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La réforme de l’enseignement professionnel : à la hauteur des enjeux ? (Daniel Bloch)

Paru dans Scolaire, Orientation le mercredi 14 septembre 2022.

"Le front des organisations syndicales de l’enseignement professionnel, brisé depuis plus de vingt ans, s’est reconstitué, cet été, face aux récentes propositions gouvernementales visant à substituer des périodes de formation en milieu professionnel aux enseignements en lycée professionnel", constate Daniel Bloch. L'ancien recteur, considéré comme "le père du baccalauréat professionnel, voir ToutEduc ici), approuve l’allongement des périodes de formation en milieu professionnel mais propose qu’il soit accompagné non par un rétrécissement de la formation générale, mais par son approfondissement, ce qui implique également sa prolongation. ToutEduc publie bien volontiers la tribune qu'il propose à ses lecteurs.

Commerce extérieur à un niveau de déficit jamais atteint, secteurs professionnels – le nucléaire, le transport, la petite enfance, l’hôtellerie-restauration notamment-, en souffrance faute de personnels qualifiés : l’actualité frappe tous les jours à notre porte en témoignant de l’urgence d’une réforme en profondeur de l’enseignement professionnel. Il est vrai qu’au cours des vingt dernières années, sauf pendant de courtes périodes, il a été délaissé.

Ce moment n’est pas sans rappeler l’année 1985, où face à un constat identique, Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’Éducation nationale, précédemment en charge de l’Industrie, avait été conduit à frapper fort, en apportant sa pierre à une reconquête industrielle par une réforme de l’enseignement professionnel. Une voie poursuivie, sans discontinuité, jusqu’en 1992, par les deux ministres qui lui ont succédé, René Monory et Lionel Jospin. Avec des résultats spectaculaires engrangés jusqu’à l’an 2000 : doublement du nombre de bacheliers, incluant les 90 000 bacheliers professionnels – un baccalauréat créé en 1985 -, mais aussi des techniciens supérieurs, des ingénieurs, des diplômés scientifiques des universités. Une croissance planifiée, avec en 1985, une loi de programmation budgétaire prolongée, suivie, en 1990, par le Plan Universités 2000. Et un solde des échanges extérieurs devenant excédentaire tout long des années 90, mais en baisse dès 1995, faute de feux suffisamment entretenus.

Deux données essentielles caractérisent l’évolution de l’enseignement professionnel depuis l’an 2000. La première : Les enquêtes PISA établissent que l’évolution négative du niveau des élèves à la sortie du collège est liée à l’effondrement des performances des 25 % des "moins bons" d’entre eux. Or ce sont ces élèves en difficultés qui, majoritairement, sont "orientés" vers la voie professionnelle. La seconde : les élèves y sont de plus en plus jeunes, avec la diminution des taux de redoublement dès le cours préparatoire, avec la réduction, depuis 2009, de quatre à trois années de la durée de préparation du baccalauréat professionnel mais aussi, ce qui n’est pas sans poser question, avec l’ "amélioration" continue des taux de réussite aux examens. En conséquence, et en moyenne, deux années de scolarité en moins. Ainsi les bacheliers professionnels qui poursuivent pendant deux ans leurs études jusqu’à un BTS, l’obtiennent à l’âge où, en 2000, leurs prédécesseurs obtenaient seulement le baccalauréat. Deux chiffres caractérisent cette conduite paramétrique bien davantage que pédagogique de l’enseignement professionnel depuis l’an 2000 : 100 000 lycéens en moins, mais 100 000 bacheliers professionnels en plus.

D’où une proposition destinée à compenser, en partie, ces années de formation perdues : un CAP et un baccalauréat professionnel renforcés, avec au-delà des deux années actuelles du CAP et des trois années du baccalauréat professionnel, un semestre supplémentaire de formation en milieu professionnel, en accord avec la proposition du Président de la République, mais également un semestre de formation générale en plus. Et non en moins. Pour se mettre à la hauteur des enjeux.

Le déficit du commerce extérieur, en 1985, était dix fois inférieur à ce qu’il est aujourd’hui, avec un écart entre l’offre et la demande de qualifications également moins important. Comment, dans ces conditions, considérer la substitution, telle qu’elle est proposée aujourd’hui, de quelques semaines en milieu professionnel à quelques semaines en lycée comme à la hauteur nécessaire à la réindustrialisation notre pays ? Il faut reprendre la copie."

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