Formation professionnelle initiale : les sénateurs prêts à pousser les réformes Macron encore plus loin
Paru dans Scolaire, Orientation le mardi 04 juillet 2023.
“La rénovation de la formation initiale et l’effort d’attractivité seront des enjeux majeurs pour engager la jeunesse française“, estime la délégation aux entreprises du Sénat dans un rapport d'information sur les mutations de l'emploi qui sera remis mercredi 5 juillet en présence d'Olivier Dussopt et de Carole Grandjean.
Rapporteurs de la mission, les sénateurs Martine Berthet (LR), Florence Blatrix Contat (SER) et Michel Canévet (UC) font état de fortes tensions de recrutement sur le marché du travail, avec 67 % des entreprises françaises qui rencontreraient des difficultés à pourvoir les postes disponibles. La raison, une pénurie de compétences “aigüe“ et “désormais généralisée“, qui demande d'agir sur celles-ci tout comme sur la formation et l’attractivité des métiers.
“Ré-enchanter“ le travail..
Face à l'objectif de “reconstruire la souveraineté de la France, développer l’internationalisation des entreprises, s’engager pleinement dans les transitions environnementales et numériques“, il est donc question de l'accès aux compétences pour les pouvoirs publics, alors que 13 % des jeunes ne sont ni en études, ni en formation, ni en emploi (NEET) en France.
Les rapporteurs font de même état de “la dégradation de la maîtrise du socle de compétences“, expliquant que seuls 59 % des élèves de lycée suivaient en 2022 un enseignement de mathématiques, ou que les femmes ont un moindre accès aux filières scientifiques, avec un taux de féminisation des écoles d’ingénieur à 33 % contre 85 % pour les formations paramédicales et sociales. Sont également évoqués “un maillage territorial et sectoriel fragilisé“ ainsi qu'une “offre de formation évoluant trop peu et trop difficilement“.
Or, les différentes mesures annoncées depuis 2018 “n’ont eu qu’un impact mitigé au mieux : elles n’ont pas réussi à inverser la tendance“, c'est pourquoi il est désormais urgent de réagir en informant, en communiquant et en soutenant les métiers en tension, affirment-ils.
A l'école, cela passe notamment par la connaissance des métiers, qui doit devenir un “objectif à part entière de l’enseignement, dès le collège, via un temps dédié en classe de cinquième et de seconde“. L’information des élèves et de leurs familles, dans les “périodes charnières de l’orientation", doit également être améliorée “grâce à des éléments comparatifs entre filières de formation initiale (rémunération, insertion, débouchés…)“, tandis que les enseignants ont besoin d'être “mieux formés au monde professionnel dès le début et tout au long de leur carrière“.
Rénover la formation initiale et l'alternance
Pour faciliter l'insertion vers l'emploi, il est question de “poursuivre“ la rénovation de la formation initiale et de l'aternance, en y intégrant les “besoins nouveaux, pour s’assurer que les cursus existants les prennent bien en compte, ou créer de nouveaux cursus“.
Concernant le lycée professionnel, “perçu comme insuffisamment attirant, insérant et professionnalisant“ et ce malgré qu'il comporte une “grande partie“ des métiers en tension et d’avenir, la mission suggère d'inciter les lycées professionnels “à aller vers les entreprises, par exemple en intégrant des éléments relatifs à la relation aux entreprises locales parmi les indicateurs de résultat des lycées professionnels“. Il faudrait encore “améliorer la qualité de l’orientation en amont“, développer les dispositifs de spécialisation concrète, comme les “colorations“ et les formations complémentaires d’initiative locale“ et enfin assurer un suivi et un accompagnement à l’insertion des jeunes diplômés de la voie professionnelle.
De l'autre côté, cela passe par la pérennisation du “succès“ de l’apprentissage. Il devra pour ce faire réussir “le développement de l’apprentissage dans les formations à niveau de qualification baccalauréat ou infra-baccalauréat“, et assurer “la sécurisation d’un modèle de financement pérenne et adéquat". Est ainsi proposé “de maintenir l’aide exceptionnelle annoncée en 2020 et reconduite jusqu’en 2023“ tout en évitant la “tentation“ d’une augmentation des prélèvements sur les entreprises. La mission souhaiterait de même que le financement de l’apprentissage soit “sécurisé“ en “provisionnant annuellement une dotation budgétaire de l’Etat, pour équilibrer le budget de France compétences“. Enfin, elle demande “d’éviter une baisse insoutenable des niveaux de prise en charge (NPEC) et (de) soutenir l’investissement dans les centres de formation d’apprentis.“
Parmi les autres recommandations concernant l'éducation :
- Créer une plateforme régionale de “Bourse aux stages“
- Mieux incarner l’entreprise au sein des collèges et lycées et améliorer la formation des enseignants au monde de l’entreprise (périodes d’immersion, formation dédiées…)
- Préserver le financement dédié à l’apprentissage, pour soutenir l’investissement des centres de formation, garantir des niveaux de prise en charge soutenables et ne plus effectuer de prélèvements au profit du plan d’investissement dans les compétences (PIC)
- Veiller à assurer la pleine association des acteurs territoriaux de l’emploi et de l’insertion, en particulier les Régions et les Missions locales, aux réformes envisagées dans le cadre de la création de “France Travail“ et du second Plan d’investissement dans les compétences (PIC)
La synthèse du rapport “la formation, les compétences et l’attractivité“ ici