Enseignement catholique : "donnez nous les moyens de la mixité sociale"
Paru dans Scolaire le mardi 22 février 2022.
"Pour nous, l'ouverture à tous est une richesse. On ne peut pas nous reprocher l'absence de mixité sociale dans nos établissements et nous en refuser les moyens." Tel était l'essentiel des messages de Philippe Delorme qui présentait, ce 22 février, "la contribution de l'enseignement catholique" aux débats à l'occasion des élections présidentielle et législatives. Le secrétaire général de l'enseignement catholique évoque plusieurs facteurs qui imposent aux établissements privés de demander aux familles des frais de scolarité qui, de fait, interdisent aux enfants des familles défavorisées d'y avoir accès. Les "ressources publiques", forfaits d'externat, subventions et contrats aidés représentent moins de la moitié des ressources d'un établissement (hors salaire des enseignants, ndlr). Leur montant a augmenté depuis 2017 pour le 1er degré (+11 %), il a, très légèrement, baissé pour le second degré. Le prix moyen de la contribution familiale varie de 430€ en maternelle à 1 249 € en lycée général, le pris d'un repas entre 5,04 et 6,73 €.
Indépendamment de la restauration scolaire, d'autres facteurs jouent en défaveur du privé, estime le SGEC. C'est ainsi qu'en ce qui concerne l'immobilier, l'enseignement privé paie la TVA sur les travaux comme s'il s'agissait de locaux commerciaux et (hors pour les espaces fréquentés par les élèves, ndlr) les taxes d'habitation et foncières comme sur des bureaux, autant de frais qui se retrouvent dans la participation demandée aux familles. Par ailleurs, un certain nombre de collectivités ont une politique volontariste pour leurs écoles publiques, qu'il s'agisse d'isolement, de nouveaux systèmes de chauffage, d'éclairage... ce qui diminue les frais d'entretien, donc le budget consacré aux dépenses courantes des écoles, et, par voie de conséquence, le forfait d'externat versé aux établissements privés (calculé sur la base des frais engagés pour les élèves du public, ndlr). C'est d'ailleurs l'un des éléments, avec la baisse démographique, qui rend "très compliqué" le chiffrage des sommes dues au titre du forfait d'externat pour les écoles maternelles passées sous contrat du fait de la loi "pour une école de la confiance".
La contribution du SGEC au débat politique comprend de nombreuses propositions, dont voici les plus saillantes. Elles valent aussi bien pour le privé sous contrat que pour l'enseignement public.
L'établissement. Le SGEC voudrait voir "confier la pleine responsabilité de l'établissement au chef d'établissement" et propose de lui donner "un rôle plus déterminant dans la constitution de ses équipes". Sans aller jusqu'à proposer de supprimer les concours ou le statut de fonctionnaire, le SGEC évoque une procédure qui permette, dans le public comme dans le privé, de vérifier l'adhésion du futur enseignant au projet et aux caractéristiques de l'établissement. Une "charte éducative de confiance" entre les parents et l'établissement permettrait de renforcer "l'alliance éducative". Les établissements auraient "les moyens de leur autonomie par l'attribution d'une dotation horaire réellement globale", notamment en ce qui concerne les suppléances, les activités péri-éducatives, les "missions particulières"...
Cette autonomie porte aussi sur l'organisation de l'établissement. Interrogé sur la limitation des effectifs du 1er degré à 24 élèves, Philippe Delorme fait valoir qu'il peut être plus facile de faire classe avec 30 élèves qui ont tous un bon niveau qu'avec 24 élèves en difficulté. Il dénonce l'attitude de certains rectorats qui imposent des dédoublements pour un 25ème élève.
Le SGEC souhaite aussi mettre sur un pied d'égalité premier et second degrés, avec "un vrai statut d'établissement aux écoles du premier degré".
Les enseignants, la pédagogie. Le secrétaire général plaide pour la création d'une "agrégation du 1er degré". Plus généralement, il attend de la réforme des concours qu'ils permettent davantage qu'actuellement d'apprécier la "capacité à enseigner" des candidats.
Il estime que les programmes doivent donner "un cadre", des "objectifs à atteindre", mais dans "une logique de cycle" et il s'insurge contre "les circulaires" (ministérielles, ndlr) et "cette manière de corseter le système". S'il fait confiance aux enseignants, il estime néanmoins qu'il faut "changer d'état d'esprit", pensant à ceux qui voudraient profiter d'une organisation plus souple des établissements pour constituer des "classes de niveau" ou "reconstituer des filières" (telles qu'elles existaient avant la "réforme Haby", ndlr).
Pour lui, "le métier d'enseignant doit évoluer" et des temps de concertation doivent être prévus pour favoriser le travail en équipe. Si la revalorisation des rémunérations doit être "significative", elle doit s'accompagner de contre-parties, annualisation du temps de travail, légère augmentation des obligations de service dans le second degré...
Le lycée. "Favorable à réforme du lycée", le SGEC souhaite voir une heure du tronc commun dédié aux "mathématiques outils". En ce qui concerne le contrôle continu, il est conscient des difficultés qu'il génère. "Il faudra 10 ans" pour que cette réforme soit assimilée. "D'ailleurs, faut-il continuer à travailler avec des notes"? s'interroge-t-il.
Les moyens. Le SGEC demande aux pouvoirs publics de "permettre les ouvertures de classes et d'établissements" et de "programmer les moyens attribués à l'enseignement privé sous contrat en fonction du besoin scolaire reconnu" (là où les demandes des familles excèdent le nombre de places disponibles dans les établissements privés sous contrat, ndlr).
Le document "Elections 2022, la contribution de l'enseignement catholique" est téléchargeable ici