Formation et recrutement des enseignants, une question d'attractivité ou de lisibilité des parcours ? (réseau des INSPE)
Paru dans Scolaire le jeudi 28 septembre 2023.
Sur le site de Nevers de l'INSPE de Bourgogne, le master MEEF peinait à attirer les étudiants. Dès lors qu'a été créé une licence qui y menait, celle-ci a fait le plein et le master également. Le réseau des INSPE ne nie pas qu'il y ait un problème d'attractivité, notamment dans certaines académies, Créteil, Versailles, la Guyane, Mayotte, peut-être Besançon, et pour le 2nd degré dans certaines disciplines, mais il met surtout en cause l'illisibilité des parcours. "Nous rencontrons des lycéens qui ont vraiment envie de devenir enseignants, mais quand on leur explique qu'il faut d'abord qu'ils fassent une licence qui n'a rien à avoir avec l'enseignement, et que ce n'est qu'après qu'ils pourront demander à s'inscrire dans un master MEEF, ils sont découragés."
Le réseau note d'ailleurs des progrès cette année. Si l'on considère le pourcentage de postes pourvus, le CAPES de mathématiques reste déficitaire mais connaît un progrès de 22 points de pourcentage, l'allemand de 14 points. En revanche les lettres classiques perdent 10 points.
Pour ne pas empêcher des vocations, il faut donc que, dès avant le baccalauréat, les jeunes disposent d'une information claire, qu'ils puissent ensuite faire une licence dédiée, EE ou "enseignement et éducation", qui reste à inventer, avec des stages d'observation dès la première année. Le Réseau ne se prononce pas sur la place du concours et il envisage toutes les solutions, mais il présente un schéma de formation avec le concours en fin de licence, qui semble donc avoir, implicitement, sa préférence. Durant la première année de leur master, les lauréats du concours placé en L3 seraient étudiants et pourraient être "contractuels alternants", la seconde année, ils seraient fonctionnaires stagiaires, ils seraient titularisés après avoir soutenu leur mémoire et après un entretien organisé par l'employeur, l'Education nationale.
Le schéma présenté tient compte de ce que les étudiants plébiscitent "l'alternance intégrative". Seuls 10 800 postes "d'alternants contractuels" sont offerts, les deux tiers des autres étudiants doivent donc se contenter de "SOPA" (stages d'observation et de pratique accompagnée). L'alternance pèse pourtant lourd durant cette seconde année de master durant laquelle ils préparent le concours, mais les futurs enseignants ont ainsi le sentiment qu'ils seront prêts l'année suivante à affronter un plein temps et des classes en responsabilité.
Les INSPE n'ont la main que sur les deux années de Master, mais peuvent rétro-agir sur le parcours de licence, comme à Nevers ou à Reims, où l'affichage des attendus du Master MEEF a amené l'Université à les intégrer dans la maquette de licence.
Ces réflexions amènent le réseau à s'interroger sur les annonces du président de la République qui semble vouloir distinguer formation des enseignants du 1er et du 2nd degrés, qui ont certes des différences, mais pour lesquelles la réflexion doit être "conjointe". Leur séparation constituerait "une régression assez terrible". Le réseau ne comprend d'ailleurs pas ce que signifie "le modèle écoles normales" : S'il s'agit de payer les étudiants dès la L1, il est d'accord, mais il craint qu'on ne prépare l'école du futur avec les méthodes du siècle passé. Quant au PPPE (parcours préparatoire au professorat des écoles), il a pour principal défaut d'être partiellement assuré par des professeurs de lycée qui ne connaissent pas le 1er degré, mais aussi d'atteindre un niveau qui n'est pas celui d'une "vraie licence".
Le réseau profite de cette conférence de rentrée pour évoquer les évènements qu'il prépare, une "journée laïcité" à Rennes le 11 octobre, le printemps de la recherche au mois de mai, où l'accent sera mis sur le lien entre bien-être à l'école et apprentissages, l'université d'été, à Dijon qui sera l'occasion d'étendre la problématique du sport, JO et JOP obligent, aux compétences psycho sociales. Les INSPE font aussi valoir que leur modèle constitue un motif d'inspiration au Sénégal, en Argentine, au Liban, au Canada... Il associe en effet l'Université et l'Education nationale, ce qui permet qu'une formation professionnelle, initiale et continue soit adossée à la recherche. La corrélation entre la qualité de la formation continue et la réussite des élèves est d'ailleurs avérée.