Quelle rentrée scolaire pour les enfants qui sont à la rue, toujours plus nombreux ? (UNICEF, FAS)
Paru dans Petite enfance, Scolaire, Périscolaire, Justice le jeudi 29 août 2024.
Plus de 2 000 enfants sont "sans solution d’hébergement la veille de la rentrée scolaire", estiment l’UNICEF France et la FAS (Fédération des acteurs de la solidarité) qui publient leur 6e baromètre ce 29 août et qui constatent "une augmentation alarmante du nombre d’enfants sans abri", 120 % par rapport à 2020 ; ils étaient alors 927. Dans la nuit du 19 au 20 août, 2 043 enfants "sont restés sans solutions d'hébergement à la suite de leur demande au 115". 467 avaient moins de trois ans. Les deux organisations précisent que ces chiffres "ne sont pas exhaustifs" puisque "69 % des personnes sans-abris n’appellent plus ou pas le 115", tandis que "les mineurs non accompagnés sans-abri et les familles vivant en squats ou en bidonvilles ne sont pas comptabilisés".
"D’année en année, la situation s’aggrave, souligne Adeline Hazan. De plus en plus de femmes seules et d’enfants de moins de 3 ans sont à la rue." Pour la présidente de l’UNICEF France, les causes sont plurielles : "une absence de volonté politique, l’augmentation de la pauvreté, la saturation du parc d’hébergement d’urgence, alors qu’il s’agit de la responsabilité de l’État, et le manque de construction de logements sociaux."
Parmi les DNP, les "demandes (au 115) non pourvues", près de 6 sur 10 concernent des familles avec enfant(s) (soit 3 843 personnes sur un total de 6 473, 22 % sont des hommes seuls, 8 % des femmes seules, 6 % des couples sans enfants, 5 % des groupes d'adultes sans enfants, 1 % des mineurs isolés ou en groupe). "Parmi les personnes en familles, 31 % étaient des femmes seules avec enfants." A noter encore que les trois quarts des familles avaient déjà dormi dans la rue la veille : ce taux "témoigne du caractère généralement durable des parcours de rue". "Cet effet de durabilité complique la réinsertion", explique Nathalie Latour, directrice générale de la FAS, pour qui "cette répétition [du nombre d'enfants à la rue] est inquiétante car nous nous habituons à une situation inacceptable qui met des enfants dans des insécurités réelles et psychiques."
C'est en Ile-de-France que sont comptabilisées le plus de personnes en familles et à la rue (1 405). Viennent ensuite Auvergne-Rhône-Alpes (553), les Hauts-de-France (403), Occitanie (398). Si le nombre des personnes en familles et sans-abri outre-mer est relativement faible, une soixantaine, ce chiffre "n’est absolument pas représentatif de l’état du mal-logement dans ces territoires" puisque on estime que près de 3 habitants ultramarins sur 10 sont concernés par le mal-logement ou sans domicile.
Les deux organisations dénoncent "un abandon de tous les principes fondamentaux et juridiques de l’accueil, qui ne permettent même plus de protéger des femmes enceintes et des enfants de moins de trois ans", elles considèrent que "les politiques récentes telles que la loi 'anti-squat', participent à stigmatiser les plus vulnérables et à renforcer leur exclusion", elles ajoutent que "l’incertitude du contexte politique fait craindre une dégradation de la situation". Elles appellent "à une augmentation immédiate des places d’hébergement, promise depuis janvier 2024, ainsi qu’à la mise en œuvre d’une programmation pluriannuelle de l’hébergement et du logement". "Sans action très volontariste, la situation va encore s’aggraver", alerte Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé Pierre. Dans le contexte actuel où le gouvernement démissionnaire est chargé des affaires courantes, Manuel Domergue rappelle que "la gestion [de celles-ci] implique le respect des droits fondamentaux", dont l’hébergement des enfants fait partie.