Annulation par le Conseil d'Etat de la révocation d'un DASEN pour des raisons de forme
Paru dans Scolaire le vendredi 12 mai 2023.
Le Journal officiel annonçait le 4 mai que le Conseil d'Etat annulait le décret du 12 mars 2020 qui mettait fin aux fonctions de Franck Picaud, directeur académique des services de l'éducation nationale du département des Deux-Sèvres ainsi que l'arrêté le réintégrant dans le corps des IA-IPR (ici). ToutEduc avait alors souligné qu'une telle mesure était très exceptionnelle, moins de 5 exemples en 20 ans.
Le texte du jugement est à présent accessible sur Legifrance. La Haute juridiction rappelle que cet IA-IPR avait été nommé le 27 novembre 2015 DASEN des Deux-Sèvres, que le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, "après un signalement de la rectrice de l'académie de Poitiers", avait confié à l'inspection générale "une mission d'enquête administrative concernant de potentiels dysfonctionnements" et qu'à la suite de la remise du rapport, il a été "mis fin, dans l'intérêt du service, aux fonctions et au détachement de M. B... dans cet emploi".
Le Conseil d'Etat annule cette mesure. Il considère qu'un agent public "faisant l'objet d'une mesure prise en considération de sa personne, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même d'obtenir communication de son dossier", lequel doit comprendre le rapport établi à l'issue de l'enquête de l'inspection générale "ainsi que, lorsqu'ils existent, les procès-verbaux des auditions des personnes entendues sur le comportement de l'agent (...) sauf si la communication de parties de ce rapport ou de ces procès-verbaux serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui ont témoigné. Dans ce cas, l'administration doit informer l'agent public, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur, de telle sorte qu'il puisse se défendre utilement."
Or le rapport lui a été transmis "dans une version dans laquelle, d'une part, plusieurs parties avaient été intégralement occultées (...), et remplacées par les mentions 'partie non communicable (...)', d'autre part, les parties non totalement occultées comportaient certaines mentions dissimulées selon le même procédé". En outre, M. B... "n'a eu communication que de certains des quarante-quatre comptes rendus d'audition annexés au rapport" sans qu'il soit "allégué que cette communication parcellaire avait pour objet de protéger les personnes qui avaient témoigné". Il est donc "fondé à demander l'annulation du décret du 12 mars 2020 ainsi que, par voie de conséquence, de l'arrêté du 16 mars 2020" (qui le réintégrait dans le corps des IA-IPR).
La décision du Conseil d'État , n° 443749 du vendredi 28 avril 2023, mentionnée dans les tables du recueil Lebon (ici)