Toute réforme de l'école suppose de s'interroger sur sa mise en oeuvre, donc de renoncer au fantasme de toute puissance
Paru dans Petite enfance, Scolaire, Périscolaire, Orientation le jeudi 02 octobre 2025.
"On ne peut pas changer un curriculum sans toucher à la formation initiale et continue des enseignants, sans suggérer ou développer des pédagogies et des didactiques appropriées, sans revoir l'évaluation des apprentissages des élèves, sans envisager des terrains d'expérimentation, sans faire participer les enseignants (...), sans communiquer le contenu du changement aux parents des élèves et sans traduire le curriculum (...) de manière à assurer chez eux une bonne compréhension des attentes et des exigences à transmettre à leurs enfants, etc.".
Ce constat est tiré de "Comment réformer l'école", un ouvrage collectif qui montre que "réformer l'école n'est jamais le fruit d'un processus linéaire qui irait de l'identification objective d'un problème à sa résolution sur le terrain en passant par une décision politique rationnelle et toute puissante (...). Une réflexion sur la régulation de l'activité des professionnels, autrement dit sur la mise en oeuvre concrète des politiques est indispensable au moment de leur conception."
Et d'ailleurs qui a la légitimité pour "dire le bien et le bon en éducation, et donc les orientations que doit prendre l'action publique en la matière. Qui sont les acteurs les plus légitimes ?" Les experts internationaux ? Les chercheurs en éducation ? Les enseignants ? Les acteurs politiques ? Les parents ?
"La vision donnée dans cet ouvrage de la conception, de la fabrication et de la construction des politiques éducatives peut sembler pessimiste. On pourrait en effet considérer cette situation d'incertitude et souvent d'incohérence de l'action publique en éducation comme délétère car incapable de produire une logique d'ensemble, une visée commune", mais cette situation n'est-elle pas "inhérente aux processus démocratiques eux-mêmes, aux changements profonds de la société qui confèrent aux acteurs publics et privés, individuels et collectifs, de plus en plus de pouvoir d'action" ? Et l'essentiel n'est-il pas, pour les contributeurs, de souligner "l'importance que revêt la phase de mise en oeuvre dans les trajectoires des politiques éducatives ? N'est-ce d'ailleurs pas le problème que pose le "New Public Management" qui insiste sur l'importance de "la fidélité des acteurs aux prescriptions" qui leur sont adressées : "Il y a une part d'utopie ou de fantasme d'une toute puissance managériale dans cette approche."
"Comment réformer l'école", collectif sous la direction de G. Felouzis, B. Fouquet-Chauprade et S. Revaz, les autres contributeurs étant N. Mons, X. Pons, C. Maroy, C. Lessard, H. Buisson-Fenet, B. Wentzel, G. Rika et N. Friant, Presses universitaires de Rennes, 188 p., 22€