L'Ile-de-France voudrait créer des écoles sous contrat, récupérer la totalité de l'orientation, fusionner LP et CFA...
Paru dans Scolaire le vendredi 22 septembre 2023.
Le Conseil régional d'Île-de-France a voté, mercredi 20 septembre, une délibération valant "saisine de l'Etat" pour "récupérer un certain nombre de missions de service public aujourd’hui assumées par l’État". La Région précise que sa démarche ne concerne qu'elle-même "et non pas les autres Régions" (même si certaines de ses demandes ont, de fait, un impact national, comme la suppression de l'ONISEP, ndlr). Plusieurs d'entre elles concernent l'éducation, notamment les lycées professionnels, les écoles primaires, l'orientation, le recrutement des enseignants.
L'Ile-de-France voudrait "transformer les lycées professionnels en établissements publics locaux d’enseignement régional sous pilotage de la Région" et les fusionner avec les CFA. La Région dénonce "l’inadéquation entre la carte des filières et des spécialités et la structuration du marché de l’emploi". Elle fait valoir que "ce sont les rectorats qui gardent la main et décident souverainement des ouvertures et des fermetures des différentes formations". Elle propose donc "un nouveau modèle de gouvernance qui permette au fil de l’eau et durablement de connecter en permanence la carte de formations avec les secteurs d’activité les plus prometteurs".
La réforme des lycées professionnels comprendrait "la régionalisation du recrutement, de la gestion et de la formation des personnels de l’éducation selon des modalités équivalentes aux transferts des personnels TOS et DDE de 2004 ; un pilotage complet de l’évolution de la carte des formations professionnelles initiales (...) ; une décentralisation des règles de gouvernance des lycées professionnels" en permettant notamment "une liberté de recrutement du chef d’établissement via la création de contrats de mission. La Région pourrait confier aux proviseurs davantage de marges de manœuvre sur l’allocation et l’utilisation des moyens budgétaires, l’organisation pédagogique et les dispositifs d’accompagnement des élèves."
La Région voudrait aussi se voir confier "une compétence de recrutement de professeurs associés dans les lycées" de façon à ouvrir "le corps enseignant à la société civile (...). Qu’un professeur d’économie soit un chef d’entreprise, qu’un professeur d’anglais soit un expatrié britannique ou qu’un prof de physique soit un ingénieur peut être une source de richesse", estime-t-elle. Elle fait remarquer que le statut existe, mais que "cette possibilité juridique reste quasiment fictive puisqu’il y a moins de cent professeurs associés en activité en France". La Région Île-de-France "aurait pour mission d’identifier des professeurs associés ayant vocation à être recrutés par les chefs d’établissements et formés d’un point de vue pédagogique en amont".
Elle demande encore à "expérimenter une décentralisation complète des règles de composition des Conseils d’administration des lycées" dont elle définirait le "mode de gouvernance, éventuellement différencié en fonction des lycées". Ceux-ci seraient mis en concurrence, situation qui "permettrait de faire émerger des solutions innovantes à même de renforcer la démocratie sociale et le paritarisme." La Région ne se prononce pas sur "les contours de ce que pourrait être la future gouvernance des lycées en Île-de-France" puisque "ce sera à l’Assemblée régionale de construire collectivement un nouveau modèle".
Enfin, en ce qui concerne l'orientation, la Région estime qu'elle ne dispose pas "pleinement des moyens de définir et donc d’exercer cette compétence", l’État restant "responsable de l’orientation, de la validation des choix et de l’affectation". L'Île-de-France voudrait donc se voir confier "la pleine responsabilité de l’orientation en transférant à son agence ORIANE les moyens déployés par l’Education nationale". Elle demande "le rattachement des conseillers d’orientation des collèges et des lycées ainsi que l’association étroite de la Région Île-de-France à la définition de la politique nationale de l’orientation". Elle demande également la suppression de l'ONISEP ainsi que de ses délégations régionales (DRONISEP) "pour les remplacer par des offices régionaux d’information sur les enseignements et les professions" rattachés à l'agence ORIANE, de même que les CIO : "l’ensemble de la compétence relative à l’orientation (...) relèverait du conseil régional d’Île-de-France par son agence Oriane, tandis que l’affectation, qui organise la répartition des élèves dans les filières en fonction des décisions d’orientation et des capacités d’accueil, resterait une compétence de l’État."
La Région demande à être autorisée "à créer des écoles primaires autonomes sous contrat". Elle part du principe que "plus les établissements disposent de marges de manœuvre importantes pour déterminer les contenus de l’offre de l’enseignement, choisir leurs manuels, recruter leurs enseignants et fixer les salaires, plus la performance des élèves s’améliore, à condition toutefois qu’il existe des examens terminaux externes et standardisés permettant de confronter et contrôler les méthodes des différents établissements". Elle ajoute que "ce modèle d’écoles publiques autonomes s’inscrit d’ailleurs dans une logique similaire à celui des 'charter schools' anglo-saxonnes ou des 'écoles libres' scandinaves."
"Ces écoles régionales publiques seraient sous contrat avec l’État (...). Ce contrat associerait à la fois la Région, l’État mais surtout les parents d’élèves : les familles seront au cœur de la gouvernance de ces écoles primaires autonomes (...). Cette autonomie pourrait porter à la fois sur le recrutement des élèves, l’affectation des personnels, l’allocation et l’utilisation des moyens budgétaires, l’organisation pédagogique ainsi que les dispositifs d’accompagnement des élèves. Ces écoles auraient une très grande liberté dans l’organisation des horaires, des programmes, des enseignements, des activités extrascolaires." La Région "pourrait révoquer leur statut d’établissement public autonome d’éducation en cas de résultats insuffisants, notamment en fonction des résultats objectifs à l’issue d’un examen d’entrée en 6ème."
Le rapport ici