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La lecture et les jeunes: Entre plaisir et stratégie. (publication)

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture le lundi 13 septembre 2010.

 Comment lisent les ados? Comment comprendre  l'"abandon progressif" de la lecture chez certains adolescents? Comment motiver ceux qui disent "qu'ils ne lisent jamais!"? Quel rôle peut jouer l'institution scolaire?  Edmée Runtz-Christan et Nathalie Markévitch Frieden ((Université de Fribourg) ont interrogé 235 élèves, âgés de 17 ans, pour comprendre comment et ce qu'ils aimaient lire. "Il en ressort que les 4/5 des élèves lisent pour apprendre et se distraire, leurs intérêts étant pluriels (...). 1/5 de notre échantillon ne lit que par obligation."

Les ados ont surtout deux raisons de lire: l'apprentissage et la distraction. Parmi les motivations évoquées de la lecture-apprentissage, apparaissent les soucis "d'élargir leur culture générale", "de se documenter et nourrir une recherche personnelle", "une stimulation de la pensée", "un enrichisssement de l'être". 35 élèves ont des motifs plus affectifs, considérant la lecture comme un biais pour la découverte de l'autre  ("la lecture permet de mieux connaître celui qui nous a conseillé l'ouvrage"). La lecture-distraction est présentée comme un moyen d'évasion et une recherche d'émotions. "Même si actuellement le livre de divertissement n'est plus banni de l'univers scolaire, mais considéré comme un mode d'accès à l'écrit et de ce fait plutôt encouragé, les élèves n'y font pas spontanément référence lorsqu'ils s'expriment sur leurs lectures", soulignent les auteurs.

L'étude dresse en outre un portrait des lecteurs adolescents, à qui, pour la majorité, l'enfance aurait laissé "de merveilleux souvenirs de lecture", mais qui entretiennent ensuite un rapport "plus pudique et plus hésitant" au livre."Le jeune passe de l'enfance (...) à l'âge des choix et des goûts personnels (...). Il s'éloigne des prédilections littéraires de ses parents ou éducateurs. (...) Cette liberté le laisse hésitant, craintif, cherchant ailleurs des références pour sélectionner ses lectures".  Pour un certain nombre de jeunes, ce moment serait aussi celui des premières difficultés de lecture. "Cette situation nouvelle entraine des stratégies de camouflage, suscite une honte, une tristesse et parfois un rejet".

Quelles conclusions l'institution scolaire peut-elle tirer de ces observations? Il s'agirait, estiment les auteurs, de repenser la programmation de la lecture pour qu'entre l'enfance et l'adolescence, "l'évolution de l'acte de lire reste fluide", à savoir veiller à ne pas passer trop rapidement d'un stade à un autre et penser les liens entre les cycles de la scolarité. "En évitant les larges écarts entre école primaire et collège ou entre collège et lycée, on peut faire le pari que l'on perdrait moins de lecteurs en chemin".

Il s'agirait également, dans les établissements, de proposer aux élèves des modules de "lecture-abstraite, lecture-rapide ou lecture scientifique". Les auteurs notent que si "la lecture-écrémage est indispensable à la survie professionnelle", il faut parrallélement faire découvrir aux adolescents que lire procure du plaisir. Les professeurs auraient à charge de présenter aux élèves la multiplicité des formes et niveaux de lecture (apprendre, se distraire, s'émouvoir..) et de leur montrer que "les bons lecteurs font souvent une double lecture des textes, d'une part en les parcourant rapidement pour en comprendre le sens et d'autre part en les relisant de manière approfondie pour en apprécier les finesses stylistiques ou structurales".

Enfin, les auteurs soulèvent la question des lieux de la lecture. Certains lieux publics et anonymes, comme le kiosque ou la grande surface, favoriseraient l'accès aux livres moins légitimes; quand la librairie, la bibliothèque offriraient un cadre intellectuel, plus formel, mais rassurant pour le jeune lecteur qui doit faire un choix. L'ouvrage s'interroge sur l'opportunité qu'auraient les écoles, les bibliothèques et les librairies de collaborer entre elles afin de "favoriser la lecture". Il suggère aux professeurs, habitués à commander les livres qu'ils vont faire lire pendant la classe, de laisser les jeunes entrer dans une librairie pour se procurer l'ouvrage. Il pose aussi la question du contenu des bibliothèques scolaires: "Pourquoi ne pas pourvoir les rayons de livres touchant à des dimensions plus "illégitimes" et plus privées des goûts des lecteurs"?

Lire à l'adolescence, Réalités et stratégies de lecture, Edmée Runtz-Christan et Nathalie Markevitch Frieden, Chronique sociale, juin 2010.

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