Direction d'école: associations et syndicats s'unissent pour susciter "un déclic politique".
Paru dans Scolaire le mercredi 16 février 2011.
"Un déclic politique". L'expression, de la bouche de Christian Chevalier (SE-Unsa), résume l'attente partagée par un regroupement d'associations et syndicats, s'agissant de la direction et du fonctionnement de l’école. Le SE-Unsa, la CFTC-Education, le SGEN-CFDT, Avenir-Ecoles CFE-CGC et l’association GDID (Groupement de défense des idées des directeurs) présentaient à la presse ce mercredi 16 février un constat issu d'une réflexion commune: "La situation des directions d'école n'est plus tenable".
"Les rapports de l'OCDE et du CAS soulignent à quel point l'école primaire française est en mauvais point, au niveau europééen. Les avancées en la matière ne peuvent se limiter à des demandes de postes supplémentaires. Elles demandent des évolutions structurelles, que nous souhaitons consenties et négociées", affirme Christian Chevalier. Il appelle de ses voeux une "avancée globale" sur la base d' "un projet construit": "Depuis 1983, chaque fois que nous avançons sur la question des directeurs d'école, c'est suite à un conflit. Chaque fois, également, les avancées sont catégorielles. La question est en somme abordée par le petit bout de la lorgnette."
Alain Rei, président du GDID, constate que le rapport Reiss, remis en septembre 2010 au ministre, sur la base-même d'une commande ministérielle, et considéré comme sérieux par le regroupement, est resté lettre morte: "Il ne se passe rien". "Les réponses apportées par le gouvernement sont toujours les mêmes depuis 10 ans, ajoute-t-il. Le ministère avance l'argument économique: En bref, Il n'y aurait pas de moyens budgétaires. Il faudrait nous dire précisément quel choix politique est fait en matière d'éducation, c'est à dire ce qu'on veut faire de l'école de demain au plus haut de l'Etat ". Le regroupement se montre unanime sur ce point: la direction d'école n'est en rien un problème économique. Il s'agit au contraire d'un problème politique dont la solution réside dans la volonté du ministère.
Selon Joël Devoulon, du SGEN, "le ministre considère qu'il suffit de réunir des experts sur un sujet, et que, sur cette base, il lui revient de décider ce qu'il veut, quand il veut". Le regroupement attend donc l'instauration, par le gouvernement, d' "un véritable dialogue social", s'agissant de la direction et du fonctionnement de l’école.
Divers points de tension sont évoqués, au premier rang desquels la surcharge de travail des directeurs d'école: "Le directeur ne peut pas à la fois être un infirmier, répondre au téléphone toutes les 5 minutes, assumer ses tâches administratives", appuie Isabelle Lacaton, d'Avenir-Ecoles CFE-CGC. Elle estime à 60 heures par semaine la somme de travail des directeurs. Des conditions de plus en plus difficiles, mais assumées par des profils souvent inexpérimentés: "De plus en plus de jeunes, avec peu d'expérience, prennent la direction d'école, dans le but d'avoir un poste fixe", soutient-elle. "On frôle ainsi certaines catastrophes". Pour le syndicat CFTC, les directeurs d'écoles doivent avoir "le même traitement que les directeurs de collèges et lycées".
La question des emplois aidés, consacrés à l’aide administrative des directeurs d’école, est soulevée par le SGEN: il n'y a "personne pour les recruter, les évaluer et les encadrer. "L'école n'est pas gérée dans ses propres murs". Pour le SE-Unsa, la question de la direction d'école soulève celle de l'"équité" de l'offre éducative sur le territoire. L'une des "clefs du problème" se situerait "du côté des élus municipaux", selon Ch. Chevalier. "Les budgets assignés à l'éducation divergent, et pas nécessairement pour des questions de moyens". "Le ministre devra se retourner vers l'AMF", affirme t-il.
Le regroupement refuse que l'année 2011 soit "une année blanche": "La période préélectorale est propice à développer des possibilités d'action". Si les constats sont partagés, la question des "moyens d'action" semble toutefois diverger d'une structure à l'autre.