Rapport de la médiatrice : “Il y a de plus en plus de personnels qui nous saisissent“ (Catherine Becchetti-Bizot)
Paru dans Scolaire le mercredi 19 juillet 2023.
“On n'a quasiment plus de saisines sur Parcoursup“ déclarait mercredi 19 juillet Catherine Becchetti-Bizot dans sa présentation du Rapport de la médiatrice 2022.
La procédure, qui comporte davantage d'informations, et pour laquelle on trouve davantage de réponses aux demandes des familles, “fonctionne bien“, estime ainsi la médiatrice, ajoutant cependant que le problème s'est déplacé plus en amont, avec des familles anxieuses qui ne comprennent pas forcément les critères d'évaluation sur la plateforme ou les choix de spécialités à favoriser pour être sélectionné dans telle ou telle formation.
Ces saisines qui ont trait à la vie quotidienne dans les établissements scolaires, ont d'ailleurs “explosé“ l'an dernier. Premier domaine chez les usagers (35 % des saisines, multipliées par deux en cinq ans), elles concernent les notes et les résultats pendant l'année (avec beaucoup de contestations autour du contrôle continu) mais aussi les mesures disciplinaires prises à l'encontre d'élèves.
C'est pourquoi l'exclusion, recommande la médiatrice, ne doit pas être “la sanction la plus facile et la plus rapide“ et elle évoque la question de la rupture de la continuité pédagogique, où “le lien est rompu“. Elle souligne une trop grande séparation entre les problèmes de vie scolaire et de suivi pédagogique, alors que le temps pour retrouver un établissement peut-être très long et que ces élèves sont parfois livrés à eux-mêmes.
Si plus de la moitié de ces saisines relèvent du second degré, 34 % se situent au 1er degré, traduction d'un “durcissement des relations parents-école“ et d'une “difficulté de dialogue“, constate Catherine Becchetti-Bizot.
De même, le nombre de sollicitations au sujet du harcèlement a augmenté de 69 % sur une année, et si rien n'est réglé la médiatrice se félicite qu'on en parle davantage, les requérants ayant besoin de conseils, avec un souci de confidentialité et l'envie de s'adresser à une personne neutre. C'est pourquoi elle préconise de “mieux faire connaître les personnes référentes“ et souhaite que la communauté éducative s'empare du problème “de manière égale sur l'ensemble du territoire“.
Les autres thèmes mis en avant cette année dans le rapport renvoient à des demandes de médiation autour de l'enseignement privé (majoritairement dans le supérieur à travers la confusion sur l'agrément et la labellisation de certaines formations) ainsi que des demandes d'affectations et de mobilité des personnels.
Sur les 18 500 saisines qui ont été traitées l'an dernier, un chiffre “en hausse constante depuis des années“ (+ 65 % en 10 ans), près d'un quart ont concerné les personnels de l'éducation en 2022, contre 77 % pour les usagers. Mais avec 4 000 demandes en 2022 (+ 31 % en 5 ans), “il y a de plus en plus de personnels qui nous saisissent“ s'alarme la médiatrice, qui constate que plus de la moitié des demandes viennent d'enseignants titulaires mais qu'une très grande part proviennent de personnels non-titulaires et non-enseignants (AESH, intervenants éducatifs..) : 469 saisines en 2022 émanent de personnels contractuels.
Et les demandes augmentent dans tous les secteurs. Il s'agit à 27 % de questions financières (rémunérations, indemnités, etc..), des déroulements de carrière (à 18 %) ou encore des sujets d'affectation et de mutation (à 17 %). Ce dernier item symbolise la “difficulté d'un système qui a ses limites“, avec des réclamations qui “montrent que les attentes sont différentes“, et de nouvelles priorités personnelles qui peuvent dissuader certains étudiants de passer des concours d'enseignants. Les saisines “recrutement et concours“ ont d'ailleurs très fortement progressé en un an (+ 51 %). Quant aux conflits interpersonnels, du type isolement, souffrance au travail, harcèlement, ils ont aussi bondi de 67 % en 5 ans.
Au final, l'année 2022 est décrite comme “chargée“ et comportant “beaucoup de tensions“. Avec ses équipes, la médiatrice explique vouloir “valoriser et promouvoir une démarche faisant en sorte que les désaccords n'aboutissent pas à un conflit voire de la violence“, ce qui passe par “recréer le lien entre ceux qui n'arrivent plus à se parler“. Elle fait valoir la “co-construction d'une solution ensemble“ par la possibilité de s'expliquer, de s'écouter, et éventuellement de s'entendre avec l'aide d'un tiers impartial.
Pour y arriver, elle propose notamment de développer, dès les petites classes, l'enseignement des compétences psychosociales, tout comme l'apprentissage du respect et de la coopération.
Le rapport ici