L'engagement scolaire de l'élève qui redouble prévient-il du décrochage?
Paru dans Scolaire, Orientation le lundi 07 février 2011.
"Parmi les nombreux facteurs de risque identifiés par les recherches dans le domaine de l’éducation, le redoublement est l’un des prédicteurs les plus puissants du décrochage scolaire", note Marie-Eve Jannard dans une thèse soutenue à l'université de Montréal. "Toutefois, certains facteurs permettent aux élèves de progresser davantage dans leur parcours scolaire et de prévenir l’abandon des études avant l’obtention d’un diplôme". L'étude permet d'affirmer la présence d’un "effet additif" de l’engagement de l’élève au redoublement scolaire, notamment chez les adolescents provenant de milieux défavorisés. L’engagement scolaire se caractérise par différents facteurs: la participation des élèves aux activités scolaires et parascolaires, leur identification aux valeurs de l’institution ainsi que la valorisation de ces dernières.
Au Québec, 26% des élèves québécois sont en situation de retard scolaire à l’âge de 17 ans. Les informations utilisées dans l'étude proviennent d’une base de données recueillies dans le cadre d'un programme gouvernemental visant à soutenir la réussite scolaire auprès d'adolescents issus de milieux socioéconomiques défavorisés du Québec.
L'étude souligne que les élèves qui ont vécu au moins un redoublement au cours de leur scolarité ont significativement plus de risque de décrocher que les élèves qui n’ont jamais vécu de redoublement. Lorsque l’engagement de l’élève augmente, les risques de décrocher diminuent. Enfin, plus le redoublement augmente, plus l’engagement scolaire diminue.
Cette étude fournit d'autres résultats: Les garçons tendent davantage à abandonner les études avant l’obtention d’un diplôme que les filles. L’âge affecte les risques de décrocher. "Spécifiquement, les élèves plus âgés abandonnent davantage les études que les élèves plus jeunes".
L’origine ethnique des élèves permet aussi de prédire le décrochage scolaire: les Québécois abandonnent moins les études sans obtenir de diplôme que les élèves d’une autre origine ethnique. "Ce résultat peut s’expliquer par le fait que les élèves appartenant à une autre origine ne maîtrisent pas aussi bien (...) le français, que les élèves d’origine québécoise".
Le statut socioéconomique prédit faiblement le décrochage scolaire, selon cette étude. En revanche, le rendement scolaire ainsi que l’intelligence mesurée sont "significativement reliés au décrochage scolaire". "Ceci concorde avec les résultats de plusieurs études qui démontrent la puissance du rendement scolaire dans la prédiction de l’abandon des études".
L'étude permet, selon la chercheuse, d'affirmer l'"effet additif" de l’engagement de l’élève au redoublement scolaire. A fortitori, la recherche invite à prendre en compte cette variable dans la mise en oeuvre de programme contre le décrochage, mais également de démotivation ou d'échec scolaire: "Comme le désengagement de l’élève se trouve à être un dénominateur commun chez les décrocheurs et aussi chez les doubleurs, il semble pertinent de considérer l’augmentation de l’engagement scolaire de l’élève comme solution prometteuse dans la prévention et l’intervention des problématiques scolaires".