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La France n'a pas de politique pour sa Jeunesse, estime Camille Peugny (ouvrage)

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture le lundi 07 février 2022.

“Contrairement aux discours convenus, non, on ne donne pas le bac à tout le monde“, affirme le sociologue Camille Peugny dans son dernier ouvrage intitulé “Pour une politique de la jeunesse“.

Ainsi se ponctue la démonstration selon laquelle “toutes filières et séries confondues, en 2015 et parmi les jeunes âgés de 20 à 24 ans, seuls 59 % des enfants d'ouvriers et d'employés étaient titulaires du bac, contre 87 % des enfants de cadres ou de professions intermédiaires.“

En quatre chapitres, Camille Peugny fait en effet état de “l'omniprésence de la jeunesse dans les discours politiques (qui) tranche avec l'absence de vraie politique de la jeunesse“ et en explique les travers, notamment ce qu'il appelle la “démocratisation ségrégative“.

L'auteur considère que, “sans distinction de filière, la démocratisation a nettement progressé, tandis qu'en la prenant en compte, les inégalités sociales d'obtention du bac n'ont pas diminué au cours du temps“. D'ailleurs, déclare-t-il, “la massification scolaire a considérablement transformé la société française, mais elle n'est pas achevée aujourd'hui, dans la mesure où une part non négligeable de la jeunesse continue à quitter précocément le système éducatif“, avec près de 100 000 jeunes qui sortent chaque année du système scolaire sans acun diplôme ou avec le seul brevet des collèges. Et “s'il est une frange sacrifiée de la jeunesse, elle est constituée de ces jeunes femmes et hommes peu ou pas diplômés.“

Il s'inquiète d'autant plus d'une “marée montante de la précarité“ qu' “en 2019, parmi les moins de 25 ans, plus d'un jeune sur deux en emploi exerce son activité en CDD, en intérim, en contrat aidé ou en apprentissage. Cette proportion était de moins de 20 % au début des années 1980“, alors quà l'inverse les politiques menées donneraient lieu à l“infantilisation d'une jeunesse entretenue dans la dépendance familiale“.

Celui qui plaide pour “plus d'Etat“ trouve d'ailleurs “raisonnable de ne pas minorer les effets de choix politiques qui font reposer sur les épaules de la famille les coûts du passage à l'âge adulte ou qui aboutissent à s'en remettre au marché“. D'où un sentiment de frustration d'une partie de la jeunesse en France “confrontée à une société qui promeut la méritocratie à longueur de débats mais qui dans les faits entérine très précocément des verdicts sociaux imparables“.

Camille Peugny tente de deconstruire des idées reçues sur la jeunesse. Sur les valeurs pour commencer, contrairement aux cohortes les plus âgées “plus crispées à l'égard de l'immigration ou moins préoccupées par les questions environnementales“. Ou par exemple, “dans le monde ouvrier, les jeunes se montreraient davantage attachés à leur emploi, dans un contexte de fort chômage, plutôt qu'au contenu de leur travail, à la différence de leurs aînés“. Il cite encore “plusieurs enquêtes (qui) ont déconstruit l'idée d'une défiance particulière des plus jeunes à l'égard du collectif “.

Dans ses propositions, il souhaite dès lors agir face au “millefeuille de dispositifs accumulés successivement“, en estimant que “réclamer une vraie politique de la jeunesse, ce n'est pas prétendre que l'Etat ou les collectivités locales ne font rien, en particulier pour les jeunes les plus vulnérables, qui sont au contraire en contact avec de multiples institutions et peinent à trouver leur chemin dans un maquis de droits“.

De plus, se dessine dans cet ouvrage un pays à la mobilité sociale en panne, “la société française demeure une société dans laquelle les avantages et désavantages sociaux se transmettent de génération en génération“.

Le sociologue souhaite notamment aller vers la généralisation de la garantie jeunes, avec l'idée que la jeunesse est un âge fragile de la vie qu'il convient d'accompagner. S'il appelle à “agir vigoureusement pour réduire les inégalités“ et ce afin d'éviter que grandisse une fracture entre les générations, selon lui “il manque une conception politique voire philosophique de la jeunesse“

Car, interpelle l'auteur, l'urgence et l'angoisse de l'insertion peuvent-elles raisonnablement constituer un horizon désirable pour la jeunesse ?

Pour une politique de la jeunesse, Camille Peugny, 128p., Seuil éditions, 11,80€.

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