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Avenir des jardins d'enfants : l'IGAS et l'IGESR proposent plusieurs scénarios qui pourraient être mis en place d'ici 2024

Paru dans Petite enfance, Scolaire, Périscolaire le mercredi 24 mars 2021.

Quel sera l'avenir des jardins d'enfants ? C'est la question sur laquelle ont été invitées à plancher l'IGAS (Inspection générale des affaires sociales) et l'IGESR (Inspection générale de l’éducation nationale, du sport et de la recherche). En effet, ces jardins d'enfants, qui accueillent des enfants de 2 à 6 ans, sont amenés, avec l'abaissement de l'âge de l'instruction obligatoire à 3 ans introduit par la loi sur l'École de la confiance, à faire évoluer leur offre durant une période dérogatoire de 5 ans, au terme de laquelle ils ne pourront plus assurer eux-mêmes l'instruction obligatoire des plus de 3 ans, sauf à se transformer en établissement scolaire. Dans un rapport public daté de juillet 2020 mais mis en ligne seulement avant les vacances de Noël sans communication officielle des ministères concernés, ces deux inspections font 14 recommandations. Celles-ci concernent les scénarios de transformation possible identifiés par les rapporteurs, qui vont, des moins complexes aux plus coûteux en termes financiers et humains, du recentrage de l'activité sur l'accueil d'enfants de moins de 3 ans, "scénario le plus simple et le plus probable" pour la majorité de ces établissements, jusqu'au scénario, "dans quelques cas" seulement, d'un maintien d'une structure alternative à l'école maternelle. Scénario qui impliquerait donc la transformation du jardin d'enfants en école "mais au prix d'une profonde évolution du modèle des jardins d'enfants au profit de celui de l'école maternelle". Évolution du modèle qui s'accompagnerait en outre de modifications importantes, notamment réglementaires ou concernant les modalités de recrutement.

Première option retenue en effet par la mission, que ces jardins d'enfants restent des EAJE (Établissements d'accueil de jeunes enfants). Solution "la plus aisée à mettre en œuvre, car elle permettrait un maintien des personnels déjà en place et elle pourrait être accompagnée financièrement dans des conditions déjà connues par la plupart de ces établissements (financement par la PSU, la Prestation de service unique versée par la CNAF, contribution des familles et subventions des communes)". Et pour cette option, la mission évoque deux pistes de transformation.

Se recentrer sur l'accueil de petits en se positionnant en complémentarité avec l'école

Premier cas de figure, accueillir plus d'enfants de 2 à 3 ans, mais aussi, même si cet accueil des 2-3 ans est "une activité pertinente et soutenable", élargir cet accueil aux enfants âgés de 18 mois et non pas seulement à partir de 2 ans, et compléter cette offre par des activités péri ou extrascolaires pour des enfants plus âgés, "c'est-à-dire en assumant un positionnement préparatoire et complémentaire à l'école maternelle". Pour se faire, il faudrait d'abord conserver et appliquer la possibilité existante de financement des temps périscolaires ou extra-scolaires en EAJE par la CNAF, la PSU, "jardins d'enfants inclus, jusqu'à cinq ans révolus, afin de préserver un accueil de qualité, avec des taux d'encadrement et un personnel spécialisé qui se distinguent des centres d'accueil de loisirs sans hébergement". Il s'agira aussi, recommandent les rapporteurs, de "faciliter la réponse aux demandes des familles pour l'accueil l'après-midi des enfants de 3-4 ans inscrits en petite section d'école maternelle dans des jardins d'enfants, dans le cadre de aménagements possibles de l'obligation d'assiduité à cet âge, organisés si nécessaire par des conventions État-collectivités".

Le deuxième scénario, "possible mais plus coûteux", vise aussi à effectuer une reconversion en crèche multi-accueil pour les enfants de 0 à 3 ans. L'opération serait en effet plus coûteuse car elle "accroît les dépenses de personnel et peut nécessiter des aménagements de locaux et de matériels pour accueillir des enfants plus jeunes". Elle gagnerait, à ce titre, "à être accompagnée financièrement par les pouvoirs publics". La mission fait donc également ici des recommandations en termes de financement pour accompagner cette transformation - attribuer des subventions d'investissement du fonds de modernisation des EAJE "en se dispensant dans ce cas de règles de plafonnement des aides liées au cumul des subventions obtenues sur cinq ou dix ans" -, mais aussi des recommandations visant les personnels.

Recentrage vers les touts petits : faciliter le passage de certains professionnels des jardins qui le souhaitent en école maternelle ?

Néanmoins, parce que le recentrage de l'activité des jardins d’enfants, notamment dans le cas d'une reconversion en crèche, peut avoir un impact important sur l'activité des éducateurs de jeunes enfants, et devenir moins attractive pour ceux qui peuvent s'être positionnés depuis plusieurs années sur des activités orientées sur la préparation des premiers apprentissages scolaires, la mission fait la recommandation, pour les communes qui souhaiteraient les intégrer comme ATSEM dans les écoles, de faciliter l’obtention du CAP accompagnant éducatif petite enfance, par le biais de la VAE.

De même, alors que les écoles vont être confrontées à la scolarisation d’enfants supplémentaires (estimée à 3000 enfants au maximum sur tout le territoire), on pourrait encourager, lorsque les ressources de la commune le permettent, "le recours à quelques personnels des jardins d'enfants en appui aux professeurs des écoles, dans le cadre de projets spécifiques, pour améliorer la prise en charge des jeunes enfants". Et pour ces personnels qui souhaiteraient exercer des fonctions dans des écoles maternelles publiques en tant qu’intervenants extérieurs, ouvrir des modules de formation, ou intégrer ces personnels dans des formations existantes.

Transformation en écoles : dérogation aux conditions de durée d'exercice pour le directeur ?

Enfin, les inspections font des recommandations pour un autre cas de figure envisageable pour certaines structures, le maintien d'une structure alternative à l'école maternelle, impliquant donc la transformation du jardin d'enfants en école hors contrat ou sous contrat ou publique (dans ce dernier cas, pour seulement une minorité d'entre eux et qui doit "être appréciée en fonction de nombreux paramètres, notamment le besoin scolaire sur la commune"). Pour tous ces cas de figure, la mission souligne une démarche complexe (règles de financement, fonctionnement et organisation en termes de ressources humaines...) et qui nécessiterait au minimum des modifications réglementaires, en termes de recrutement ou de transformation des conditions d'accès à certains postes pour accompagner la transition.

La mission recommande notamment de modifier le code de l'éducation (articles R. 442-33 et R. 442-49) pour qu'à l'issue de la période dérogatoire, en 2024, on puisse assimiler les jardins d’enfants ouverts depuis cinq ans au moins à des écoles hors contrat pour que pour ceux qui le souhaiteraient puissent formuler une demande de contrat avec l'État. Si la commune le souhaite et peut le financer par son effort propre, certains professionnels de la petite enfance pourraient être maintenus dans une école maternelle publique, sur la base d’un projet d’école innovant.

La mission invite aussi à "faciliter le recrutement du directeur et/ou de tout ou partie des enseignants dans le cadre d'un 'poste à exigence particulière', voire de 'postes à profil', compte tenu de la spécificité du projet d'école élaboré localement". Il serait souhaitable aussi, selon elle, que les recteurs répondent "favorablement, à compter de la rentrée 2021, aux demandes de dérogation émanant de directeurs de jardins d'enfants pour diriger une école, à condition qu'ils aient les titres requis et au moins 2 ans d'ancienneté, considérant qu'ils remplissent, depuis la rentrée 2019, une "fonction comparable aux fonctions de direction, d'enseignement ou de surveillance dans un établissement d’enseignement" (5 ans dans ses fonctions sont normalement requis actuellement).

Combiner certaines solutions pour atténuer la rigueur de ces changements ?

Enfin, parce que ces scénarios "ont des impacts parfois très significatifs en matière de modèle économique et de gestion des ressources humaines", la mission fait aussi la proposition de combiner certaines solutions afin d' "atténuer la rigueur de ces changements", comme ouvrir une classe hors contrat pour un groupe d'enfants de plus de 3 ans, qui coexisterait avec le maintien d'un EAJE pour l'accueil régulier des moins de 3 ans. Combinaison qui nécessitera notamment d' "organiser des budgets distincts et une comptabilité analytique, pour s'assurer de l'étanchéité des financements" et qu'ainsi un financement public (CAF ou commune) attribué à l'activité en EAJE ne bénéficie pas de manière directe ou indirecte à une activité d'enseignement dans le cadre d'une école hors contrat avec l'État.

La mission a recensé 256 jardins d'enfants (contre 300 estimés initialement), pour environ 8200 places. Ils sont présents dans 53 départements, mais la moitié des établissements sont concentrés dans 8 départements (Paris, Rhône, Bas-Rhin, Bouches-du-Rhône, Haut-Rhin, Loire, Nord, et La Réunion) et notamment à Paris qui compte un quart de l'ensemble des places. La mission a estimé, en l'absence de données statistiques, le nombre de salariés ou d'agents travaillant dans un jardin d'enfants à 1000 ou 1100 ETP (équivalents temps pleins).

Le rapport public "L'avenir des jardins d'enfants" ici

Camille Pons

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