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Régionales : le bilan et les perspectives en matière d'orientation annoncées par la liste de C. Delga (Occitanie)

Paru dans Scolaire, Orientation le vendredi 18 juin 2021.

Alors que la liste PS emmenée par Carole Delga en Occitanie est candidate aux régionales pour un nouveau mandat, Emmanuelle Gazel, sa vice-présidente en charge de l'emploi, la formation professionnelle et l'apprentissage, dresse pour ToutEduc un bilan des actions et mesures mises en œuvre sous ce premier mandat en matière d'information sur l'orientation et les orientations portées par cette liste si celle-ci venait à réaliser un deuxième mandat.

ToutEduc : La loi "pour la liberté de choisir son avenir professionnel" prévoyait le transfert aux Régions de l'information sur l'orientation. L'auriez-vous votée ?

Emmanuelle Gazel : Oui, nous aurions voté pour. Et nous serions même allés plus loin et aurions donné l'entièreté de cette compétence aux Régions. Parce que ce champ doit se structurer d'un bloc, forcément en lien avec à la fois l'éducation, donc les lycées, et l'enseignement supérieur sur lequel nous agissons également, mais aussi avec la formation des demandeurs d'emploi et le volet développement économique, axe sur lequel nous sommes stratège et à l'action. Pour toutes ces raisons, la Région était évidemment bien placée pour reprendre l'entièreté de la compétence orientation parce qu'elle possède l'ensemble de la vision de cette chaîne autour de l'emploi. Or, cette loi désorganise un bout de ce continuum en enlevant aux Régions la compétence sur l'apprentissage. C'est fortement dommageable car nous recherchons toujours la complémentarité entre les acteurs et nous retirer l'un des dispositifs enlève de la cohérence et de la visibilité sur un domaine qui n'est déjà pas simple d'accès pour les usagers. Quand on est moteur et stratège sur l'ensemble des dispositifs, on peut donner une plus grande cohérence et lisibilité sur l'ensemble des dispositifs et des métiers. Ce à quoi s'ajoute le critère de proximité : c'est dans la proximité que l'on accompagne le mieux les habitants.

ToutEduc : Quelle analyse faites-vous de la mise en œuvre par les Régions et par l'Éducation nationale de ce transfert ? Comment se positionne la Région Occitanie sur ce plan ?

Emmanuelle Gazel : J'étais à la commission emploi-formation-orientation à Régions de France. Je pense que toutes les Régions avaient envie de s'emparer de cette compétence. Et pas mal d'innovations ont été faites. La plus-value des Régions, c'est cette logique de continuum qui va de l'éducation jusqu'au soutien au développement économique. De notre côté, nous avions déjà mis en place beaucoup d'actions avant la loi. C'était une volonté forte, parce que l'orientation contribue à la lutte contre les déterminismes sociaux et territoriaux. Nous voulions vraiment ouvrir le champ des possibles à tous les jeunes, toutes les familles, tous les demandeurs d'emploi, afin qu'ils ne restent pas uniquement dans les métiers connus de leur entourage. Nous avons d'ores et déjà ouvert deux maisons de l'orientation, à Toulouse, sur deux sites, et Montpellier, qui proposent des outils, des ateliers d'orientation, des interventions de partenaires qui viennent présenter des métiers, des jobs dating... Cette offre se décline de manière un peu plus "allégée" dans les départements. Il y a 17 maisons en tout, et au moins une dans chaque département, qui permettent d'avoir accès à ces outils et de rencontrer des acteurs de l'économie locale. Autre gros "morceau", notre site internet meformerenregion.fr, qui existait déjà mais s'adressait auparavant davantage aux demandeurs d'emplois. Il s'adresse aujourd'hui à tous les publics, y compris les collégiens. On y donne à voir l'ensemble de la chaîne et du parcours d'orientation pour aider à la décision. Il y a les infos métiers de type fiches ROME ou fiches ONISEP. Il y aura à terme toute l'offre de formation régionale et nous travaillons également avec Pôle Emploi pour que, chaque fois que l'on va choisir un métier, on accède à toutes les informations actualisées (combien ont été recherchés par les entreprises sur les 6 derniers mois, quel est le niveau de rémunération moyen, quelles sont les perspectives de carrière, les compétences particulièrement recherchées par les entreprises sur les dernières offres d'emploi publiées...). Si le jeune trouve ça intéressant, il peut basculer sur l'offre de formation. Tout cela, c'est de l'information concrète, localisée et actualisée, ce qui est assez nouveau dans le monde de l'orientation. Même si le site est intuitif, des animateurs accompagnent à l'usage des outils qu'il propose dans les maisons de l'orientation. Si nous gagnons un autre mandat, nous avons prévu de déployer encore cet accompagnement avec, sur chaque territoire, un chargé de mission orientation qui contribuera à l'animation, aux journées infos métiers, etc., à accompagner à l'utilisation des outils numériques.

ToutEduc : Quelles mesures projetez-vous de mettre en place si votre liste est réélue à la Région ?

Emmanuelle Gazel : Nous sommes en train d'élaborer des outils qui s'appuient sur l'intelligence artificielle, qui offre des perspectives assez intéressantes comme avoir accès à l'information en temps réel. Nous avons développé un dispositif "Parcours Emploi Personnalisé", qui s'adresse à tous les publics et pas seulement aux jeunes, disponible sur meformerenregion.fr : on renseigne un certain nombre de champs pour élaborer un profil - on peut préciser son parcours, ses aptitudes, ses envies, ce que l'on ne souhaite pas faire comme par exemple travailler en horaires décalés... - et ensuite l'IA fait des propositions de secteurs d'activités, métiers qui matchent à 80 %, 60 %, 10 %... La personne peut corriger certaines compétences détectées par l'IA si elle juge que le pourcentage est trop élevé ou trop faible, peut supprimer des secteurs qui ne l'intéressent pas..., ce qui entraîne des modifications sur les métiers qui peuvent correspondre, etc. C'est un bel outil, à la fois très facile d'accès mais aussi très puissant et qui permet d'aller jusqu'au bout de la chaîne puisqu'il permet ensuite de renvoyer vers l'offre de formation et vers l'offre d'emploi en région, les données étant là aussi fournies par Pôle Emploi.

Nous allons faire un autre gros travail, qui a démarré mais a été quelque peu perturbé par le confinement, sur la recherche de stages. L'idée, c'est d'accompagner la mise en relation des jeunes avec les entreprises, dès le stage de 3e. Même si ce n'est pas notre compétence, c'est une volonté forte de la présidente car ce stage constitue le premier contact avec le monde de l'entreprise. Si on a un joli réseau d'entreprises dans son entourage, ça marche, mais pour les familles qui ont moins de réseau, parfois c'est le premier échec ! Et ce n'est pas acceptable car il y a un sentiment de déclassement insupportable pour les familles. Notre volonté, c'est de sensibiliser de manière forte les entreprises que nous accompagnons au niveau du développement économique à l'accueil de stagiaires. Avant, nous avions un réseau de développeurs de l'apprentissage, constitué d'une cinquantaine d'ETP (équivalents temps plein), réseau qui est dorénavant mis à disposition pour aller chercher ces stages. Et nous pouvons tout à fait imaginer, si les incitations à embaucher des stagiaires ne suffisaient pas, de conditionner les aides régionales à l'accueil de stagiaires. Cela fait partie des sujets sur lesquels nous réfléchissons.

ToutEduc : La loi permet aux collectivités de faire entrer dans les établissements scolaires des représentants des métiers. À qui ce choix et la définition de la stratégie d'un établissement en matière d'orientation, reviennent-ils ?

Emmanuelle Gazel : Nous avons lancé des appels à projets pour permettre aux professionnels, consulaires, branches professionnelles, fédérations, tous les réseaux... de pouvoir proposer des actions - avec la volonté aussi de sortir un peu des sentiers battus - pour qu'ils interviennent dans les établissements scolaires, viennent présenter la réalité de leurs métiers. Nous avons démarré le dispositif l'année dernière et l'avons massivement déployé cette année. 250 actions ont été menées en 2019-2020 et 144 établissements, collèges et lycées ont été concernés, et 1300 actions ont été déployées sur 2020-2021. Au premier décembre nous avions déjà engagé 650 actions sur les 1300 programmées, actions qui avaient déjà concerné plus de 15 000 élèves. Nous avons travaillé avec les deux rectorats de la région pour avoir un mode opératoire qui soit le même partout. Ce sont ensuite les recteurs qui ont organisé le déploiement dans les établissements. Ces derniers n'ont pas été associés à l'élaboration de l'appel à projets.

ToutEduc : Comment voyez-vous l'articulation entre la Région et l'ONISEP ? Les Régions ont-elles les moyens de faire à leur niveau le travail de documentation que faisait l'ONISEP ?

Emmanuelle Gazel : On a un peu un positionnement au milieu du gué car la législateur a partagé cette compétence. L'ONISEP continue à faire des publications, ce qui ne va pas dans le sens d'une simplification. Pour nous, le moyen de nous positionner est de "régionaliser" ces informations en parlant de secteurs d'activités particulièrement porteurs en Occitanie et de l'offre de formation régionale. C'est une information de proximité. Nous regrettons que le législateur ne soit pas allé au bout en nous donnant l'entièreté de la compétence. Et avec des moyens. Car je rappelle que pour le renforcement de la compétence orientation aux Régions, la seule compensation que nous ayons eue, ce sont quelques ETP pour la réalisation de ces publications. Tout ce qui relève des maisons de l'orientation, des appels à projets... se fait sans moyens dédiés. Cela relève d'une politique volontariste menée avec les moyens de la Région.

ToutEduc : Cette loi suppose que la recherche d'une adéquation "marché de l'emploi - offre de formations - orientation" est possible, voire souhaitable. N'y a-t-il pas un risque de "régionaliser" le recrutement des jeunes ?

Emmanuelle Gazel : Nous ne percevons pas vraiment ça comme un risque. De plus, après le bac, les jeunes cherchent souvent à rester à proximité. Nous créons évidemment des passerelles entre les régions et nous avons une volonté d'accompagner vers l'ouverture, d'où des actions menées également dans le cadre d'Erasmus+ par exemple. Notre ADN en Occitanie, pour l'orientation comme pour la formation, c'est vraiment l'accompagnement des publics les moins autonomes, les plus fragiles sur le marché du travail. Quand on arrive à donner les outils à ces personnes, elles sont ensuite autonomes quel que soit l'endroit où elles résident. Après, la difficulté que nous pouvons imaginer dans la régionalisation de ces compétences, c'est qu'il puisse y avoir des Régions qui fonctionnent avec des niveaux d'implication et de volonté différents. En Occitanie, le budget emploi-formation-orientation n'a pas baissé, et nous sommes l'une des très très rares Régions qui ait fait ce choix.

Propos recueillis par Camille Pons

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