Quel rôle pour les RASED dans la prévention de la grande difficulté scolaire ? (colloque de la FNAME)
Paru dans Scolaire le vendredi 10 octobre 2025.
"On est en train de disparaître silencieusement." C'est le sentiment des personnels des RASED (réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté), et il s'exprime à l'occasion du 22ème colloque de la FNAME. Quelque 600 de ces enseignants spécialisés dans les aides "à dominante pédagogique", auparavant "maîtres E" sont réunis depuis hier 9 octobre à Roubaix. Ils (elles surtout, en proportion) n'ont pas toujours été autorisé.e.s par leur DASEN à s'absenter pour ces trois journées marquées par les exposés de chercheurs renommés, et ont donc pris des congés sans solde pour bénéficier de ces moments de formation continue que l'institution n'organise pas.
Ils voient leur nombre diminuer depuis 2008, dans tel département où l'on comptait une trentaine d'enseignants spécialisés en "aides relationnelles", il n'y en a plus que deux. Ils (et elles) s'inquiètent aussi du rôle qu'auront à jouer les RASED dans les PAS (pôles d'appui à la scolarité) qui se mettent en place, souvent sans qu'ils soient consultés alors qu'ils ont évidemment un rôle à jouer dans la prévention des difficultés des élèves dont les troubles s'enkystent tandis que se multiplient les dossiers déposés auprès des MDPH. Ici ou là, on leur demande de ne plus intervenir auprès des élèves, mais uniquement auprès des enseignants mis en difficulté, et donc de jouer un rôle de conseillers pédagogiques. Les dispositifs et les "référents" se multiplient et s'empilent, sans cohérence...
La journée d'hier était marquée par les interventions de Stanislas Morel (Sorbonne Paris-Nord), de Grégoire Borst (Paris Cité et LaPsyDE), d'Arnaud Roy et Vincent Lodenos (CHU de Nantes). Ces deux derniers ont montré comment on était passé du "tout psychologique" au "tout neuronal", alors que nous n'avons pas de marqueur biologique pour de nombreux symptôme, ce qui amène trop rapidement à faire d'un trouble un syndrome, à identifier un enfant à sa difficulté, "je suis TDAH". Avant eux, S. Morel avait invité à "mettre en perspective" les apports des sciences cognitives, à ne pas occulter les nombreuses controverses qui traversent "un 
milieu très riche" ; les perspectives sont intéressantes, mais les promesses sont plus nombreuses que les connaissances fiables. Il ajoute que, sur la dyslexie, il n'existe aucun consensus scientifique et que subsiste "la difficulté à appréhender la complexité de la difficulté scolaire". Il souligne la nécessité d'organiser des savoirs multiples et des disciplines qui ne travaillent pas ensemble. Grégoire Borst oppose la réussite scolaire telle que la mesure PISA, pour laquelle le QI est un excellent prédicteur, et la réussite d'une éducation qui produit des adultes en bonne santé selon la définition de l'OMS. Se donner une telle finalité nécessite de travailler sur les capacité d'autorégulation, sur les compétences psychosociales, dans un contexte non stressant. Il plaide d'ailleurs pour la sieste pour tous les enfants de maternelle, y compris en grande section. Il faut aussi que, très tôt, les enfants soient initiés à la métacognition, à comprendre quels mécanismes ils mettent en jeu pour apprendre. Et il souligne le poids du contexte social qui influe très tôt sur les possibilités de développement de l'enfant. La lutte contre les inégalités sociales est essentielle et Grégoire Borst rejoint ainsi l'interrogation de Stanislas Morel, manifestement largement partagée par la salle, les sciences cognitives et les neurosciences ne risquent-elles pas dépolitiser les questions que posent les diverses formes de la difficulté scolaire ?
Le site de la FNAME ici, la flèche est un présent d'enseignants spécialisés de Polynésie française