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Une éducation physique "affaiblie", des annonces au contenu incertain : le SNEP-FSU dresse le bilan

Paru dans Scolaire le dimanche 19 septembre 2021.

Situation de l'EPS, "aisance aquatique", relations avec les clubs, protocole sanitaire, manque de postes, ou de contractuels pour occuper les postes..., Nathalie François, secrétaire nationale du syndicat national de l'éducation physique (SNEP-FSU), en charge du sport scolaire, répond à ToutEduc à l'occasion de la conférence de presse de rentrée.

ToutEduc : Vous décrivez l'Education physique et sportive comme “très affaiblie“ en cette rentrée, pour quelle raison ?

Nathalie François : Nous avons vécu avec les deux années qui viennent de s'écouler sous le signe du Covid-19. Beaucoup d’élèves ont été en grande difficulté, n'ayant pas de cours en présentiel, et devant pratiquer des exercices en ligne. Il est pour eux difficile de reprendre d'une part, et d'autre part, il manque des profs d'EPS à certains endroits pour assurer les horaires obligatoires. Exemple de l'Ariège où il y avait 98h manquantes sur le département en début d'année (équivalent de 32 classes) pour un département qui ne compte "que" 23 établissements du second degré ! On est à plus de 913 heures non assurées dans une enquête que nous avons menée sur 1200 établissements du 2nd degré. Il y a 7713 établissements en France, avec une règle de 3 on serait à 5 868 heures d’EPS non assurées. Nous aurions souhaité qu'avec la situation perturbée par le Covid-19 et encore aujourd'hui, il puisse y avoir des profs supplémentaires de façon à dédoubler les classes. des demi-jauges par exemple. Nous avons de nouveau de gros effectifs, parfois jusqu'à 38 élèves. En natation par exemple, nous ne pouvons pas gérer tous les besoins, et pour nous c'est une faiblesse.

ToutEduc : Êtes-vous satisfaite du protocole sanitaire mis en place en cette rentrée ?

Nathalie François : Nous sommes en difficulté, car le sport scolaire (UNSS et USEP) n'est pas pris en compte dans le protocole. Nous devons limiter le brassage des élèves par niveau de classe, ce qui est un non sens. Par exemple si un établissement dispose d'un équipement de tennis de table une heure par semaine, nous ne pouvons pas mélanger des sixièmes avec des cinquièmes, des troisièmes, donc les élèves ne vont pouvoir venir jouer que toutes les 4 semaines. Ça n'a pas été pensé et on n'a pas de réponses claires du ministère. A l'UNSS (Union nationale du sport scolaire, pour le second degré, ndlr) nous avons perdu 350 000 élèves l'année dernière, soit une chute de 32 %. Et si ça ne bouge pas nous allons encore perdre des pratiquants. Nous sommes en difficulté car les consignes ne sont pas claires, notamment sur les rencontres sportives qui sont autorisées mais pas avant novembre pendant que les clubs, eux, ont repris leurs compétitions.

ToutEduc : Le ministre a d'ailleurs récemment décidé de lancer la mesure “1 club 1 école“, y êtes-vous favorable ?

Nathalie François : Nous avons toujours été favorables à ce qu'il y ait des ponts entre les clubs et les écoles, ce qu'il faut voir c'est à quelles conditions. Pour nous, c'est toujours ambigu dans le discours. On ne comprend pas vraiment ce qui se passe car le ministère signe des conventions avec plein de fédérations, à l'UNSS c'est la même chose.. Nous, nous souhaitons des conventions d'entraînement par exemple, mais que cela reste quelque chose de séparé, qu'on ne confonde pas le sport en club et l'EPS. Cela ne peut pas remplacer l'EPS. Il y a déjà tout ce qu'il faut à l'école, plein de dispositifs existent, mais ne fonctionnent pas assez. Par exemple nous plaidons pour plus de sections sportives, avec l'idée d'une section sportive dans tous les collèges de France.

ToutEduc : Bien que le ministère ait annoncé avoir déboursé 17 millions d'euros cette année pour son programme “aisance aquatique“, le SNEP-FSU demande plus de moyens. Pourquoi ?

Nathalie François : Premièrement, nous souhaitons des constructions de piscines, mais pour cela il faut que l'Etat aide les collectivités à les financer. Il devrait donner 30 % du budget pour la construction d'un équipement sportif, les 70% restants se répartissant entre les conseils départementaux et régionaux d'un côté, et les villes de l'autre côté. Les financements doivent être mieux partagés. Nous demandons la création de 1000 bassins, et avec la fédération française de natation nous sommes d'accord sur ce chiffre. Maintenant il faut le faire. Actuellement à Marseille, il y a 28 % des piscines (4 sur 14) qui sont fermées car elles sont trop vieilles et sans personnels.

Un autre problème est la question de la pratique. Les classes qui vont le plus à la piscine sont les sixièmes et peu les autres. Il faut que l'on ait plus de créneaux pour aller à la piscine, et traiter cette question du savoir nager. Pour nous il faut déjà apprendre à rentrer dans l'eau dans des vrais bassins profonds. Si c'est juste pour faire tremper les élèves dans des bassins mobiles avec 40 cm d'eau, ça n'est pas la peine.

ToutEduc : Que pensez-vous de l'opération “30 minutes d'activité physique par jour“ pour les élèves d'écoles élémentaires, une mesure qui doit se généraliser en 2024 ?

Nathalie François : 30 minutes c'est bien... pour gigoter. Nous ne savons pas vraiment ce qu'ils vont mettre dedans, les contenus ne sont pas définis, le lieu où on les pratique non plus. Ce n'est pas sérieux. Nous estimons qu'il vaudrait mieux 4 heures d'EPS par semaine à tous les niveaux de toute la scolarité, d'ailleurs toutes les enquêtes montrent que dans les faits on est à moins de deux heures de pratique dans le 1er degré. Pourquoi l'Education nationale ne fait-elle déjà pas en sorte qu'on ait trois heures réelles d'EPS ? Et pourquoi pas envisager simplement d’augmenter l’horaire EPS ? Il y a aussi un problème d'infrastructures sportives.

ToutEduc : Avez-vous des échos de difficultés de recrutement, notamment chez les contractuels étudiants (ou "contractuels alternants") ?

Nathalie François : A cette rentrée il y a 9000 contractuels étudiants dans le 1er et 2nd degré. Nous ne connaissons pas le nombre exact mais c’est en EPS qu’il y a eu le plus de demandes. Certains ont refusé la proposition qui leur a été faite car les postes proposés sont trop éloignés du centre de formation et/ou de leur lieu de résidence. Par exemple dans le Morbihan, on a proposé à un contractuel étudiant un poste à 206km, cela lui fait 2 aller-retour par semaine soit 824km ! D’autre part, leurs contrats prévoient que, dans le second degré, ils consacrent 3h à l'UNSS, mais uniquement pendant le 1er trimestre puisque après, ils doivent se consacrer à leur master. Que se passera-t-il après Noël pour les associations sportives ? Il y aura un collègue de moins pour encadrer les élèves, c’est autant moins d’offre de pratique qui sera proposée aux élèves.

Le SNEP-FSU dénonce également la suppression de 771 postes de titulaires en EPS en 4 ans, et demande un plan pluriannuel de recrutement d'au moins 1500 postes par an pendant au moins 6 ans. Il estime d'autre part que la totalité de la formation des enseignant·es doit être revue, étudiée sur une temporalité plus longue afin d'ouvrir la porte à une nécessaire élévation des qualifications nécessaires pour répondre aux besoins d'aujourd’hui.

Le site du SNEP-FSI ici

Propos recueillis par E. Fontaine, relus par Nathalie François.

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