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PPCR et carrières des enseignants, une réforme encore mal comprise (Inspection générale)

Paru dans Scolaire le vendredi 15 décembre 2023.

La réforme "Parcours professionnels, carrières et rémunérations", malgré "de nombreuses imperfections", va "dans le bon sens", estime l'Inspection générale dont le ministère de l'Education nationale publie le rapport. La mission rappelle que "la mise en œuvre du protocole PPCR a été l’occasion de refonder le dispositif d’évaluation des enseignants", et de remplacer "un dispositif antérieur d’évaluation considéré par beaucoup d’acteurs comme obsolète" en établissant trois RDVC, trois "rendez-vous de carrière".

Il s'agit "d’apprécier la valeur professionnelle de l’enseignant" à trois moments clés de sa carrière, tandis qu'il est au 6ème, au 8ème et au 9ème échelon de la classe normale. Le protocole du RDVC "prévoit que les agents, avisés dès le mois de juillet qui précède, bénéficieront d’un RDVC dans le courant de l’année scolaire suivante". Ils sont prévenus au moins quinze jours à l’avance et remplissent un "document de référence" qu'ils préparent "parfois pour eux-mêmes, mais très souvent pour le fournir à l’inspecteur" et qui sert à organiser l'entretien, d'une heure en général qui suit une période d'observation dans la classe, souvent d'une heure également. "Lors des entretiens, quand ils se préoccupaient auparavant surtout d’apporter des critiques constructives à la leçon observée, les inspecteurs doivent désormais porter un regard plus large sur l’enseignant. Le plus souvent, la leçon du jour n’est plus examinée en détail et sert seulement de point de départ à une discussion plus large portant sur la pédagogie de l’enseignant et sur sa place en dehors de la classe, au sein de l’établissement."

Mais la mission constate que les inspecteurs font "un usage variable du document de référence (...). Dans le meilleur des cas, le document est un support central de l’entretien, plébiscité d’ailleurs par des évaluateurs qui découvrent des éléments du parcours de l’enseignant qu’ils ne soupçonnaient pas. Dans le pire des cas, quand il existe, le document n’a pas été lu et n’est pas évoqué lors de l’entretien ou des entretiens du RDVC. Ce dernier cas de figure est source d’une très grande frustration au regard des efforts et du temps que l’enseignant a pu consacrer à son élaboration."

La mission se penche aussi sur la situation des "enseignants de l’enseignement privé sous contrat (qui) recevaient moins de visites d’inspection que leurs collègues de l’enseignement public. Ils sont désormais intégrés au processus général de visites selon leur échelon" et ils ont des RDVC "au même rythme que les autres".

Des lacunes et des imperfections

Si elle considère que ce point est positif, elle "a constaté un certain nombre d’imperfections et de lacunes" dans le dispositif. Elle estime notamment que "le calendrier des trois RDVC n’est pas adapté au déroulement de la carrière, le premier intervenant tardivement, au terme d’une dizaine d’années d’exercice professionnel", le deuxième et le troisième sont beaucoup trop rapprochés et massés en milieu de la carrière, sans aucun entretien formalisé et obligatoire pour les plus de vingt ans d’activité qui suivent".

Le dispositif est de plus chronophage. "Dans le 1er degré, alors que dans l’ancien dispositif l’IEN (l'inspecteur, ndlr) pouvait mener entre 80 et 100 inspections par an", il assure en moyenne 21 RDVC par an. "Dans le second degré les écarts sont très importants selon les disciplines", certains inspecteurs n'en réalisant qu'une dizaine "quand d’autres en réalisent plus de 60". De plus, la mission a constaté que, depuis la mise en place du PPCR, "l’accompagnement professionnel des enseignants s’est restreint de façon regrettable et est devenu une variable d’ajustement dans les missions des inspecteurs".

Ces RDVC doivent permettre de donner un coup de pouce aux carrières des meilleurs enseignants, en accélérant leur passage à l'échelon suivant, selon que leurs niveau d'expertise est "à consolider", "satisfaisant", "très satisfaisant", "excellent". Près des 2/3 sont "excellents". La mission commente avec une jolie litote : cela "complique le choix à faire pour les promotions". La réforme prévoit que tous les enseignants accèdent à la hors-classe, et le dernier entretien permet d'organiser cette promotion. Ministère et académies "ont retenu l’idée que l’accélération de carrière devait profiter aux professeurs ayant un avis final excellent", qu'elle devait être limitée à 30 % du corps, et que donc, seuls 30 % des enseignants devaient être considérés comme "excellents", les autres étant "très satisfaisants" même quand l'inspecteur leur avait dit tout le bien qu'il pensait d'eux : "ces ajustements ont eu un effet dévastateur sur la confiance des professeurs en l’Institution." La DGRH du ministère a donné l'année dernière consigne "de ne pas corréler les appréciations finales notifiées aux personnels à la campagne d’avancement accéléré (...). Dans la pratique, plusieurs académies n’ont pas encore appliqué ces consignes."

C'est encore plus compliqué pour l'accès à la "classe exceptionnelle" créée par cette même réforme, et dont l'accès est contingenté, limité aux enseignants du "vivier 1", ceux qui ont exercé plusieurs années dans des conditions difficiles et, dans une moindre mesure à tous les autres. "Ce déséquilibre empêche parfois de promouvoir autant d’enseignants que le permettrait le contingent (...). Les récentes annonces ministérielles visant à supprimer les viviers, et donc les fonctions éligibles, pour se concentrer sur le parcours de carrière des enseignants les plus méritants est de bon augure pour mettre fin à cette dissymétrie, facteur d’incompréhension."

Grande méconnaissance

D'ailleurs les enseignants et les chefs d’établissement "font état de leur grande méconnaissance des règles d’éligibilité (...). Malgré les notes produites annuellement par les services académiques à l’occasion de la campagne annuelle de promotion, ce dispositif souffre d’un déficit de connaissance par ceux qui sont censés en bénéficier." Les enseignants ont d'ailleurs "une perception très lacunaire de ce qui relève de leur carrière (...). Le processus du rendez-vous de carrière se révèle lui-même mal compris dans ses objectifs et mal connu dans son calendrier (...). Bien que portée par une volonté de transparence, il s’avère au final que cette réforme est mal comprise par les professeurs, à la fois parce qu’elle poursuit des objectifs multiples, mais aussi sans doute à cause d’une communication mal adaptée (...). Si les RDVC ont de fait créé un éloignement entre inspecteurs et enseignants, ils devraient permettre de disposer de données sur les visites de classe à une échelle désormais très importante (...). Les besoins en formation et informations RH, les conditions et pratiques professionnelles, les intentions de mobilité fonctionnelle et géographique, et, plus globalement, les perspectives d’évolution professionnelle devraient être exploités pour mettre en œuvre la politique sociale et de RH au niveau de l’établissement, des réseaux d’établissements, de la circonscription, du département et de l’académie."

Le rapport "Le protocole PPCR pour les enseignants : place et rôle des rendez-vous de carrière dans l’évolution et la progression de la carrière" ici

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