Quand New-York revient du tout sécuritaire à l'école...
Paru dans Scolaire, Justice le lundi 06 décembre 2010.
"Dans une société où la sécurité est devenue le leitmotiv, l’infraction pénale n’est plus le motif de l’action, mais c’est bien la prévention ou la réduction des risques de sécurité qui est devenue centrale". Le site de l'école démocatrique (Belgique) consacre un dossier entier à la question de la "surenchère sécuritaire" à l'école et fait notamment le point sur la politique instaurée dans les écoles new-yorkaises, à partir d'un article de Chase Madar publié dans le Monde diplomatique.
Si en belgique, le début d’une collaboration entre les écoles, la police et la justice se situe en 2006 à la suite d’une série d’incidents, à New York une politique sécuritaire est en place depuis 1998, quand le maire républicain transfère la sécurité d’écoles réputées "difficiles" à la police locale (NYPD). "Dès lors, les 4500 agents de sécurité scolaire, devenus personnel policier, rendent des comptes directement au NYPD, et non plus aux enseignants ni aux chefs d’établissement".
De 2005 à 2007, pas moins de 309 élèves new-yorkais auraient été interpellés et déférés au pénal. "En matière de discipline, ce sont désormais des vigiles peu qualifiés, et souvent à peine plus âgés que les lycéens, qui deviennent la plus haute autorité dans les établissements, en lieu et place des enseignants et des directions. Provoquant eux-mêmes des formes inédites de violence." L’installation de portiques de sécurité soulèverait également bien des questions. "Celle, d’abord, de la stigmatisation des écoliers des quartiers populaires, puisque c’est dans leurs écoles que sont installés ces dispositifs technologiques, très peu dans les banlieues bourgeoises". L'article pointe aussi du doigt le "climat de tension immédiat " qu'ils instaurent.
Les effets sur la diminution de la délinquance resteraient ténus selon un rapport de 2007 de l’inspection générale de la ville, qui met en évidence une importante sous-évaluation des incidents violents par la municipalité. Un rapport "Sécurité dans la dignité", publié en juillet 2009 par un groupe d’associations indépendantes, s’appuie sur des données officielles recueillies auprès des institutions scolaires new-yorkaises (ici). Il démontre que six lycées des quartiers populaires de la ville ayant adopté une approche différente de la discipline enregistrent un taux de petits désordres et de délits très significativement inférieur à celui d’autres établissements, parfois situés dans le même périmètre, et placés sous la responsabilité des forces de police.
D’autres voies expérimentées avec succès dans des lycées de quartiers pauvres ont été relatées: Des alternatives fondées sur une définition claire des rôles respectifs (la discipline est du ressort des enseignants et des surveillants), sur une participation des élèves à la formulation des règlements (dans un esprit de respect mutuel et d’autodiscipline), et sur la garantie que les manquements seront sanctionnés en interne et non communiqués à la police ou à la justice.