Après la conférence de presse de G. Attal, le SNES-FSU dénonce une politique à courte-vue
Paru dans Scolaire le lundi 28 août 2023.
“Il faut regarder la réalité“ estime Sophie Vénétitay ce lundi 28 août, pointant de grandes différences entre les paroles et les actes d'Emmanuel Macron et de Gabriel Attal au sujet de l'école.
La conférence de presse de rentrée du SNES-FSU, intitulée une “rentrée en vrai“ était l'occasion d'évoquer la promesse d'avoir un professeur devant chaque classe à la rentrée, or “les rectorats sont encore en train à ce jour de bricoler pour assurer les effectifs“, estime sa secrétaire générale, et “quand bien même cela se ferait, à quel prix humain, psychologique, pédagogique ?“ demande-t-elle, au regard des abandons constatés l'année dernière, au bout de quelques jours seulement.
Il y a aussi la promesse du remplacement systématique des professeurs dès la rentrée, une “tromperie“ qui “ne sera pas tenue“, l'examen des textes (publiés cet été au Journal officiel, ndlr) ayant montrés qu'il ne pourrait y avoir du poste pour poste et que dès lors, les heures manquantes seront toujours perdues. Il en est de même pour les séquences numériques pédagogiques dont le contenu inquiète, de surcroit en raison de salles informatiques insuffisamment équipées. De là à penser que “le gouvernement réinvente la permanence en 2023“.
Quant à la revalorisation salariale fixe des professeurs (hausse des rémunérations dite socle) annoncée par le ministre et le président, le “dossier n'est pas clos“ déclare le syndicat vis à vis des 5,5 % moyens d'augmentation contre les 10 % originellement promis. Emmanuel Séchet, secrétaire général adjoint du SNES-FSU, explique à ce titre que tous les professeurs ne seront pas au-dessus de 2 100 euros, les stagiaires gagnant 1 840 euros bien qu'exerçant à temps plein devant leurs classes. Ainsi, “si le ministère pense que ce sujet est derrière lui, il se trompe“, poursuit-il, le syndicat revendiquant une hausse de 20 % du point d'indice, son indexation sur les prix, et le relèvement de 70 points de toutes les grilles.
Si le gouvernement fait valoir une solution alternative, qui passe par la rémunération liée au pacte enseignants, “les échos“ recueillis par l'organisation syndicale majoritaire dans le second degré montreraient que les professeurs n'y adhèrent pas, contrairement aux 30 % annoncés il y a quelques mois. “On fait l'analyse qu'on a gagné la 1ère manche“, considère ainsi Sophie Vénétitay, qui indique avoir expliqué aux enseignants que le pacte n'était pas une revalorisation, qu'il se voulait une attaque envers le statut de fonctionnaire, tout en augmentant les inégalités entre hommes et femmes.
Le SNES-FSU se félicite par ailleurs d'avoir “fait bouger les lignes sur la question du bac“ dont les épreuves de spécialités seront repoussées en juin. C'est pourquoi “le pouvoir devrait nous écouter“ déclare Sophie Vénétitay qui défend un “travail de conviction auprès des élèves et de l'opinion publique“, même si elle regrette le temps perdu depuis la mise en oeuvre de la réforme par Jean-Michel Blanquer il y a 5 ans.
Le syndicat FSU des enseignants du 2nd degré voit en ces résultats la possibilité d'une “dynamique de mobilisation“ leur permettant d'obtenir d'autres modifications dans la politique éducative, notamment sur les enseignements dispensés.
Est en effet dénoncée la volonté de resserrer l'école autour des savoirs fondamentaux. Avec la suppression de l'heure de technologie en 6ème, devoirs faits ou encore la découverte des métiers, il s'agit pour Gwénaël le Paih, secrétaire général adjoint du SNES-FSU, de la mise en place d'un “système à deux vitesses“ au collège alors qu'il y aurait, de plus en plus de prescriptions “qui éloignent les professionnels de leurs cœurs de métiers“. Au lycée, il faudrait travailler sur les programmes, “réorganiser les enseignements“ pour qu'ils soient cohérents entre eux, avec l'enseignement supérieur et surtout avec Parcoursup, le “prochain verrou à faire sauter“ qui “guide l'orientation au lycée“.
Aux yeux de Sophie Vénétitay, les abayas qui ont fait l'actualité depuis leur interdiction par le ministre hier ne sont donc “pas le principal problème de la rentrée“, et la porte parole du SNES-FSU attend “qu'il s'occupe des vrais problèmes“, comme la lutte contre le harcèlement qui nécessite “d'aller au-delà des effets d'annonce, de mettre les moyens mais aussi de donner du temps pour travailler la question“.
En outre, le syndicat FSU conteste le constat d'une “décivilisation“ d'une partie de la jeunesse dressé par Emmanuel Macron, dont la volonté serait “d'utiliser l'école pour répondre aux émeutes“. Mais il refuse d'être balloté entre le président et le ministre, et si ce dernier a “marqué une volonté de jouer la carte du dialogue social, on verra comment ça se traduit dans les faits“. Et si des réformes comme les remplacements courte durée (RCD) ou devoirs faits ne font pas recette, et même si les professeurs sont attachés à la réussite de leurs élèves, pas question de les instrumentaliser voire de les culpabiliser : “C'est peut-être un bon calcul à très court terme, mais ça revient à gouverner contre les enseignants. Ce n'est pas une bonne stratégie pour durer politiquement.“