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Comment la "seconde génération" d’immigrés vit et interroge l'école républicaine. (recherche)

Paru dans Scolaire le mercredi 15 septembre 2010.

 "Il est clair que le modèle républicain de notre école est récent, souligne la chercheuse Françoise Lorcerie (CNRS), dans une publication téléchargeable en ligne (ici).[Il]  est très éloigné de celui que les premiers républicains ont ébauché ou désiré au tournant des 19ème et 20ème siècles. Le point intéressant, cependant, est que l'incorporation de l'Islam et des musulmans dans ce modèle est perçu comme une menace". Pour elle, le "modèle normatif d’école républicaine" français ne s’opposerait pas à l’expression des appartenances sociales ou religieuses, '"il les ignore plutôt". Mais le modèle français serait "profondément miné" par la visibilité de la seconde génération d’immigrés postcoloniaux. Cela susciterait diverses réactions de la part des élèves puis de la part des personnels, "amenés à gérer les problèmes dans l’improvisation, sans aucune formation".

Comment les jeunes musulmans perçoivent-ils leur statut de minorité? "Cet aspect est sous-étudié en France, mais quelques enquêtes commencent à éclairer cette question", souligne F. Lorcerie, qui ajoute que ces rares enquêtes ne confirment pas le bilan apocalyptique établi dans les essais et médias, lesquels "concentrent le débat sur la question du port du voile à l'école menant à la loi de 2004 sur l'interdiction du voile, au nom de la laicité et de la nature spécfique de l'espace scolaire".

Françoise Lorcerie note que dans leur grande majorité, les immigrés de seconde génération ne réagissent pas "en tant que musulmans": "L'exemple le plus frappant concerne les émeutes de novembre 2005. (...) Les leaders muslmans des communautés ont tenté vainement de jouer les intermédiares entre la police et les émeutiers". 

Ces jeunes se sentiraient en revanche fortement discriminés: "Ils se comparent à la classe blanche moyenne, non à leurs cousins de leur pays d'origine, et ils ressentent comme injuste la manière dont ils sont traités." Ils croiraient aux promesses républicaines mais se sentiraient traités comme "différents". Ils développeraient un sens aigu de l'injustice et de l'humiliation. Ces traits se retrouveraient dans l'espace scolaire. "Un sens fort de l'injustice est la seule chose qui peut distinguer le parcours des élèves d'origine musulmane des autres, en France". Elle note en outre que la plupart du temps, les élèves ne font aucune demande spécfique aux agents scolaires en lien avec l'Islam (lieux de prières etc...), mais restent attachés à l'observation de la période du Ramadan.

Parmi les enseignants, la plupart "sentent ou imaginent que ces élèves attendent une forme de reconnaissance collective, en lien à l'Islam ou à l'histoire coloniale", observe la chercheuse. Ce besoin serait en effet fondé, mais dans "les conditions d'organisation françaises, les pratiques ne peuvent être stabilisées". Les enseignants exerçant dans certains quartiers urbains seraient conduits à improviser seuls et seraient "pris dans des catégorisations triviales de leurs élèves et voisinnages (...)'". "C'est comme si les enseignants français connaissaient les difficultés rencontrées par les minorités, mais qu'ils manquaient de l'habitude de mettre des mots sur ces questions, et ainsi ne savaient pas vraiment que faire ni comment".

 

 

 

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