Les évaluations prennent toute la place (Education au coeur)
Paru dans Scolaire le vendredi 07 avril 2023.
“Si l'évaluation est devenue un phénomène mondial, anthropologique, au niveau scolaire elle est loin d'être identique partout“, constatait vendredi 7 avril Roger-François Gauthier lors de son intervention au colloque “L'évaluation est-elle un facteur de réussite ?“
Organisé par le Think Tank "Education au cœur" de Valérie Marty et Jean-Louis Auduc, cette journée sur l'évaluation en classe donnait notamment la parole à des enseignants, des parents d'élèves ou d'autres acteurs des politiques éducatives comme Alain Boissinot (ancien recteur et ancien président du conseil des programme) ou Denis Paget (ancien professeur de lettres modernes, ancien co-secrétaire général du SNES-FSU et ancien membre du conseil des programmes).
Après la question de l'origine et des enjeux de l’évaluation dans le système éducatif français, l'intervention de Roger-François Gauthier (inspecteur général honoraire de l'EN et membre du Cicur) s'est focalisée sur les élèves tout d'abord, pour qui les modes d'évaluation font partie de la formation, se divisant entre fonctions d'évaluation et d'apprentissage.
L'évaluation est décrite comme une “zone aveugle“ très complexe, sans référence qui s'impose, qui change dans le temps, d'un professeur à l'autre, et sans aucun document clair qui explique les critères ou les moments de passation d'une épreuve. Mais elle est aussi une “zone centrale“, sorte de machine qui tourne imperturbablement, intouchable, et qui décide (froidement) de l'avenir des élèves, notamment en fin de troisième.
Dans un système éducatif français dévoyé au moment de la massification scolaire, l'évaluation est devenue “plus importante que les apprentissages et que la construction d'une culture“, et ce que l'enfant n'a pas acquis, “peu s'en préoccupent“. Avec des conséquences sur les apprentissages eux-mêmes, consistant à privilégier les disciplines qui favorisent l'évaluation et le tri. Et de poser la question des programmes, dont “on ne sait pas comment ils sont légitimés“. Ce qui ramène à la problématique des finalités de l'éducation qui n'apparaissent dans aucun document. “Les questions de fond, on ne les pose jamais."
Le lycée a aussi fait l'objet d'un atelier, marqué par les conséquences du nouveau baccalauréat pour les jeunes ou les personnels de l'éducation. Par exemple, si les coefficients du bac mettent à équivalent le poids (50 % de la note) des spécialités et des matières du tronc commun, quelles conséquences cela peut-il avoir sur des élèves que l'on sait stratèges ? Pour ce proviseur, les épreuves de spécialité ont entraîné 5 semaines d'examens non-stop dans son établissement, et selon lui “tout le monde est en bout de course“. Une enseignante, indique de son côté que le contrôle continu a considérablement alourdi le nombre d'évaluations, évoquant une “masse de notes“, une “pression énorme vu que tout est certificatif“.