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TICE et éducation: Sortir de l'utopie, selon Serge Pouts-Lajus d'Education et Territoires.

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Culture le mercredi 02 juin 2010.

 On ne remplacera pas "l'école par des cyberclasses et les cours magistraux par des jeux vidéo",  affirme Serge Pouts-Lajus d’Education & Territoires, dans un article d'Internet Actu daté du 28 mai

Serge Pouts-Lajus réagit à un essai de Jean Salmona, repris par Internet Actu,  détaillant le dispositif d’apprentissage basé sur les TICE qui pourrait "avantageusement" remplacer l’actuelle organisation scolaire. L'utilisation du numérique est présentée comme levier pour répondre à l’hétérogénéité des capacités d’apprentissages des élèves. Pour initier l’élève à un sujet donné, avant un apprentissage de la leçon par jeux vidéo, un logiciel nommé "Sirius" proposera des "cours" sous forme de séquences vidéo. L’élève pourra "rejouer une séquence" aussi souvent qu’il le souhaitera. Dans cet univers prospectif, les élèves pourront choisir leurs tuteurs selon des critères de séduction, soit "leur capacité à garder un élève sous leur charme", et les apprentissages ne dépasseront pas 15 minutes. Le scénario parfois provocateur proposé par Jean Salmona se veut une base de discussion pour adapter les principes de l'éducation à la modernité.

"Aucune preuve de la capacité des ordinateurs à améliorer l’efficacité de l’éducation n’a jamais été apportée", considère Serge Pouts-Lajus, à qui, a fortiori, le projet d’une refonte brutale de l’organisation scolaire semble "ridicule et dangereux": "Ridicule, car on ne change pas une forme sociale institutionnalisée sur la base d’un raisonnement, (...) Dangereux et antidémocratique, car un tel projet alimente un courant mondialisé de déstabilisation des institutions et des traditions (...)". Il n'en reconnait pas moins la nécessité de dessiner "un horizon lointain sans céder à la tentation de l’utopie", sans non plus se limiter à l’invocation de la capacité des enseignants à trouver eux-mêmes les modes d’exploitation des TICE.

Serge Pouts-Lajus souligne son attachement à la "forme institutionnalisée" de l’éducation et propose un emploi des TICE détaché d'une "volonté de rupture radicale" avec cette forme. Il réaffirme l'ordinateur comme outil de travail: "La qualité proprement éducative du travail des élèves, c’est l’enseignant qui en est le garant. (...) Les qualités du travail avec ordinateur tiennent moins à l’objet lui-même qu’à la nature des projets réalisés et qui sont, pour le dire en deux mots, des projets de production et de diffusion de biens culturels originaux".

Il affirme les TICE comme un instrument bénéfique "en matière de socialisation". Le numérique, "grâce à ses propriétés spécifiques d’intangibilité et de capacité au traitement automatique", formerait une base favorable à des projets collectifs. Le numérique indiquerait ainsi  à l’école une voie "qui pourrait lui permettre de renouer avec l’objectif de socialisation qui lui reste assigné."

Troisième point: Serge Pouts-Lajus valorise les TICE comme une contribution à l'"articulation du local sur le global", qui rejoint aussi la mission de l'école. "L’éducation est une entrée dans la culture, laquelle dépasse toujours et de très loin, les limites du village." Le réseau incarnerait ainsi l’idéal de Jean-Jacques Rousseau d’une éducation "s’alimentant sans intermédiaire aux réalités du monde". Le rôle de l'enseignant comme guide est néanmoins réaffirmé, tout comme la nécessité d'ancrer  matériallement et humainement les pratiques au niveau local. Cela demande d'"achever le processus de décentralisation dans lequel (l'école) s’est engagée il y a vingt-cinq ans et auquel elle continue de résister. A ces conditions, les TICE pourront s’inscrire utilement dans son horizon", conclut S. Pouts-Lajus.

 

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