Au fil du temps, la ségrégation sociale s'accentue entre collèges publics et privés (DEPP)
Paru dans Scolaire le jeudi 13 juillet 2023.
“Enjeu de cohésion nationale“ mais également “facteur renforçant les inégalités scolaires“, la ségrégation sociale décrit en quoi les établissements scolaires accueillent des populations très différentes selon le milieu social, explique la DEPP dans une analyse du phénomène publiée mercredi 12 juillet.
Cette ségrégation sociale est en partie liée à la présence des secteurs d'enseignement public et privé. Ainsi à la rentrée 2022, 41,7 % des élèves du secteur privé sous contrat sont de milieu social très favorisé, alors qu'il ne sont que 20,5 % dans le public. A l'inverse, 16 % des élèves du secteur privé sous contrat sont de milieu défavorisé contre 40 % des élèves du secteur public.
En 1989, la proportion d’élèves de milieu social très favorisé était déjà supérieure de 11 points dans les collèges privés au regard des collèges publics. Après 10 ans de stabilité, cet écart a augmenté fortement à partir du début des années 2000, pour atteindre 20 points en 2022. L'écart selon la proportion d’élèves d’origine sociale défavorisée s’est également creusé : il était de 17 points sur les entrants en sixième en 2003, il est passé à 22 points en 2022
Pourtant à l’échelle nationale, la ségrégation sociale entre collèges a relativement peu varié depuis 2014, constate cependant le service statistique de l'éducation nationale, prenant pour cela l'indice d'entropie des établissements, un indicateur de ségrégation qui pointe les écarts sociaux entre collèges et la diversité des milieux sociaux représentés au sein de ces derniers.
Cette non-évolution masque cependant une baisse de la ségrégation sociale parmi les collèges publics depuis 2018, après une période de stagnation, ainsi qu'une croissance des écarts de composition sociale entre secteurs public et privé, le secteur privé scolarisant de plus en plus d’élèves de milieu favorisé.
De plus, le contexte social et scolaire des départements influe ces niveaux de ségrégations. La DEPP indique ainsi que les trois composantes de la ségrégation (disparité entre collèges publics, entre collèges privés, et enfin écart de composition sociale entre secteurs public et privé) tendent à être plus élevées lorsque le degré d’urbanisation est plus fort. Par exemple, en métropole, l’indice de ségrégation sociale atteint ses valeurs maximales dans les Hauts-de-Seine, à Paris et dans les Bouches-du-Rhône. Cela s'explique par une plus forte ségrégation résidentielle, ce qui se traduit dans la composition sociale des collèges publics et privés, mais aussi par la proximité et le nombre des collèges “qui exacerbent la concurrence entre établissements et peuvent inciter les familles à éviter le collège de secteur, principalement en recourant à un collège privé“.
Il est également question des écarts de composition sociale entre secteurs public et privé, qui sont forts dans les départements du bassin parisien, dans le sud méditerranéen et les départements et régions d’outre-mer. Ils se caractérisent soit par un fort degré d’inégalités économiques, soit par un taux de pauvreté important : “les familles les plus défavorisées peuvent ne pas avoir accès au privé pour des raisons financières“.
Dès lors, la présence de territoires et collèges très défavorisés “incite probablement, plus que dans d’autres départements, les familles plus favorisées à choisir les collèges privés comme alternative au collège de secteur“, tandis qu'a contrario, dans d’autres départements le secteur privé “est proche du public dans la composition sociale des élèves qu’il accueille“, notamment des départements plutôt ruraux où le privé est rare, mais aussi le quart nord-ouest et le sud du Massif central où le privé est fortement implanté.
Au final, entre 2014 et 2022, les évolutions de la ségrégation sociale ne suivent pas les mêmes tendances d’un département à un autre. Pour une moitié d'entre eux, la ségrégation sociale a peu varié, comme au plan national. Elle a diminué de façon plus sensible dans une vingtaine de départements, (nord et l’ouest de la métropole). Inversement, dans une trentaine de départements, la ségrégation sociale a augmenté, avec une hausse marquée des écarts de composition sociale entre secteurs public et privé (moitié sud de la France).
La note ici