traversé par les mêmes stéréotypes que l'ensemble de la société française, souligne Benoît Falaize (INRP). Il fait remarquer que l'enseignement supérieur français avait développé, durant la période coloniale, une connaissance scientifique des pays arabes et africains, et qu'on peut parler, à partir des années 60, d'un "oubli du Sud". Il a fallu attendre les années 90 pour assister à un regain d'intérêt des universitaires. La plupart des enseignants n'ont donc pas eu, au cours de leurs années d'études, l'occasion de travailler sur ces questions. Souvent généreux, et bienveillants, ils développent une attitude positive à l'égard des "cultures" d'origne de leurs élèves, mais davantage fondée sur des critères moraux que sur un savoir. Ainsi, sur la question de l'esclavage, ils glissent de l'étude historique à l'éducation civique. Ils ont souvent une attitude double, ils ne demandent qu'à comprendre le monde "arabo-judéo-chrétien", mais se méfient des réactions de leurs élèves "issus de l'immigration". 

Les deux universitaires, interrogés à ce sujet, estiment d'ailleurs que nous n'avons aucun moyen de connaître la réalité des classes, et des attitudes des élèves, puisque le "rapport Obin" de 2004 sur "les signes et manifestations d'appartenance religieuse dans les établissements scolaires" (téléchargeable sur le site du ministère, ici) ne porte que sur les établissements repérés comme ayant été le lieu d'incidents. Ils constatent simplement que les enseignants qu'ils rencontrent ne font que rarement état de manifestations hostiles. "Mais si une enseignante se laisse déstabiliser par un élève qui lui dit qu'elle n'a pas le droit de parler du prophète parce qu'elle est une femme, elle a beaucoup de mal à reprendre le dessus. Nous sommes à une époque où on doute de l'école, de ses valeurs, de ses méthodes." De même, il a suffi d'une lettre pour qu'un éditeur "floute" le visage de Mahomet sur un manuel. 

Les éditeurs, estiment les deux chercheurs, ont très bien accompagné et même souvent précédé l'évolution des programmes d'histoire, mais un manuel est un objet commercial fragile, et la moindre réaction les inquiète. 

Les deux communications devraient être prochainement mises en ligne sur le site d' "Islam & laïcité".

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