Quels sont les enjeux que porte le numérique au regard de l'école inclusive ? (Salon Educ@tech expo)
Paru dans Scolaire le jeudi 16 novembre 2023.
“En éducation comme ailleurs le numérique c'est pas magique“, estime l'anthropologue Pascal Plantard à propos des usages des objets techniques, et de leur apport pour lutter contre les inégalités et favoriser l'inclusion des élèves.
Lors de la conférence organisée jeudi 16 novembre à l'occasion du salon Educatch à Paris, il semble qu'une des premières difficultés renvoie au terme même d'inclusion, qui touche à la fois les élèves en situation de handicap que ceux qui sont éloignés physiquement de l'école ou défavorisés.
Au départ, la question renvoie aux normes sociales d'usage, estime le spécialiste des usages du numérique, et à leur articulation avec les normes scolaires, dont peuvent être éloignés certains élèves. C'est ainsi que, constate-t-il, la dématérialisation se trouve être un vrai problème dans les familles populaires, cependant internet est aussi vu comme un champ d'opportunité, une “seconde école“ notamment par le biais des tutoriels sur Youtube, mais qui n'a peut être pas été suffisamment utilisée cela, à part pendant le confinement.
Il invite dès lors à penser le numérique éducatif dans des environnements, son efficacité apparaissant dans des situations particulières et dans des échelles réduites, du fait que “tous les territoires ne se valent pas en termes d'offre“. C'est pourquoi selon lui, la massification, ou reproduction à l'identique de bonnes pratiques “ne fonctionne pas“ même s'il constate qu'en France on s'entête à vouloir procéder de la sorte.
A l'inverse, la déléguée interministérielle à l'accessibilité et l'inclusion Isabelle Saurat considère que le numérique permet la personnalisation avec l'idée ancienne de mettre l'usager au centre, ce qui implique de réfléchir dès leur conception, d'avoir des outils qui puissent s'adapter aux différents publics dont les difficultés ne sont pas univoques. Or, elle souligne “l'absence de formation des développeurs qui ne savent pas faire des logiciels accessibles et facilement adaptables aux besoins des utilisateurs“.
L'enjeu pour les éditeurs de ressources numériques, est éthique, c'est pourquoi il faut respecter les règles techniques dites RGAA, explique ainsi Romuald Guéguand, de l'Afinef (association qui fédère des entreprises du numérique pour l'éducation), au regard de son impact sur la scolarité des élèves.
Au-delà, il s'agit de réfléchir “sur comment le numérique va pouvoir renforcer l'enseignant dans sa pratique pédagogique, dans sa capacité à être en relation avec d'autres experts“, ajoute-t-il, d'où la nécessité de penser la continuité des temps scolaires et extra-scolaires. Mais le numérique peut aussi “renforcer leur autonomie, mettre en évidence leur potentiel“, ce qui passe par les innovations et la prise en compte des acteurs que sont par exemple les collectivités territoriales.
L'ONG Bibliothèques sans frontières agit de son côté pour penser les inégalités d'accès, avec des projets consistant à fournir un accès à internet et à mettre à disposition des ressources gratuites pour les enfants défavorisés alors que l'accès à l'éducation est plus compliqué pour un grand nombre de populations dans le monde. Il est important de former à la littératie numérique les parents, les bibliothécaires, mais également que les nouveaux dispositifs, qui incluent de l'IA, puissent être pensés avec les communautés éducatives, et notamment les enseignants.