Comment proposer une animation enfance-jeunesse de qualité? L'exemple du Calvados.
Paru dans Périscolaire le mercredi 15 décembre 2010.
"Si certains acteurs s’interrogent parfois sur le sens à donner aux accueils de loisir, nombre d’élus ou de professionnels (services de l’État, collectivités, associations) s’accordent sur l’importance d’en faire des lieux réellement éducatifs, participant d’une politique de jeunesse locale", estime Natacha Blanc dans les Cahiers de l’action n°30 (édités par l’Injep).
C’est dans ce contexte que la DRDJS et la CAF du Calvados ont initié une démarche qualité depuis une dizaine d’années, avec l'aide des fédérations d’éducation populaire. De cette expérience de labellisation, les Cahiers rendent compte, en faisant converger points de vue de chercheurs, d’acteurs et de bénéficiaires de cette démarche d’accompagnement.
La dynamique s'est structurée sur trois périodes successives : dans un premier temps, autour d’un cahier des charges portant sur l’accueil des préadolescents et adolescents, dans un second temps sur l’enfance, enfin dans une démarche enfance/jeunesse. Ambition affichée: une méthodologie rigoureuse ; un regard distancié; un soutien des liens entre élus et professionnels ; l'apport de nouvelles pratiques pédagogiques...
Pour les Cahiers, l’accompagnement serait une condition des démarches qualité, aussi bien pour les structures ponctuellement en difficulté, que pour les structures au projet ambitieux visant de nouvelles dimensions (géographiques, éducatives, …) ou de nouveaux publics.
Une démarche de qualité peut-elle faire l'économie de quelques réticences? Les auteurs de ce dossier notent que les acteurs (élus et professionnels) se sont appropriés "de manière très hétérogènes" les critères de labellisation. "Certains sont pleinement compris, légitimés comme l’inscription des structures dans les territoires, tandis que d’autres semblent d’une telle évidence que certains estiment inutiles de s’y investir". D'autres encore sembleraient également trop exigeants et en inadéquation avec la réalité de terrain, comme inscrire les familles comme partenaires incontournables : "comment en faire des partenaires alors que leur demande porte essentiellement sur un besoin de garde ?".
Du côté des familles, l'étude établit une demande forte "de consommation d'un service de loisirs", qui pourrait être incompatible avec une offre de loisirs éducatifs collectifs de qualité. Les valeurs épanouissement, enrichissement, acquisition de savoir être, savoir faire, espace de valorisation, défendues par l'accueil de loisir, entreraient parfois en confrontation avec les demandes consuméristes des familles. "Une offre permanente d’activités clefs en main nuit à une démarche d'expérimentation des enfants, des jeunes", estime le dossier.
Il apparait évident aux auteurs que le souci de l'évaluation est central, "afin de favoriser la prise de conscience de cette plus-value éducative qui constitue la différence entre un simple mode de garde et un accueil collectif de qualité".
Les évaluateurs appellent à investir la question pédagogique "en lien avec les valeurs d'éducation populaire". Face aux familles et aux élus, il faudrait soutenir "les animateurs dans leur capacité à argumenter et à défendre leurs choix pédagogiques". Autre enjeu: Réduire l'écart entre les animateurs volontaires et professionnels: "Les jeunes tendent à percevoir l'animation comme un job possible parmi d’autres (...) Ce n'est plus un espace d'expérimentation, d'apprentissage du vivre ensemble, pouvant leur procurer les premières armes pour leur vie professionnelle et personnelle future". La formation BAFA n'aurait par ailleurs pas connu d'évolution majeure dans son organisation et ses contenus. "Il serait important que les mouvements d’éducation populaire et les permanents des structures organisatrices s’emparent de cette question".
Cette évaluation se conclut à un moment bien particulier: la réforme des collectivités. "Les enjeux de compétences (Intercommunalités, Région, Etat,…) pourraient rapidement être un vrai frein au développement d’une politique jeunesse cohérente", estiment les auteurs, et les différents niveaux de compétences pourraient conduire "à un décalage entre la politique jeunesse et les besoins de la jeunesse…"