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La harangue, un outil pour aider les jeunes à trouver leur place, y compris à l'école

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture le dimanche 10 juillet 2022.

L'association "La Belle Harangue", organise, à partir du 23 septembre 2022, "une quinzaine où tout le monde est invité à haranguer sur le thème Maintenant", avec le soutien de la Fondation pour l'écriture, du ministère de la culture / DGLFLF, de France.tv et de la fondation "Engagement médias jeunes". Céline Danion est l'organisatrice de cet événement.

ToutEduc : La Belle Harangue ! Quelle est la genèse de cette histoire ?

Céline Danion : Avec Charles Autheman (de la fondation pour l’écriture), nous avions dans l'idée, depuis longtemps, de faire quelque chose autour de l'écriture et de la parole. Les jeunes ont vécu beaucoup de difficultés durant deux années de la Covid. Alors, nous nous sommes dit, l'année dernière, que la rentrée pourrait se dérouler autrement, laisser plus de place aux projections des jeunes sur leur propre année. Avec de précieux soutiens qui nous ont fait confiance dès le début, nous avons créé cette « Belle Harangue », fête de l'écriture et de la parole, pour donner la parole aux jeunes et les accompagner dans celle-ci.

ToutEduc : Est-ce un concours d'éloquence ?

Céline Danion : Non, surtout pas de concours. C'était et sera une invitation à l'écriture et à la parole où tout le monde est invité à dire, et à écouter ce que chacun a à dire. Nous avons choisi le jour de l'équinoxe d'automne, ce moment où le cosmos se renverse, en espérant que les postures soient un peu renversées également : que des discours de rentrée puissent venir des jeunes, qu’avec un thème comme point d’appui, ils puissent haranguer avec ce qui leur tient à cœur, que tout le monde soit invité, laisser ces voix résonner plutôt qu’à chercher à être le meilleur...

ToutEduc : La Belle Harangue est un événement national, voire international, avec la participation, notamment, de l'école française de Thessalonique, en Grèce et du lycée français de Porto...

Céline Danion : Oui. Pourquoi chercher à limiter ? Je voudrais signaler que c'est aussi une fête qui s'adresse à tous les jeunes. L'année dernière, les jeunes participants avaient entre 8 et 30 ans... C'est d'abord un événement national. La première édition avait réuni 5000 jeunes en France métropolitaine et ultra-marine. Au niveau international, cela reste timide. L'évènement est récent. Mais, l'année dernière, le résultat était intéressant. Je pense, entre autres, aux jeunes en Grèce qui apprenaient le français et dont l’enseignant avait fait de cette Belle Harangue un événement joyeux et plein de confiance.

ToutEduc : Le thème cette année est “Maintenant”...

Céline Danion : Oui. L'année dernière le thème était “Ici”. Avoir un thème permet à chacun de se sentir impliqué dans un événement commun. Mais nous avons choisi un thème suffisamment large pour que le choix sur le fond et la forme reste aux participants. L’une des particularités de La Belle Harangue est de ne contraindre personne ni à l'éloquence, ni au slam, ni à une plaidoirie, ni à la poésie : les jeunes ont besoin de trouver leurs voies et leurs voix. En revanche, sur notre site, nous donnons beaucoup d'indications pour aider à construire une harangue autour d'une alliance entre le fond et la forme. Le thème imposé reste un point d'appui, un socle commun pour que chacun puisse trouver sa place dans ce commun. Cette confiance, qui leur est faite, dessine d’ailleurs un joli portrait de la jeunesse. L'année dernière, par exemple, personne n'avait tourné sa harangue vers un "Et si je", naturellement, ils étaient tous allés vers "Et si nous". En outre, dans la majorité des sujets traités, les thèmes, qui revenaient souvent, étaient des thèmes sur l'égalité, le respect de l'autre, l'école (comment on y traité, doit-on lui faire confiance, nous protège-t-elle ?..) et l'écologie, bien sûr. D'une façon globale, les sujets étaient graves mais, par ailleurs, positifs, avec une forme de conscience et de confiance en l'avenir.

ToutEduc : Revenons à cette année. Comment y participer et quel est le mode d'emploi ?

Céline Danion : Pour y participer, il faut s'inscrire sur notre site... La meilleure analogie est la fête de la musique : chaque jeune peut haranguer là où il sera. Les lieux sont multiples : une place de village, un kiosque, un jardin public, une école, un monument... L'important est que la rentrée de septembre soit vécue comme une fête.

Chaque jeune pourrait décider de haranguer le 23 septembre, mais, en réalité, ces Belles Harangues sont organisées par des enseignants, des responsables d’associations, des éducateurs. C’est grâce à eux aussi que cela a si bien fonctionné. Le 23 septembre est très tôt à la rentrée, cela a pu en rebuter certains, pourtant tous ceux qui ont participé avec un groupe ont parlé ensuite de la dynamique très forte et de la cohésion que cela avait permis.

Donc, pour participer : s’inscrire, bénéficier de l’apport pédagogique et culturel proposé, et organiser concrètement la restitution des harangues des jeunes. Puis, si possible, nous envoyer les harangues, afin que nous les valorisions au mieux.

ToutEduc : Comment faire concrètement ?

Céline Danion : Les jeunes doivent être préparés en amont par les enseignants, les associations, les éducateurs des collectivités territoriales... Pour haranguer, il faut aussi un espace public et du public. Pour cela, les collectivités territoriales, établissements scolaires, lieux culturels et lieux de passages sont invités à proposer des espaces de harangue. Notre association met également à disposition une affiche de La Belle Harangue mais aussi une autre plus personnalisable. Sur le plan pédagogique, un dossier, à destination des relais, des enseignants notamment, se trouve sur notre site. Il donne quelques clés pour préparer les jeunes à l'écriture et à la prise de parole, comment organiser le temps de la restitution. Nous mettons également à disposition des harangues de parrains et de marraines de la manifestation ou des harangues du patrimoine - des textes, mais également la posture de Jean Jaurès, par exemple, sur une photo et qui harangue la foule... Une vingtaine de parrains et de marraines, qui font usage de la langue dans leurs quotidiens (avocats, écrivains, comédiens...) proposent enfin des conseils à destination des jeunes. Nous proposons donc des moyens pédagogiques et des ressources culturelles.

ToutEduc : Et l'appel à projet...

Céline Danion : Oui. Certains souhaitent réaliser des projets plus développés, plus larges, plus longs, avec l'aide, par exemple, d'écrivains, de comédiens, d'avocats... Pour cela, des projets plus complexes pourront être aidés financièrement - à raison d'un projet par région maximum. Je précise que ces projets peuvent avoir lieu en amont, ou en aval du 23 septembre : la quinzaine de La Belle Harangue peut être un aboutissement… ou un point de départ.

ToutEduc : Ils seront donc subventionnés...

Céline Danion : Oui. A hauteur de 1000 euros. Par notre association et grâce à la Fondation pour l'écriture et au ministère de la Culture. Et si un enseignant veut monter un projet particulier, le reste de la subvention pourrait se trouver via le Pass Culture, via un département ou une région...

ToutEduc : Votre communication à l'appel à projet ne tombe-t-elle pas tard ?

Céline Danion : Ce sont les professeurs, avant tout, qui montent les projets pour les élèves. A la rentrée, ils auront les premières semaines de septembre pour finaliser le travail avec les élèves et le mettre en œuvre au moment voulu. Cependant, il est vrai que cela tombe à la fin de l'année. Il nous a fallu du temps pour monter l'association. Nous projetons d’annoncer tout cela beaucoup plus tôt l’année prochaine.

ToutEduc : Vous dites que l'événement se poursuit à travers d'autres projets et pendant toute l'année...

Céline Danion : Effectivement. L'année dernière, l'événement a eu du succès et beaucoup de personnes se sont rendu compte de son intérêt : laisser parler les jeunes et les écouter. Des organisations m'ont appelée pour me dire que cela serait intéressant que les jeunes de La Belle Harangue puissent redire leurs textes dans un autre contexte : participation à des émissions de télévision, au festival "Aux livres citoyens", aux Académiciens en Sorbonne... Ce qui a été fait au fur et à mesure. Pour cette année, nous organiserons les choses d'une autre manière, afin de répondre aux sollicitations. Et surtout revoir le calendrier : annoncer La Belle Harangue suivante au moment de l'équinoxe du printemps, pourquoi pas...

Propos recueillis par Rabah Aït Oufella, relus par Céline Danion

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