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Voie professionnelle : le SNUEP dénonce le projet d'E. Macron, P. Devin un renoncement à l'ambition d'une culture commune, P. Vivier plaide pour une réorientation du système scolaire

Paru dans Scolaire, Orientation le mercredi 06 avril 2022.

C'est un “bouleversement fondamental“ que prévoit Emmanuel Macron pour les lycées professionnels, explique Axel Benoist à ToutEduc.

Le co-secrétaire général du SNUEP-FSU a rencontré l'équipe de campagne du président-candidat à l'élection présidentielle hier 5 avril et il décrit un projet qu'il décrit globalement “bien dans les tuyaux“, même si les articulations resteraient à définir. Seul élément assuré, un doublement des PFMP (périodes de formation en milieu professionnel) pour tous les élèves de terminale CAP et bac pro. Une “diminution drastique voire une disparition des heures d'enseignement professionnel en terminale“ que le syndicat FSU de l'enseignement professonnel public fustige, car cette mesure conduirait à un “transfert de la responsabilité de la formation professionnelle aux entreprises aux dépends des enseignements professionnels dispensés par les professeur·es de lycée professionnel (PLP)“.

Axel Benoist rappelle que 1300 postes ont été supprimés dans l'enseignement professionnel public sous ce quinquennat, et explique qu'il s'agirait d'un bouleversement en termes de statut et de missions pour ces professeurs, qui pourraient désormais avoir à s'occuper du suivi des élèves dans l'entreprise.Les enseignants “volontaires“ pourraient en effet, selon le projet d'E. Macron, se voir attribuer une revalorisation salariale s'ils s'engagent dans un “pacte PLP“ édifié sur la base de “quatre missions annualisées : suivi individualisé des élèves, formation continue des enseignant·es sur le temps de vacances scolaires, devoirs faits et remplacement.“

En revanche le statut des élèves de terminale ne serait “pas complètement arbitré“ entre d'un côté des apprenti·es (donc salarié·es) et de l'autre, des élèves ou peut-être des stagiaires. Ces dernier·es, explique le SNUEP-FSU, se verraient attribuer une allocation financière de 200 euros pour les mineurs et 500 euros pour les majeurs, “soit une main-d'œuvre à mi-temps payée entièrement par l’État, une véritable aubaine pour les entreprises". Les cartes des formations seraient quant à elles calibrées “uniquement au prisme des besoins en emplois des entreprises sur un territoire donné et sur la base des secteurs d'activité en tension.“

Le SNUEP-FSU “combattra ce projet avec force“, car il “instrumentalise clairement les lycées professionnels pour pallier le manque de main-d’œuvre peu voire pas qualifiée sur des emplois fortement dévalorisés". Cette réforme, poursuit-il, “hypothéquera encore davantage les possibilités de poursuites d’études des lycéen∙nes professionnel∙les“, et les destins scolaires d'une partie de la jeunesse “seraient scellés dès la fin du collège en fonction des attendus patronaux“, ce qui constituerait pour les décideurs actuels “un pari gagnant-gagnant“, en permettant également “de dédouaner les branches professionnelles de revaloriser les métiers afin de les rendre attractifs.“

Le communiqué ici

Pour sa part, Paul Devin, président de l’Institut de recherches de la FSU conteste que les réformes envisagées permettraient d'améliorer l'accès à l'emploi des jeunes en donnant davantage de place aux formations en entreprise. Celles-ci en effet "orientent la formation sur l’employabilité plutôt que sur la construction de compétences professionnelles expertes et durables". Quant à la supériorité de l'apprentissage en termes d'insertion professionnelle, elle est loin d'être aussi évidente que le donnent à penser les études fondées sur des taux d'emploi.

Le syndicaliste craint de plus "qu’en faisant glisser le statut de l’élève vers le salariat, la tentation sera de considérer qu’il ne s’agit plus d’une mission relevant du ministère de l’éducation nationale". Au-delà, "la réduction progressive de l’enseignement général" constituerait un "renoncement à ce qui fonde pourtant notre école républicaine : permettre à tous et toutes d’accéder à une culture commune", un mouvement déjà amorcé par Jean-Michel Blanquer.

Le blog de P. Devin ici

De même, Pascal Vivier dénonce les illusions de l'apprentissage, une présentation faussée de ses succès, et qui ne peut pas non plus "être un essuie-tout absorbant le trop-plein de jeunes en déshérence scolaire". Le secrétaire général du SNETAA (le syndicat FO de l'enseignement professionnel) souligne, dans une tribune du Monde de l'éducation, que les entreprises ont besoin "d’une main-d’œuvre qualifiée, compétente, diplômée", ceux qui ont été négligés depuis des décennies. "Face aux problèmes de recrutement, les grands groupes s’essayent à un système de formations maison prêtes à l’emploi", mais ce ne sont que des "structures palliatives, éparpillées façon puzzle au gré d’écoles d’entreprise", incapables d'endiguer "la pénurie de salariés qualifiés qui frappe tant de domaines, dont le BTP, mais aussi les métiers du soin à la personne…"

Il faut donc "développer, pour tous, dès la 6e, la découverte de tous les métiers" et passer du "socle de connaissances minimum" à "une solide culture commune" qui ne doit pas être confondue avec "la culture de l’abstraction de type universitaire, aseptisée" qui prévaut dans tout le système scolaire, et qui amène le lycée professionnel à "être le réceptacle de jeunes orientés par défaut comme sanction à leurs grandes difficultés". Pour "redonner du souffle à l’enseignement professionnel" et "pour refaire nation", les professeurs de lycée professionnel "ont l’expérience, la connaissance de l’industrie, des technologies des métiers", ils sont "les derniers hussards noirs de la République, qui doit les reconnaître !"

La tribune ici

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