Violence scolaire: éviter que l'exclusion entraine le décrochage, l'exemple de Meaux
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Justice le lundi 29 novembre 2010.
"Tout collégien exclu est en danger, et toute journée gagnée pour le maintenir dans le système scolaire est une victoire!". Azédine Issad, coordonnateur du COPS (Contrat opérationnel de prévention et de sécurité) détaille pour ToutEduc la réaction de la Ville de Meaux (Seine-et-Marne) quand elle a constaté une brutale augmentation des exclusions. "En 2005, le cumul des journées d'exclusion temporaire était de 600 pour les 5 collèges, dont 3 en ZUS [zone urbaine sensible]. L'année suivante, nous en avons compté près de 2 000! Nous n'avons pas d'explication du phénomène, mais il est probable que les violences urbaines de 2005 ont contribué à faire sauter quelques tabous. S'y est ajouté le mouvement anti-CPE qui a touché les collèges. Toujours est-il que nous devions agir."
Le plan de prévention porte sur l'image des collèges, qui sont, de fait, en concurrence, et sur l'accueil des jeunes enseignants, dont c'est souvent le premier poste, et qui ne connaissent pas les problèmes des populations. La Ville a de plus passé une convention avec une association pour qu'une psychologue reçoive les professeurs qui souhaitent évoquer leurs difficultés. Il porte aussi sur les exclusions temporaires et définitives. Pour les premières, elles se font maintenant "au sein du collège", grâce à des adultes relais, une dizaine à plein temps sur la ZUS, qui peuvent travailler avec les élèves sur les actes qui ont provoqué leur exclusion, et à des enseignants volontaires, qui bénéficient d'heures supplémentaires, pour travailler sur les lacunes de ces élèves.
Les exclusions définitives ont également connu un accroissement spectaculaire en 2006-2007, puisqu'elles ont été multipliées par deux, pour atteindre 2% de la population scolaire, soit 56 conseils de discipline, qui faisaient presque tous suite à un acte délictueux, près de la moitié des élèves concernés (43%) étant déjà connus des services de police et de la Justice pour avoir commis des délits.
"C'est le directeur départemental de la PJJ (protection judiciaire de la Jeunesse) qui a débloqué la situation quand il a mis un de ses éducateurs à disposition." La Ville a utilisé un pavillon dont elle n'avait pas l'usage et où elle a fait pour 20 000 € de travaux de réhabilitation. L'Education nationale, sous l'autorité de laquelle est placé le dispositif, a mis un poste d'enseignant (deux cette année), le Conseil général un mi-temps d'éducateur. Interviennent aussi un psychologue et un délégué du procureur. Chaque conseil de discipline est signalé à la Justice de façon que la PJJ soit mandatée et que l'élève puisse être pris en charge dès le lendemain. Il reste en général 3 ou 4 semaines, jusqu'à une réinscription scolaire.
Azédine Issad insiste, si personne n'intervient, un élève exclu peut rester sans affectation pendant 10 à 12 semaines... S'il a plus de 15 ans, il est probable qu'il ne reprendra pas pied dans le système scolaire et que le décrochage sera définitif. Il ne prétend pas que la Ville a trouvé la panacée, et l'efficacité d'un tel dispositif est difficile à mesurer, mais il est convaincu qu'en matière de prévention de la délinquance, seules des actions ciblées peuvent avoir un effet.
Au budget 2011 de la Ville, pour le dispositif concernant les exclusions définitives, sont inscrits 8 000 €, correspondant aux coûts du chauffage et autres frais de la maison qui accueille ces élèves. Il a reçu le prix de la prévention de la délinquance 2009 (voir Prévention de la délinquance: à Meaux, un dispositif pour les élèves exclus des collèges est primé) mais son promoteur estime que le dispositif mis en place pour les exclusions temporaires le méritaient tout autant, voire davantage.
Le COPS de la Ville est téléchargeable sur son site (ici).