Temps de l'enfant : "L'imagination au pouvoir"
Paru dans Scolaire, Périscolaire le lundi 24 novembre 2025.
"Nous voulons une société qui reconnaisse pleinement l’enfant comme un citoyen à part entière, capable de penser, de ressentir et de contribuer aux politiques publiques. Trop souvent, les décisions qui le concernent sont prises sans lui, alors même qu’il en subit directement les conséquences."
Il ne faut pas bouder son plaisir. ToutEduc a toujours prêté la plus grande attention à toutes les voix qui s'expriment sur les politiques éducatives, quelles qu'en soient les orientations, mais a clairement marqué, et plus encore depuis que l'accès au site est gratuit, son intérêt pour celles qui sont empreintes du souci des droits des enfants. La "Convention citoyenne sur les temps de l'enfant" le dit clairement dans son rapport, "les enfants ne sont pas assez acteurs de leurs apprentissages : on leur demande d’apprendre, mais pas suffisamment de comprendre ce qu’ils apprennent, d’expérimenter, de créer ou de participer aux choix qui les concernent". Une telle déclaration ne peut que réjouir tous "les militants de l'enfance". Comment toutefois croire que les propositions de la Convention trouveront les moyens de leur mise en oeuvre ? Elles reprennent des recommandations cent fois faites par tant d'associations et de syndicats, dans tant de rapports, et qui se sont heurtées à mille résistances, souvent étayées par de solides arguments. Elles rappellent parfois mai 1968.
En voici les éléments saillants.
Parmi les constats
"Les différents temps de la vie quotidienne des enfants se superposent et aboutissent à une organisation fragmentée, parfois incohérente (...). Les rythmes actuels ne respectent pas les besoins biologiques et les droits fondamentaux de l’enfant : le droit au repos, aux loisirs, à la santé et à la participation garantis par la Convention internationale des droits de l’enfant."
"Ce n’est qu’à partir de 9h30 jusqu’à midi que les facultés de concentration et de mémorisation sont à leur maximum. Pourtant (...) les apprentissages les plus exigeants, comme les mathématiques ou la lecture, peuvent être placés à des moments de moindre attention et les après-midis s’étirent en apprentissages qui demandent encore beaucoup de concentration."
Dès le plus jeune âge, les enfants "sont soumis à une pression, qu’elle vienne de l’école, des parents ou du regard de la société. L’école, d’abord, valorise encore trop souvent la réussite mesurée par les notes, les classements ou les comparaisons, au détriment du plaisir d’apprendre. Au lycée, Parcoursup accentue cette pression autour de l’orientation. À la maison, beaucoup de parents, inquiets pour l’avenir de leurs enfants dans un monde compétitif, reproduisent, parfois malgré eux, cette exigence de réussite, en multipliant les activités ou les attentes scolaires (...). L’école est parfois trop rigide : elle se focalise sur la productivité, le fait de finir les programmes, et laisse encore trop souvent de côté les enfants qui ont le plus de difficultés à suivre, qui ont besoin de plus de temps. L’école manque également de places (...). La réduction des effectifs dans les classes est une condition de réussite essentielle à nos propositions."
"Pour assurer la mise en œuvre de nos propositions, il est primordial de repenser les programmes. Les programmes prendront en compte le sens de l’apprentissage (pourquoi faut-il apprendre ?), le lien entre les apprentissages et la vie (ce qu’il faut apprendre et comment ancrer les matières dans le concret). Les matières seront repensées pour mieux relier les apprentissages à la vie pratique et pour mieux les mettre en correspondance avec le monde contemporain (...). L’évaluation privilégiera le suivi des progressions plus que la notation actuelle aujourd’hui obsolète et provoquant de la pression et de l’angoisse chez les enfants."
Le "manque de moyens et le fractionnement du temps de travail se traduisent par une pénurie de personnels qualifiés : enseignants, animateurs, éducateurs, accompagnants, AESH et agents territoriaux témoignent d’une surcharge de travail et d’une reconnaissance insuffisante. Dans de nombreux territoires, les communes peinent à recruter des animateurs pour le périscolaire ou les centres de loisirs, entraînant la réduction d’activités et la fermeture de structures."
"Il revient à l’école de s’adapter aux enfants et non l’inverse. Tous les enfants, même avec des troubles importants, doivent être au maximum intégrés dans les classes. Si l’orientation des enfants vers des établissements spécialisés relève du choix des parents en lien avec les professionnels de santé, il faut en revanche adapter – autant que possible – l’école afin de répondre aux besoins de tous les enfants (...) et pas uniquement ceux porteurs d’un handicap ou d’un trouble spécifique."
"Nous sommes très fortement préoccupés par la montée du harcèlement, de la violence et du mal-être des enfants, à l’école et au sein des familles."
"71 % des enfants issus de familles modestes ne sont pas inscrits dans un club ou une association sportive et culturelle, contre 38 % des enfants de milieux favorisés."
Parmi les propositions.
"Mettre en place un temps d'accueil échelonné avant les cours" et "proposer un accueil aux enfants qui n’ont pas d’autres choix que d’arriver tôt le matin (...). Cet accueil permet de proposer un petit-déjeuner gratuit et une transition douce entre le réveil et les classes (...). Le temps d’accueil peut être ponctuellement l’opportunité de rencontre parents / enseignants dans le cadre d’un café-parents (à élargir aux grands-parents et assistantes maternelles)."
"Établir un socle commun d’apprentissages obligatoires comprenant des apprentissages théoriques, placés le matin, et des apprentissages pratiques, placés l’après-midi avec des projets interdisciplinaires pour apprendre par l’expérimentation, par des ateliers de la vie pratique et par de la pratique artistique, culturelle et sportive."
Les après-midi scolaires seraient divisés en deux. Jusqu'à 15h30, "des projets interdisciplinaires pour apprendre par l’expérimentation (...) dans une pédagogie de projet, c’est-à-dire une pédagogie active", après 15h30, "des activités artistiques, culturelles et sportives gratuites". Toutefois cette proposition a soulevé un débat : "Il n’y a pas eu de consensus sur le caractère facultatif ou obligatoire des activités après 15h30, ni sur l’application de cette mesure à l’ensemble des tranches d’âges". Il n'y a pas eu non plus de consensus sur la réduction à 45' des cours dans le secondaire, avec "des temps de pause", proposition qui a recueilli 70 % des voix.
L'idée que "les devoirs se font essentiellement à l’école avec des 'revoirs' à la maison" a davantage fait consensus (80 % pour, 11 % d'abstentions)
La semaine de 5 jours recueille 83 % des voix (soit 101, contre 17 voix, abstention, 13 voix). Le texte précise : "Comme prévu par la proposition n°3 relative à l’organisation de la journée, pour tous les jours de la semaine, le matin est consacré aux apprentissages théoriques, et l’après-midi aux apprentissages pratiques : projets, ateliers de la vie pratique, pratique artistique, culturelle et sportive. Le mercredi après-midi, les apprentissages pratiques visent uniquement à diversifier les apprentissages et à développer de nouvelles compétences C’est seulement le mercredi après-midi qu’il n’y a pas de continuité avec les acquis théoriques du matin. Il sera dédié à l’ouverture à des structures associatives qui proposent aujourd’hui des activités sur le temps extrascolaire. Le reste de la semaine, certains projets de l’après-midi s’inscrivent en continuité avec les apprentissages théoriques (travaux pratiques en sciences de la vie et de la terre par exemple)."
Autre proposition dont la mise en oeuvre pourrait être problématique, "rendre obligatoire l'organisation par les établissements scolaires, en partenariat, de plusieurs temps de rupture dans l’année : au moins un séjour/voyage par an, pour tous les élèves et des temps 'd’apprentissage autrement' (...) Ce séjour a une durée de 2 journées et 1 nuit minimum".
Les conventionnels proposent également la création d'un "ministère de l'enfance", l’obligation "pour chaque territoire d’élaborer un nouveau PEdT", le développement de "bâtiments, équipements et mobiliers flexibles, modulaires et ergonomiques", l'ouverture des établissements "en dehors des heures passées en classe avec les enseignants (...) pour proposer de nouvelles activités", "l’établissement obligatoire d’une charte de la parentalité dans les entreprises, annexée au règlement intérieur, à l'image de la charte de la déconnexion"...
Les propositions non adoptées (en dessous du seuil de 66 % d’adhésion) ou rejetées (en dessous du seuil de 50 % d’adhésion)
Trois propositions n'ont pas été adoptées, "Créer un service public de la parentalité qui se décline en guichet unique identifié et gratuit partout sur les territoires", "Créer un crédit annuel de 56 heures pour les parents", "Mobiliser les seniors volontaires dans les temps de l’enfant, au-delà du cercle familial"
Deux propositions ont été rejetées, "Supprimer les devoirs à la maison : les devoirs se font à l’école uniquement", "Réduire la durée des vacances".
Le site ici

