Enseigner le multiculturalisme: comment dépasser les stéréotypes (recherche).
Paru dans Scolaire le vendredi 01 octobre 2010.
"La manière dont nous enseignons actuellement le multiculturalisme est un échec, parce qu'elle n'arrive pas à rapprocher les groupes de culture différente, explique la chercheuse en sciences de l'éducation Adeela Arshad-Ayaz (Université Concordia, Montréal, Québec). Une des difficultés principales reste que les professeurs, issus de groupes majoritaires, sont insuffisamment impliqués dans la préparation de cet enseignement."
Pour elle, la simple connaissance d'autres cultures ne suffit pas. "Dans plusieurs cours, les professeurs font encore une typologie, une liste des cultures et de leurs caractéristiques auxquelles les étudiants se réfèrent. Mais les cultures ne sont pas monolithiques et n'entrent pas facilement dans une catégorie", ajoute t-elle, précisant que "la célébration de la diversité ne fait que renforcer les stéréotypes".
Forte des conclusions d'une étude empirique, menée dans plusieurs universités du monde, dont la London School of Economics (Grande-Bretagne), l'Université de Regina (Canada) et l'Université de Hamdard (Pakistan), elle suggère plutôt "une approche pédagogique qui puisse impliquer les étudiants": "Les étudiants doivent s'interroger sur les processus locaux et globaux qui créent l'inégalité et la différence".
Elle propose d'examiner d'autres facteurs tels que l'histoire, la politique mondiale, l'environnement ainsi que les accords et traités locaux, régionaux et internationaux. "Il faut commencer en utilisant le modèle inversé: au lieu de commencer à parler des différences culturelles d'un point de vue micro et de générer des sentiments comme la culpabilité, mieux vaut commencer d'un point de vue macro. (...) Par exemple, j'ai incorporé dans un cours sur l'interculturalisme des questions portant sur l'histoire et le néolibéralisme. Comment les politiques du FMI ou de la Banque mondiale nous affectent-elles à un niveau local? Quel impact a l'ALENA sur les Mexicains, les Canadiens?".
Pour la chercheuse, "cette façon de penser entraînera une empathie sociale qui constitue un bon point de départ pour comprendre la diversité."