Comment les professeurs principaux de terminale conçoivent leur mission d'accompagnement à l'orientation (étude, LIEPP)
Paru dans Scolaire le mardi 11 juin 2024.
"Les professeurs principaux se trouvent dorénavant au cœur de l’accompagnement des élèves dans l’élaboration de leurs projets d’orientation", constate l'Institut de Sciences po d'analyse des politiques publiques dans un "Policy brief" consacré à "l’accompagnement à l’orientation en Terminale". Il ajoute aussitôt que les pratiques des enseignants diffèrent en raison des politiques d’établissements "mais aussi en raison de l’absence de référentiel clair et d’un ensemble de savoirs partagés en la matière". Les auteurs, Paul Lehner, Erwan Lehoux, Anne-Claudine Oller, Clément Pin (Lille, Paris 8, Sciences po, Cergy) distinguent quatre postures chez les enseignants.
Les "empêchés" manquent de temps puisque "aucun volume horaire n’est dédié à l’orientation dans l’emploi du temps des élèves". Ils "assurent un accompagnement minimal" et "priorisent l’achèvement du programme".
Les "bricoleurs-opportunistes" manquent de temps et/ou ont un faible sentiment de compétences, ils cherchent à engager les élèves "dans un travail de recherche et d’appropriation des informations sur les filières d’enseignement et les débouchés professionnels". Ils s’appuient principalement sur les informations fournies par Parcoursup et l’ONISEP.
Pour les professeurs principaux correspondant à ces deux profils, il s'agit surtout d'assurer à leurs élèves "un même accès aux 'ressources' (informations et outils) jugées indispensables". Ce type d’accompagnement vise à responsabiliser l’élève, "à lui déléguer la charge d’utiliser à bon escient les ressources disponibles".
Les "experts-conseil" proposent à leurs élèves "un accompagnement plus personnalisé". Ils organisent des visites de salons, reçoivent les élèves et leurs parents, échangent avec eux "via les moyens numériques voire par téléphone". Ils les guident dans leurs recherches "sur certaines ressources disponibles, notamment sur le site de l’ONISEP", ils s’appuient sur leur connaissance plus ou moins fine de l’enseignement supérieur et leur "prodiguent des conseils ciblés pour alerter leurs élèves sur ce qu’ils estiment être, par expérience, leurs faiblesses".
Enfin, certains professeurs principaux "adoptent la posture du coach" et proposent à leurs élèves un accompagnement plus personnalisé. Ils se rendent "particulièrement disponibles et développent une relation de confiance avec les élèves et leurs parents". Pour eux, "l’accompagnement à l’orientation a pour fonction l’éveil et l’épanouissement personnel des élèves indépendamment parfois de leurs résultats scolaires". C’est également en fonction de leur personnalité que les élèves hiérarchisent leurs vœux sur Parcoursup "et non en fonction de leurs chances objectives d’être admis“.
Les élèves ayant un PP se rapprochant de la figure de l’expert-conseil ou du coach se voient proposer un accompagnement à l’orientation s’inscrivant dans une relation visant la reconnaissance par l’élève, "des aspirations et du potentiel scolaire et extra-scolaire propres à chaque élève". Plus que l'égalité des chances, c'est leur émancipation qui est visée et les auteurs voudraient voir "combiner les postures de l’expert conseil et de coach" qui leur paraissent les plus intéressantes. Toutefois, leur étude porte sur un nombre limité d'enseignants et ils ne donnent aucune évaluation des proportions de professeurs principaux correspondant à tel ou tel profil.
L'action des enseignants dépend aussi des choix de l'établissement. Les heures dédiées à cet accompagnement des élèves "peuvent ne pas du tout être programmées" ou bien faire l’objet d’un fléchage sur tout ou partie des heures d’accompagnement personnalisé (AP). Les chefs d'établissement peuvent constituer des binômes de professeurs principaux "sur la base des affinités électives des enseignants" ou en associant "un professeur de tronc commun avec un professeur de spécialité". Quant aux pratiques de rédaction des "fiches avenir", elles varient d’un établissement à l’autre, "certains ayant tendance à émettre plus systématiquement que d’autres des avis positifs afin de ne pas pénaliser leurs élèves".
Les auteurs notent encore que certains établissements "mobilisent de manière significative leurs conseillers principaux d’éducation ou leurs professeurs documentalistes" tandis que d'autres sollicitent des ressources externes "dans le cadre de cordées de la réussite" ou en recourant "à l’intervention de prestataires privés ou associatifs subventionnés par les collectivités locales".
L'étude est téléchargeable ici