Quels leviers face à la crise d’attractivité des métiers de la fonction publique ? (rapport France Stratégie)
Paru dans Petite enfance, Scolaire le mardi 10 décembre 2024.
Mots clés : fonction publique, recrutement, attractivité
Le rapport France Stratégie, publié le 9 décembre, alerte sur le manque d’attractivité des métiers de la fonction publique, parmi lesquels celui d’enseignant. Intitulé "Travailler dans la fonction publique : le défi de l’attractivité", le rapport dresse un état des lieux de la situation et le panorama des raisons de cette crise face à laquelle il émet des préconisations. Portant sur les trois volets de la fonction publique – d’Etat, territoriale et hospitalière –, le rapport comprend un focus sur les enseignants, un autre sur les professions du numérique.
Enseignants : moins d’entrants et plus de sortants
Les chiffres le montrent : le métier de professeur attire moins. Chez les étudiants, "la part et le nombre de ceux qui choisissent des formations conduisant prioritairement vers les métiers de la fonction publique, et tout particulièrement vers les métiers de l’enseignement et de l’administration générale, décroissent sensiblement, au niveau licence et surtout Master". Un mouvement qui s’illustre par la baisse pour le Master MEEF qui est de l’ordre de - 26 % entre 2016 et 2023.
Le rapport pointe "une fragilisation croissante de la capacité de la fonction publique à retenir ses agents". Chez les enseignants, le nombre des démissions et des ruptures conventionnelles "est en croissance régulière et représente désormais une part significative des ‘sorties’ annuelles : plus de 15 % en 2022, contre 2 % en 2012, pour un nombre de départs à la retraite quasi stable. Les démissions font donc peser sur les besoins de recrutement un poids non négligeable".
Dans un contexte "d’assèchement des viviers traditionnels de recrutement du service public", et alors que le secteur privé attire davantage les nouveaux diplômés, les tensions liées au recrutement risquent de s’accentuer dans la fonction publique. Le secteur de l’éducation n'échappe pas à la dynamique d'attrait pour le privé. "Le nombre de débutants diplômés du supérieur a en effet crû de 17 % dans le secteur privé mais chuté de 29 % dans le secteur public entre 2007 et 2019. Le phénomène est encore plus marqué chez les bac +4 et plus, niveau de recrutement des enseignants (+63 % dans le privé sur la période, -2 % dans le public).
Les conséquences sur la vie des Français de cette crise d’attractivité sont déjà présentes et risquent de se renforcer. L’éducation est largement concernée, avec l’"absences de professeurs non remplacés − voire (l’) incapacité à garantir "un enseignant devant chaque classe" à la rentrée", donne en exemple le rapport.
Agir sur les conditions de travail et la rémunération
Face à ce constat, le rapport propose des leviers d’action "pour reconstruire l’attractivité de la fonction publique", un "impératif" pour "relever le défi fondamental de la restauration de la confiance dans l'administration". Une des causes de cette crise est "la détérioration des conditions d’exercice des agents (de la fonction publique)" qui concernent notamment les "soignants et enseignants". "La ‘vocation’ attachée à ces métiers est reconnue, mais elle apparaît parfois comme sacrificielle et suscite davantage de compassion que d’envie", lit-on dans le rapport.
De plus, l’exposition aux risques psychosociaux est assez élevée. "On relève notamment une augmentation du travail ‘sous pression’ (métiers de cadres, FPH, enseignants) ainsi que des tensions avec le public." Parmi les salariés en contact avec le public, le niveau de tensions déclaré par les personnels de l’Éducation nationale est "alarmant" : "58 % en moyenne déclarent des tensions, dont 65 % des professeurs des écoles et 88 % des directeurs d’établissement."
Il faut aussi agir sur les rémunérations estime le rapport. "Les rémunérations sont une composante importante du sentiment de perte d’attractivité, qu’il faut objectiver sous l’angle du pouvoir d’achat ou par comparaison avec le privé", d’autant plus que la progression salariale est moindre dans le public que dans le privé.
Plus généralement, le rapport met en évidence des chiffres qui illustrent le manque d’attractivité pour l’ensemble de la fonction publique. "15 % des postes ouverts aux concours de la fonction publique d’État non pourvus en 2022, 21 % des lits de l’AP-HP fermés la même année, dont 70 % par manque de personnel, 64 % des collectivités territoriales indiquant au moins un champ professionnel en tension en 2023."
Le rapport adresse ainsi un "message d'alerte" et un "message d’action". Il appelle à "articuler l’ensemble des leviers identifiés − image, reconnaissance, évolutions de carrière, rémunérations, qualité de l’emploi et des conditions d’exercice" afin de penser une "stratégie globale, associant mesures d’urgence et perspectives de moyen terme, actions sur l’ensemble de la fonction publique et déclinaisons spécifiques par versant et par métier".
Le rapport complet ici.
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