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Ecole publique et laïque : une union de syndicats et d'associations pour un autre "rapport de force" avec le Gouvernement et le privé sous contrat

Paru dans Scolaire, Périscolaire le mardi 12 mars 2024.

"L'Ecole publique, laïque, gratuite et obligatoire doit être LA priorité du pays", estiment 26 organisations qui s'unissent pour "construire le rapport de force nécessaire pour réaliser partout les ambitions" de cette école qui a vocation à accueillir "toute la jeunesse". Si la FSU est à l'origine du mouvement, lancé au printemps 2023 quand Pap Ndiaye tente de remettre la mixité scolaire à l'agenda politique, la CGT Educ'action, SUD-éducation et l'UNSA Education la rejoignent, ainsi que le CNAL (Comité national d'action laïque), la FCPE, la Ligue de l'enseignement, la ligue des droits de l'Homme, le RFVE (le réseau des villes éducatrices), la Jeunesse au plein-air, les Francas, l'UNEF, le Mouvement national lycéen, l'Union syndicale lycéenne... Même si ni le SNALC, ni la FNEC-FP FO, ni le SGEN-CFDT n'y ont adhéré, tous les participants, qui présentaient à la presse ce 12 mars leur tribune insistent sur "le caractère exceptionnel" de cette mobilisation, comme on n'en avait pas vue "depuis 1994" ! D'autant, ajoutent les intervenants, qu'il ne s'agit pas d'un texte "a minima", cherchant le plus petit dénominateur commun.

Cette réunion est le fruit d'un processus. Les propos d'Amélie Oudéa-Castéra et le rapport sur "Stanislas" ont en effet renforcé la prise de conscience qui avait suivi la publication des IPS (indice de position sociale) des établissements publics et privés, et celle-ci intervenait à l'occasion d'une modification du climat intellectuel. "A un moment, nous avons eu le sentiment qu'il était impossible de dire qu'il fallait donner la priorité à l’école publique, le débat était enterré. Puis sont intervenus le COVID, la contestation des vaccins et de la science, et nous nous sommes interrogés sur la construction des savoirs, sur ce qu'il fallait faire pour que tous les élèves, qu'ils soient dans l'enseignement général, technologique ou professionnel, accèdent aux savoirs."

Cette Ecole publique laïque ne doit donc pas "se défier de ses élèves". Elle n'est pas "l'instrument d’une politique normative de la laïcité scolaire", elle doit "accueillir correctement tous les élèves" et les amener "à la raison, au savoir, à l’esprit critique".

Les signataires ne demandent pas la fin de l'école privée et, insistent-ils, ne portent pas "atteinte à la liberté de l'enseignement", ils demandent que les financements publics aillent à l'école publique. Conscients que cela ne peut se faire du jour au lendemain, ils évoquent un "plan de sortie" dont un premier pas pourrait venir de la proposition de loi du sénateur Pierre Ouzoulias "visant à autoriser la puissance publique à conditionner les subventions accordées aux établissements privés sous contrat à des critères de mixité sociale et scolaire" (voir ici). Il faut également que l'Etat "investisse massivement dans l'école publique", surtout lorsque celle-ci n'a pas, comme en Seine-Saint-Denis, les moyens de répondre aux besoins, ce qui explique que certaines familles optent pour le privé.

Les signataires ont également bien conscience qu'une tribune ne suffira pas à créer le rapport de force qu'ils appellent de leurs voeux, et ils évoquent "un marathon", des mobilisations locales, des réunions publiques, l'interpellation des élus, sachant que le rapport de la mission parlementaire sur le financement de l'enseignement sous contrat doit venir appuyer leur demande d'un grand débat national.

Plusieurs éléments viennent conforter leur démarche. Le sociologue Julien Grenet a montré que, si l'on prolongeait les courbes, il y aurait bientôt à Paris davantage d'élèves scolarisés dans le privé que dans le public. L'obligation scolaire à 3 ans oblige les communes à verser aux écoles maternelles privées un forfait d'externat pour un total que le RFVE (les villes éducatrices) estime à 100 ou 150 M€ (compensés à hauteur de 46 M€ pris sur le budget de l'Education nationale, ndlr). "Même pas cynique", Amélie Oudéa-Castéra a montré le visage de la grande bourgeoise qui fait "ce que tout le monde fait" dans son milieu, et ce qui représente un coût de 12Md€ "pour permettre aux personnes qui en ont les moyens d’éviter l’école publique". Le "Choc des savoirs" porte un discours clair à l'adresse des milieux populaires : "vos enfants freinent les nôtres", traduisent certains tandis que l'épisode Stanislas a eu le mérite de montrer à quel point le contrôle de l’Etat est "extrêmement lâche", cela au moment où la suspension du contrat du lycée Averroès témoigne d'un "deux poids deux mesures".

Au-delà, c'est le "séparatisme" que prépare l'école privée : "La concurrence inégale et faussée de l'enseignement privé sous contrat participe à la ghettoïsation, notamment des quartiers populaires." La tribune a également une dimension pédagogique : La laïcité scolaire doit permettre à tous les élèves "d'entrer dans une dimension réflexive et critique dans laquelle, dans le cadre de la loi, leurs questionnements et leurs avis sont légitimes (...). Le relativisme scientifique galopant, la désinformation rappellent les enjeux démocratiques inhérents au renforcement de l'école laïque (...). (Celle-ci) crée les conditions de l'émancipation en protégeant de tout prosélytisme et en faisant cesser en son sein toutes les assignations (...). Ce n'est pas le projet de celles et ceux qui prétendent défendre la laïcité à l'école, soit pour stigmatiser les musulmans, soit pour y perpétuer leurs tutelles morales, religieuses, sociales, économiques (...). L'Ecole laïque doit faire percevoir l'utilité pour toutes et tous du principe de laïcité."

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