Santé mentale à l'école : Le désengagement serait plus important chez les élèves plus âgés (enquête Synlab)
Paru dans Scolaire, Périscolaire le lundi 04 juillet 2022.
“18 % des élèves de maternelle laissent transparaître dans leurs mots, attitudes et interventions des signes de stress ou d'anxiété. Un chiffre qui monte à 26 % chez les collégiens, 31 % en lycée et 35 % en lycée professionnel“, indiquent les enseignants interrogés par l'association Synlab dans une enquête intitulée “La santé mentale à l'école“ et diffusée ce 4 juillet.
D'après ses résultats, “après la pandémie sanitaire, nous sommes à présent confrontés à une pandémie du stress à l'école qui touche à la fois les jeunes et adultes". Et si “un élève sur quatre est en état de stress avec des risques importants sur sa santé mentale, son engagement à l’école et son avenir“, pour la docteure en psychopathologie et psychothérapeute Hélène Romano, du comité scientifique de l'étude, "en interrogeant les enseignants, cette enquête montre que le tabou de la santé mentale recule".
Désengagement
Mais surtout, santé mentale et engagement scolaire seraient “intimement liés“. L'enquête menée par Synlab expose l'idée que “la difficulté à persévérer est un des signes de désengagement le plus repéré par les enseignants, quel que soit le niveau scolaire“. En outre, le désengagement serait plus important chez les élèves plus âgés : 39 % au lycée GT et 47 % en lycée pro contre 26 % en maternelle, 33 % en élémentaire, 44 % au collège. Et se serait accru depuis la crise sanitaire. “Ces résultats, précise l'enquête, amènent à faire l'hypothèse d'un phénomène de décrochage scolaire des élèves qui serait le résultat d’un processus d’accumulation du stress.“
Lʼanalyse statistique réalisée à partir des déclarations des enseignants montrerait que “les relations au sein de la famille joueraient un rôle important dans les problématiques de stress et de désengagement scolaire“, ces dernières agissant “soit comme une facteur de risque, soit comme un facteur protecteur". Aussi, “plus les élèves utiliseraient des stratégies de résolution de problème centrées sur la tâche, moins ils seraient nombreux à présenter des signes de stress et de désengagement scolaire.“
Stratégies
Pour la docteure en psychologie cognitive, “les stratégies mises en place par les élèves auront un impact sur l'évolution de leur stress ou de leur anxiété. Les stratégies d'évitement (addiction aux écrans, désengagement scolaire) auront un impact négatif tandis que les stratégies centrées sur la résolution de leurs problèmes seront bien plus efficaces et auront un impact positif."
Autres éléments de l'enquête, les difficultés externalisées (agitation, comportements perturbateurs,..) et la perte dʼinsouciance dans le premier degré qui apparaissent “comme des signes importants de l'évolution de la santé mentale des élèves“.
De même, il pourrait y avoir “un phénomène dʼintériorisation du stress en lien avec le contexte sociétal“, tandis que le rapport aux écrans et la crise sanitaire “constituent deux sources de stress communes au 1er et 2nd degré que les enseignants identifient comme importantes dans l'évolution de la santé mentale des élèves.“
A noter enfin que le stress à l'école concerne aussi les enseignants avec plus de 80% d’entre eux qui “sont épuisés émotionnellement“ subissant un phénomène de contagion du stress. Ils seraient en effet “confrontés à des élèves qui expriment leur détresse psychologique par des comportements perturbateurs“ faisant face “à des difficultés professionnelles qui les exposent à un épuisement émotionnel.“
Vulnérabilités
La priorité, pour Christophe Marsollier, est donc “de repérer ces vulnérabilités et, pour susciter cette attention, d’aider les personnels à prendre conscience de l’importance des enjeux de ce ressenti momentané ou durable de nombreux jeunes. (…) Il convient de comprendre les facteurs de cette vulnérabilité, de connaître la multitude des risques auxquels les jeunes sont exposés aujourd’hui et d’être en mesure de les accompagner.“
L’une des pistes d’action évoquée par l'inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche cité dans cette étude est “le renforcement de leurs capacités de résilience pour faire face aux défis et aux incertitudes qui les attendent“ car “de nombreux rapports et travaux de recherche soulignent que l’enseignement des compétences psychosociales (parfois appelées soft skills) est essentiel pour parvenir à renforcer ces capacités de résilience.“
De nombreux enseignants, sans en avoir toujours conscience “prennent déjà en compte les vulnérabilités des élèves et mettent en place des pratiques pour renforcer la coopération, la confiance en soi (...). Ces pratiques sont indispensables pour soutenir les jeunes et elles vont de pair avec des exigences éducatives et académiques ambitieuses. Elles facilitent la capacité à réagir positivement face à des difficultés ou dans l’adversité.“
L'enquête ici
NB : L'enquête Synlab a été réalisée en avril-mai 2022, par questionnaire en ligne sur la plateforme et les réseaux sociaux dʼÊtrePROF, à partir des perceptions de 1056 enseignants de la maternelle au lycée, avec pour objectif “de saisir l’ampleur du phénomène du stress scolaire et de comprendre ses facteurs et ses enjeux pour préserver la santé mentale des jeunes.“
Selon l'association, “il existe un biais dʼéchantillonnage lié au recrutement des répondants à travers la plateforme ÊtrePROF. À ce titre, les résultats obtenus reflètent les perceptions et les besoins dʼenseignants engagés dans une démarche de développement professionnel, ce qui nʼest pas le cas de lʼensemble de la population. (..) Les données ont été collectées auprès des enseignants et reflètent ainsi uniquement les perceptions de ces derniers quant à la santé mentale de leurs élèves et non une mesure directe de celle-ci.“