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L'écologie “éducative“ à marche forcée ? (le rapport de Brune Poirson)

Paru dans Scolaire le lundi 14 juin 2021.

L'ancienne députée Brune Poirson, désormais directrice du développement durable chez Accor (voir ici) a remis le “rapport de la mission éducation au développement durable“ que lui avait confiée le Premier ministre.

L’éducation au développement durable est “fortement réaffirmée comme une éducation transversale, à laquelle contribuent tous les enseignements, tout au long de la vie scolaire“. Elle précise le contexte, dans lequel “depuis la rentrée 2020, les classes de collège et de lycée doivent élire des 'éco-délégués', les classes de CM1 et CM2 sont également encouragées à le faire. Dans ce dispositif éducatif, les élèves sont considérés comme des acteurs centraux de la transition écologique. En plus des délégués classiques, il y aura désormais un éco-délégué dans chaque classe de collège et lycée. Ce dispositif s’était développé au fil des années dans un nombre croissant d’établissements, le ministère de l’Education nationale a décidé de le généraliser. C’est l’une des huit mesures retenues pour renforcer l’écologie au cœur de l’école.“

Brune Poirson précise que Jean-Michel Blanquer aurait souhaité qu'elle consacre l'essentiel de sa mission à “un travail d’animation et de mobilisation des rectorats afin d’aider au déploiement et à la pérennisation du dispositif des éco-délégués“, ce qu'elle fera en rencontrant 31 recteurs et trois vice-recteurs d’Outre-Mer, mais également en sollicitant le CSEN. Un groupe de travail “Climat, biodiversité et développement durable“ aurait été créé pour “identifier les points forts et les difficultés constatés et proposer des recommandations pour améliorer l’éducation au développement durable“.

Voici quelques-un des éléments dont rend compte le rapport.

Dans le chapitre intitulé “Aller au-delà des éco-gestes“, il est dit que “plusieurs catégories de compétences à propos de l’éducation au développement durable devraient être acquises par les élèves. Tout d’abord des compétences techniques et scientifiques qui permettent de résoudre des problèmes (il est important que les élèves soit en mesure de maîtriser des concepts tels que celui de biodiversité, de système climatique, etc.) mais également d’acquérir des notions relatives à la gestion des risques.“

Une autre section souhaite “donner une place plus importante à l’observation“. Brune Poirson explique que “de nombreux éco-délégués, nous ont révélé se sentir un peu seuls dans leur combat en faveur de l’environnement. Ils déplorent le fait que les autres élèves ne se sentent souvent pas concernés par les questions environnementales. Les éco-délégués se sentent « à part », comme s’ils étaient les seuls à s’intéresser à la lutte contre le réchauffement climatique et à vouloir agir en faveur de la transition écologique. Ils nous ont confié être dubitatifs sur leur capacité à emmener d’autres élèves vers des actions en faveur de l’environnement.“

“Il est essentiel, ajoute-t-elle, de mettre les élèves en contact avec les conséquences concrètes du réchauffement climatique et d’insister sur l’observation. C’est en partant du « terrain », de la réalité physique que les élèves pourront appréhender et saisir pleinement les sujets liés à la transition écologique.“

L'ancienne députée souhaite que cette observation soit mise “au cœur de la démarche des éco-délégués“. Selon elle, “des études révèlent que les approches didactiques de l’éducation au changement climatique ont été relativement inefficaces pour influencer les attitudes et comportements des élèves (d’après Roussel & Cutter par exemple). Par ailleurs, l’acquisition de connaissances scientifiques est cruciale mais pas suffisante pour entrainer un changement de comportements (d’après Meira).“

De plus, permettre aux éco-délégués (et aux élèves plus largement) de se rendre sur le terrain afin d’observer leur permet de toucher du doigt l’approche scientifique qui repose sur une phase d’observation. Elle permet également de mettre l’élève en situation active face à l’acquisition de connaissances. Par ailleurs, elle peut susciter des vocations et déclencher des passions, améliorant la santé mentale des élèves. Cependant, de nombreux enseignants ont regretté le fait que les sorties scolaires centrées sur la découverte du monde naturel sont extrêmement complexes et lourdes à organiser. Il serait utile de mener un travail avec les collectivités territoriales et les rectorats afin d’identifier si et comment pourrait se déployer une culture de terrain et de l’observation. C’est un socle indispensable à une éducation au développement durable de qualité.

Pour les enseignants, des dispositifs souples de formation seraient envisagés : “les professeurs et enseignants bénéficient souvent de formations très solides et organisées rigoureusement plusieurs mois à l’avance. De nombreuses demandes sociétales d’éducation à des enjeux transversaux pèsent sur les professeurs (égalité femmes/hommes, lutte contre la radicalisation, respect de l’autre, etc). Ainsi, s’il serait souhaitable qu’ils puissent tous bénéficier de formations au développement durable, dans les faits, il faudrait apporter un peu de souplesse, pour ne pas alourdir un programme déjà chargé et un emploi du temps très chargé. Et cela serait difficile à mettre en œuvre dans un futur proche. Une alternative pourrait donc être d’organiser sans attendre des évènements (virtuels ou en présentiel) qui permettraient de nourrir les professeurs sur le sujet du développement durable sans leur imposer un emploi du temps rigide, ni les laisser se former “seuls“ sur leur temps libre. Ainsi par exemple, il pourrait être envisageable de lancer un cycle de conférences sur l’éducation au développement durable, des rencontres avec des acteurs importants du monde de la protection de l’environnement qui pourraient avoir lieu une fois par mois par exemple, et qui pourraient être largement ouvertes au réseau des référents et chefs de mission et inscrite au Programme National de Formation.“

Enfin, le rapport souligne que “certains enseignants ont également signalé qu’ils se sentaient parfois un peu démunis pour répondre à certaines questions de leurs élèves et éco-délégués. Ils ont également insisté sur le fait qu’ils n’ont pas toujours le temps de mettre à jour leurs connaissances en fonction des évolutions législatives, scientifiques ou institutionnelles de certains sujets liés à la transition écologique. Il peut être compliqué pour eux d’intégrer des savoirs évolutifs qui ne sont pas stabilisés et qui ne peuvent être abordés que dans un cadre interdisciplinaire. Pour leur permettre d’être accompagnés, il pourrait être utile de mettre en place une plateforme en ligne qui pourrait être un centre de ressources, avec notamment un forum de questions/réponses où les professeurs pourraient poser leurs questions et trouver des réponses. Ceci est d’autant plus important que la question du changement climatique nécessite parfois d’évoquer la question des valeurs et de prendre en compte des dimensions philosophiques et morales. Les enseignants bénéficieraient probablement beaucoup à être accompagnés et formés à l’éthique et aux controverses.“

Le rapport propose également de “créer une communauté“ au sein mais également en dehors des établissements, de “permettre aux éco-délégués d’évaluer l’impact de leurs projets“ ou encore de “s’assurer que ce ne soit pas que l’affaire des filles“.

Le rapport complet ici

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