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Ouvrir une école hors contrat nécessite de prouver scrupuleusement 5 années d'exercice au jour de validation du dossier (Tribunal administratif de Grenoble)

Paru dans Scolaire le lundi 06 septembre 2021.

Le tribunal administratif de Grenoble a rejeté mercredi dernier la requête de l'association UEPM (Union pour l’enseignement privé musulman) de suspendre la décision de la rectrice de l’académie de Grenoble (25 août 2021), qui s'opposait à l’ouverture de l’établissement scolaire privé hors contrat “Fourqan“ à Bourgoin-Jallieu.

Selon cette association, au travers d'une requête du 27 août, il s'agissait d'une “condition d’urgence“ dès lors que la rentrée scolaire était imminente (le 2 septembre, soit à 8 jours de la rentrée scolaire, ndlr) et que de ce fait “ont été prises de nombreuses inscriptions d’enfants soumis à l’obligation de scolarité“. Elle affirmait également qu'il “est porté une atteinte grave à la liberté d’enseignement et à la liberté d’instruction“ et elle considérait cette atteinte “manifestement illégale dès lors que la décision est intervenue plus de trois mois après la déclaration d’ouverture de l’établissement“ (le 14 mai) et “fondée de façon erronée sur la circonstance que sa directrice n’a pas exercé pendant au moins cinq ans les fonctions“ requises.

En date du 30 août, Hélène Insel, rectrice de l’académie de Grenoble a rejeté cette requête, soutenant que la condition d’urgence à statuer à très bref délai n’est pas remplie dès lors qu'aucune information sur la date d’ouverture de l’école et sur la date de la rentrée scolaire n'est donnée, “la liste des élèves préinscrits n’établissant pas que l’ouverture de l’école est prévue à très brève échéance“, que “la décision portant opposition à l’ouverture d’un établissement n’ayant jamais accueilli d’élèves, il appartenait à l’association d’attendre l’expiration du délai d’opposition avant de procéder à des préinscriptions, un établissement privé hors contrat n’étant pas soumis au respect du calendrier scolaire“, que l’association ne peut se prévaloir du respect de l’obligation scolaire qui s’impose aux parents des enfants qui pourront être inscrits dans d’autres écoles, et que la suspension demandée serait sans effet “dès lors que la décision d’opposition à l’ouverture de l’école prise par le procureur de la République de Bourgoin-Jallieu le 25 août 2021 n’a pas été contestée“.

Elle ajoutait que l’association n’établit pas en quoi la liberté de l’enseignement serait méconnue et qu'elle “ne peut se prévaloir de la liberté d’instruction qui ressort uniquement d’un droit des parents“, que la décision d’opposition n’est pas intervenue tardivement car le délai de trois mois dont dispose l'administration pour faire opposition ne commence à courir qu’à compter de la réception d’un dossier complet.

Pour Hélène Insel enfin, la personne désignée comme directrice ne justifiait pas de cinq années d’exercice dans les fonctions requises car les pièces produites ne permettent d’établir avec certitude son ancienneté que depuis le 1er septembre 2017, que le délai de cinq ans est apprécié à la date à laquelle l'administration a réceptionné les documents (14 mai 2021, date de réception de l’attestation de l’employeur) et non pas à la date d’ouverture de l’établissement, que l’ancienneté de ce contrat est de trois ans, huit mois et quatorze jours, les autres fiches de salaire étant “dépourvues de valeur probante“, ces fiches n’établissant qu’une ancienneté effective d’un mois et vingt jours. Ainsi informé de la remise en cause de l’authenticité des documents produits, le procureur de la République de Bourgoin-Jallieu aurait alors confirmé cette analyse et fait opposition à l’ouverture de l’école.

En réponse à ces éléments, le 2 septembre le Tribunal administratif de Grenoble a considéré que dès lors que l'administration avait informé l’association du caractère incomplet du dossier déposé, le point de départ du délai de trois mois prévu par les dispositions précitées “n’a pas commencé à courir à la date de dépôt de sa déclaration“, le 14 mai 2021, comme le soutient l’association UEPM école Fourqan, et qu'au contraire, la décision d’opposition, prise moins de trois mois après la date à laquelle la rectrice a constaté la complétude du dossier (le 8 juillet, ndlr), ne méconnaît pas ces dispositions.

Il rappelle que nul ne peut diriger un établissement d'enseignement scolaire privé “s'il n'a pas exercé pendant cinq ans au moins des fonctions de direction, d'enseignement ou de surveillance dans un établissement d'enseignement public ou privé d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen“.

Le Tribunal établit de plus qu'il “ne résulte pas de l’instruction que l’association ait produit avant l’intervention de la décision attaquée des justificatifs de l’exercice effectif de fonctions d’enseignement pour la période postérieure“. Ainsi cet exercice serait comptabilisé du 1er septembre 2016 (contrairement à la rectrice qui le commençait au 1er septembre 2017) au 28 mai 2021, date de complétude du dossier, le tribunal précisant que “la durée de cinq ans à compter de la prise de fonction de l’intéressée dans cette école n’est écoulée qu’au 30 août 2021“.

Enfin, selon lui, si l’association fait valoir l'exercice de fonctions d’enseignement dans une autre école de janvier à mai 2014, il n’est donné aucune précision sur la nature de celui-ci alors qu’il ressort des fiches de salaires que l’activité exercée avant que l'intéressée obtienne son diplôme de maîtrise en métiers de l’enseignement en 2016, “ne correspondait qu’à un temps partiel de peu d’heures“.

Dans ces conditions, “l’opposition formée par la rectrice à l’ouverture de l’école Fourqan au motif que la personne désignée comme directrice ne remplit pas la condition prévue au I de l’article L. 914-3 du code de l’éducation n’apparaît pas manifestement illégale“. Il en résulte, conclut-il, “que les conclusions de l’association UEPM Ecole Fourqan aux fins de suspension de la décision de la rectrice de l’académie de Grenoble du 25 août 2021 doivent être rejetées. Il en est de même, par voie de conséquence, de ses conclusions relatives aux frais liés à l’instance“ (2400 euros étaient demandés).

L'ordonnance N° 2105757 ici

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