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Stéréotypes de genre : des quotas dans les spécialités au lycée pour favoriser la mixité ? (rapport Assemblée nationale)

Paru dans Petite enfance, Scolaire, Périscolaire, Culture, Orientation le jeudi 14 octobre 2021.

“Seul 3,2 % des biographies dans les manuels scolaires d’histoire retracent la vie de femmes." Ce chiffre, tiré du rapport de la mission d’information sur les stéréotypes de genre des députés Gaël Le Bohec (LREM) et Karine Lebon (GDR) qui a été remis à la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes le 8 octobre dernier, comme celui des 3 % d'éducateurs de jeunes enfants hommes, ou des 99 % des auxiliaires de puériculture qui sont des femmes, montre l'ampleur du phénomène des stéréotypes de genre en France.

Le rapport parle ainsi de “représentations erronées“, et dans son introduction évoque “un sujet central si l’on veut résoudre de manière durable la question des violences faites aux femmes et celle des inégalités professionnelles et économiques entre les femmes et les hommes“.

Mécanismes à l’œuvre

Il explique qu'il s'agit d' “enjeux de société majeurs qui nécessitent une mobilisation forte“. Voici les faits qu'il présente : “Il est avéré que les enfants témoins de violences conjugales subissent également un traumatisme profond.(..) Huit parents monoparentaux sur dix sont des femmes. La monoparentalité pose des difficultés d’organisation et entraîne une baisse notable du niveau de vie. Près de quatre familles monoparentales sur dix vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté et plus de 2,8 millions d’enfants sont en situation de pauvreté. Ces familles sont particulièrement concernées par l’impact que les stéréotypes de genre peuvent avoir sur la construction des parcours individuels dès le plus jeune âge."

Cette mission a retracé, dans le quotidien des jeunes françaises et français, les mécanismes à l’œuvre faisant persister des stéréotypes de genre de la petite enfance à l’entrée dans l’âge adulte : par exemple 18 % des lycéens choisissent la spécialité sciences de l’ingénieur, contre 3 % de lycéennes. Idem pour la spécialité informatique et sciences du numérique, sélectionnée par seulement 5 % de lycéennes, alors qu'ils sont 11 % de garçons à faire ce choix.

La mission d’information relève les insuffisances en matière d’égalité des chances entre les hommes et les femmes qui doivent et peuvent être corrigées, telles que l’absence de rôle modèle féminin qui constitue un frein majeur lors de l’orientation académique, le champ lexical genré des parents et éducateurs lorsqu’ils s’adressent aux enfants qui alimentent les stéréotypes de genres ou encore la stigmatisation des femmes qui transgressent les codes de genre (pouvant provoquer la mésestime de soi, l’autocensure et la victimisation des femmes).

Les rapporteurs soulignent que “les récentes réformes de l’éducation nationale, et notamment la réforme des lycées de 2019-2020, mais aussi les mouvements sociaux comme Metoo ont ouvert la voie à des mesures innovantes“.

Un travail en profondeur “indispensable“ de l'ensemble des acteurs de la société

Les députés ont tout d'abord édifié comme priorités la lutte contre la mise en place des stéréotypes de genre dès le plus jeune âge, en informant les parents des mécanismes inconscients de l’éducation genrée. Ils souhaitent la refonte des manuels scolaires en favorisant notamment le lien entre les éditeurs de manuels scolaires et le Conseil supérieur des programmes. Ils veulent voir améliorée la formation et la sensibilisation de la communauté éducative lors de la formation initiale mais aussi en continu, afin de repenser les attitudes des formateurs à l’égard des élèves. L’orientation scolaire doit être repensée afin de promouvoir une connaissance adéquate des métiers et remédier au déficit de filles dans les filières scientifiques et mathématiques. Enfin, ils aimeraient encourager l’expression des enfants et des adolescents pour inciter au respect mutuel et à la prévention du cyberharcèlement sur les réseaux sociaux, ainsi qu’à l’amélioration de l’éducation sexuelle.

Dans ses recommandations, la mission propose de mettre en place des seuils positifs, imposant une progression régulière d’ici l’horizon 2030 du sexe le moins représenté jusqu’à atteindre un objectif de 40 % dans les formations pour les métiers de la petite enfance, ainsi que dans les formations d’enseignants du primaire et du secondaire. Elle souhaite que soient revalorisés les rémunérations et le déroulement de carrière des professionnels de la petite enfance, des enseignants et du personnel scolaire. De plus, un module de formation obligatoire de sensibilisation aux stéréotypes de genre, comportant une partie théorique et une partie pratique, avec notamment des mises en situation, devrait être introduire au sein des enseignements du master MEEF pour les professeurs des écoles et du second degré. La mission recommande, dans l’enseignement secondaire, de “mettre en place des seuils positifs pour tous les enseignements de spécialité en classes de première et de terminale, avec un objectif de progression sur cinq ans permettant d’atteindre une proportion de 40 % du sexe le moins représenté dans l’enseignement concerné“.

Sa recommandation n°18 consiste à “étendre le dispositif des référents égalité, en place dans les établissements de l’enseignement secondaire, à l’ensemble des écoles élémentaires“.

Karine Lebon et Gaël Le Bohec demandent également une action sur les manuels scolaires, en créant un label égalité pour les manuels scolaires, en créant une liste d'ouvrages de littérature de jeunesse pour le cycle 2 (CP, CE1, CE2) “albums et des livres illustrés mettant l’accent sur l’égalité entre les filles et les garçons et déconstruisant les stéréotypes de genre en matière d’aptitudes, de goûts et de rôles“ (recommandations n °8 et 9). Ils souhaitent enfin que l’ensemble des communes de France fournisse aux élèves de primaire des manuels de lecture récents, conformes aux dernières réformes de programmes (recommandations n °6).

Un projet global pour l'UNSA

Dans un communiqué également publié le 8 octobre, l'UNSA-éducation salue “des propositions qui vont dans le bon sens, en proposant de lutter en profondeur contre les stéréotypes de genre dès le plus jeune âge“. Il milite cependant pour “une approche plus globale et intégrée de l’égalité à l’École : pas seulement dans l’orientation, mais aussi dans l’enseignement et la formation des professionnels de l’éducation“.

Pour le syndicat, les mesures annoncées pour renforcer la mixité de certaines spécialités et de certaines séries (avec objectifs chiffrés et bourses spéciales) “sont ambitieuses, mais elles ne peuvent être efficaces qu’en étant élargies à l’ensemble des niveaux et des filières où une réelle mixité filles-garçons n’est pas présente“. L'UNSA-éducation considère l'égalité filles-garçons comme une question bien plus large que l'orientation, appelant “tous les personnels, quel que soit leur métier, à s’impliquer dans la réduction des inégalités“.

Il poursuit : “la moitié de l’humanité doit enfin trouver sa place dans les programmes scolaires, qui ne sont évoqués qu’à la marge dans les premières propositions, alors que les femmes sont quasiment absentes dans les nouveaux programmes de sciences et d’histoire. La formation des enseignant.es doit aussi faire partie de ce plan d’ensemble : la pratique professionnelle doit intégrer, au quotidien, la question du genre, pour ne pas être discriminante et pour construire une véritable culture de l’égalité entre les filles et les garçons“.

Enfin, il se réjouit de la “la mise en œuvre d’une de ses propositions, la création d’un label ‘égalité filles-garçons‘ pour les établissements qui mettront en œuvre une approche globale contre les stéréotypes et les inégalités de genre“, une des mesures que souhaite prendre le ministère de l'Education, qui a dévoilé le 6 octobre un plan d’actions en la matière. Celui-ci vise “notamment à atteindre 30% au moins de mixité d’ici 5 ans dans les enseignements de spécialité de la voie générale, les séries technologiques et les filières post-baccalauréat“.

Le rapport de la mission d'information ici

Le communiqué de l'UNSA ici

Le communiqué du ministère ici

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