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L'intelligence a-t-elle un sexe ? Le nouveau test de QI fait évoluer la réponse.

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le mardi 19 janvier 2021.

Garçons et filles réalisent les mêmes performances intellectuelles, les jeunes filles doivent pouvoir accéder à toutes les formations, et les dernières recherches battent en brèche certains préjugés du type "les filles sont plus 'littéraires' et moins 'scientifiques' que les garçons". C'est ce que montre un article de Jacques Grégoire (Université catholique de Louvain) dans la dernière livraison de la revue ANAE. Le psychologue tire les premiers enseignements du WISC-V dont la 5ème édition date de 2016. L'échelle d'intelligence de Wechsler pour enfants et adolescents permet en effet de mesurer diverses aptitudes intellectuelles dont la somme constitue le QI.

L'auteur utilise donc cette dernière version du test pour comparer deux groupes de jeunes Français, 532 filles et 517 garçons mais il se fonde sur 35 ans de données d’étalonnage de tests de quotient intellectuel pour faire un état des lieux et proposer au préalable un historique de cette comparaison. Il remonte d'ailleurs à bien avant la publication du premier WISC. En 1861, Pierre Broca compare le poids des cerveaux des hommes et des femmes et en conclut à une supériorité des hommes. En 1894, Ellis évoque une surreprésentation des hommes parmi les retardés mentaux et parmi "les personnalités intellectuelles éminentes", donc aux deux extrémités de la courbe de distribution des performances, qui serait donc plus étendue que celle des femmes, même si les scores moyens sont les mêmes, ce que confirment Feingold en 1992 et Larkin en 2013. En 1916, en utilisant le test de Binet, Lewis Terman "constate une légère supériorité" du QI des filles, mais jusqu'à 13 ans seulement. Cette hypothèse est contredite par Wechsler qui estime en 1944 qu'il n'y a aucune différence statistiquement significative entre les sexes, bien que les femmes aient tendance à avoir un résultat moyen supérieur à celui des hommes "dans quasi tous les groupes d'âge". Pour Johnson (en 2008), les garçons sont surreprésentés à 11 ans dans les niveaux les plus faibles. Pour Lynn (en 1994), aucune différence de serait observée jusqu'à 14-15 ans, les garçons prenant alors l'avantage.

Jacques Grégoire montre d'abord que les résultats varient avec l'instrument de mesure. "Quoi qu'il en soit, la supériorité des garçons aux subtests Vocabulaire et Compréhension disparaît au WISC-IV et au WISC-V (les deux derniers en date, ndlr), et leur supériorité au subtest Information persiste au WISC-IV pour finalement disparaître au WISC-V (...). La seule supériorité persistante des garçons au travers des différentes versions du WISC est observée au subtest Arithmétique (...) mais la taille des différences à cette épreuve est petite" (0,14) tout comme au test "Balance" (0,17). Les données de l'étalonnage français du WISC-V ne confirment donc pas les hypothèses de Feingold ou de Lynn. "Les différences observées à 15 et 16 ans sont à l'avantage des filles, mais elles ne sont pas statistiquement significatives" sauf en ce qui concerne l'indice "Vitesse de traitement", pour laquelle elle est "de grande ampleur" (0,51) et à l'avantage des filles.

Comment expliquer cette différence ? Elle pourrait découler de meilleures compétences en lecture, d’une motricité fine plus précise, d’un contrôle attentionnel plus efficace... Mais, même s'il ne l'écrit pas ainsi, l'auteur s'interroge sur les causes et les conséquences. "Les tâches de vitesse de traitement demandent un important contrôle de l'attention et de la coordination oculomotrice" qui "peut expliquer, en partie, le comportement scolaire plus appliqué des filles et leurs performances scolaires supérieures à celles des garçons à l'adolescence et à l'âge adulte. En dehors de cette différence, les données d'étalonnage du WISC-V ne mettent en évidence aucune prédisposition particulière aux filles ou aux garçons pour certains apprentissages ni pour certaines filières de formation."

A noter encore dans ce numéro d'ANAE plusieurs analyses des apports de cette nouvelle approche de la mesure de l'intelligence dans l'évaluation des enfants et des jeunes TDHA (présentant un déficit de l'attention et/ou hyperactivité), déprimés ou à "haut potentiel", dont les auteurs soulignent la grande hétérogénéité des résultats selon les tests, les résultats plus faibles aux tests de mémoire de travail et vitesse de traitement pouvant masquer des résultats supérieurs en compréhension verbale et en fluidité du raisonnement.

Ces articles, dont celui de Jacques Grégoire, "Les différences intellectuelles entre garçons et filles, 35 ans d’évolution du WISC-R au WISC-V" dans le n° 169 de la revue ANAE (approche neuropsychologique des apprentissages chez l'enfant) daté de décembre 2020.

Pour l'éditorial d'E. Gentaz, voir ToutEduc ici. Le site de la revue ici.

ToutEduc en partenariat avec Mensa Youth.be (ici)

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