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Journée internationale contre la violence et le harcèlement en milieu scolaire : J-M Blanquer propose de promouvoir un code de bonnes pratiques au niveau international

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Justice le jeudi 05 novembre 2020.

C'est à l'occasion de la nouvelle Journée internationale contre la violence et le harcèlement en milieu scolaire, ce jeudi 5 novembre 2020, et dans le cadre d'une conférence internationale réunissant les ministres de l'Éducation d'une vingtaine de pays, que Jean-Michel Blanquer a appelé à lancé collectivement un "appel pour une éthique des réseaux sociaux" et, à ce titre, à promouvoir collectivement "un plan de bonne conduite" qui régirait ces espaces numériques. Le ministre français de l'Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports avait été avec ses homologues du Maroc et du Mexique, l'un des instigateurs de cette journée qui sera célébrée chaque année le premier jeudi du mois de novembre, journée qui avait été proposée l'an dernier, à l'occasion du G7 de Biarritz. Cette proposition avait été approuvée à l'unanimité par les 193 états membres de l'UNESCO, qui a appuyé la France dans sa mise en œuvre. Alors que le cyber-harcèlement est une forme de harcèlement "extrêmement importante", car "elle intensifie les effets délétères du harcèlement" et que la crise sanitaire a semble-t-il eu, en augmentant le temps des enfants passé devant les écrans, un "effet aggravant", selon Brigitte Macron qui, en clôture de la conférence, a indiqué qu'il y avait eu "une hausse considérable des cas de cyber-harcèlement", le ministre français estime que les états "seront plus efficaces" s'ils lancent "une action ensemble".

Les propositions concrètes qui pourraient être faites pour construire ce code de bonne conduite doivent, selon Jean-Michel Blanquer, partir de deux questions : "comment endiguer la viralité des contenus, alors que la responsabilité est diluée sur les réseaux ?", et comment aborder la question de l'anonymat sur ces réseaux alors qu'ils peuvent être le terrain d'une expression sous pseudo. Pour le ministre, il est d'autant plus important de se pencher sur la question des réseaux sociaux dans le contexte de l'assassinat de l'enseignant français Samuel Paty. Un assassinat "qui n'aurait pas eu lieu sans les réseaux sociaux" dont le "rôle" a été "décisif". C'est à tous ces titres, estime-t-il, qu'il faut être "extrêmement exigeant vis-à-vis des plateformes des réseaux sociaux", jugeant "anormal" qu'il soit "difficile de supprimer un propos contre un enfant" ou encore de ne "pas avoir de bons algorithmes pour détecter ces propos".

En appeler à la responsabilité des adultes car les enfants peuvent avoir naturellement des "réponses binaires"

Des recommandations et des pistes ont été évoquées à l'occasion de cette conférence pour lutter plus globalement contre le harcèlement. Peuvent être citées à ce titre celles tirées de l'expérience finlandaise, présentée par la ministre de l'éducation du pays, Li Andersson. Elle invite à combiner plusieurs éléments : de "bonnes pratiques pédagogiques", et de "bons moyens", "humains", pour "pouvoir identifier et intervenir de façon efficace". Ce programme, dit "KiVa", développé par des scientifiques, a contribué, selon la ministre, à faire baisser le harcèlement, qu'il soit "auto-évalué" ou "signalé par les autres". L'expérience finlandaise a été adaptée en Italie mais sur la base du volontariat des établissements, et complétée par des actions d' "implication des pairs".

Nicole Catheline, présidente en France du Conseil scientifique de la Société française de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent et disciplines associées, invite de son côté à la prudence concernant notamment les interprétations que l'on peut en avoir chez les plus petits, alors que les réponses comportementales qu'ils peuvent apporter pour répondre à des "questions naturelles", comme la nécessité de se mesurer par exemple, "sont parfois binaires". Pour elle, ce sont les adultes qui doivent prendre "une grande part de responsabilité" et qui doivent apprendre à intervenir, en expliquant notamment.

Il faut aussi, estime-t-elle, "revoir la définition du harcèlement [intention agressive, répétition, relation d'emprise dominant/dominé]" alors que le phénomène est généré dans des "profils de situations". Il faut plutôt intégrer l'idée que ce type de comportement arrive dans "un certain contexte" et ne plus considérer, comme ça pouvait l'être encore au début des années 2010, que ce problème apparaît entre deux individus "qui auraient des particularités". De plus, interroge-t-elle alors que le harcèlement implique la notion de répétition, "diffuser massivement [sur un réseau, ndlr], n'est-ce pas aussi douloureux que la répétition ?"

6 académies en France expérimentatrices d'un programme spécifique en 2020-2021

À cette occasion, Édouard Geffray, le DGESCO (directeur général de l’enseignement scolaire), a présenté une expérimentation qui a été lancée sur 6 académies françaises en 2020-2021 et devrait être généralisée à la rentrée 2021 dans l'ensemble des 30 académies. Ce programme s'inscrit dans une "approche intégrale", explique-t-il. "En terme d'âges" d'abord, au regard des situations de harcèlement qui "commencent tôt, dès l'âge de 6 ans-7 ans", en termes de mobilisation des acteurs aussi, car la lutte "ne fonctionne que si on est capable d'associer les professeurs, les parents et les jeunes eux-mêmes". Enfin, cette approche se veut "dans la durée, tout au long de la vie de l'élève", élève qu'il faut "éduquer, prévenir et protéger". Ce programme comprend plusieurs volets : une dimension "apprentissage", 10 heures de cours où "l'on explique le droit, pourquoi ce n'est pas possible, pas autorisé, etc." ; un volet écoute pour les victimes et les témoins, via deux numéros dont un dédié spécifiquement au cyberharcèlement ("une configuration particulière qui appelle des réponses particulières" et "des horaires élargis") ; l'implication des jeunes qui peuvent être notamment ambassadeurs dans les cours de récréation et les classes, "faire de la médiation ou faire passer des messages" ; un volet prévention à destination des familles pour qui a été créé un kit "pour qu'elles sachent détecter une situation de harcèlement" ainsi qu'un concours annuel qui invite les jeunes à créer une vidéo sur cette thématique ; et un dernier volet qui prévoit la formation de toutes les équipes.

Le plan d'actions a été construit en plusieurs étapes dont la première a été, selon lui, la pose d'un "cadre juridique", via la loi de 2019 qui a inscrit "le droit de tout enfant à bénéficier d'une scolarité sans violence ou harcèlement". Un cadre qui "n'est pas que symbolique", estime-t-il, car "il fonde toutes les actions" qui vont être engagées.

Un enfant sur trois harcelé à travers le monde

En ouverture de la conférence, la directrice générale de l'UNESCO, Audrey Azoulay qualifiait de "fléau mondial" la harcèlement à l'école parce qu'il porte notamment "atteinte à un droit fondamental, le droit à l'éducation". Selon les données notamment collectées via l'UNESCO, un enfant sur trois est harcelé à travers le monde. La directrice générale souligne que les conséquences sont "profondes et souvent dévastatrices" : sur le parcours scolaire et sur la santé mentale, les élèves harcelés ayant deux fois plus de risque de manquer l'école (et plus de 60 % d'entre eux obtiennent des résultats inférieurs à leurs pairs), et deux fois plus de risques de se sentir seuls, d'avoir des comportements à risque ou suicidaires, 42 % des élèves se disant par ailleurs "ostracisés à l'école". 30 % des élèves dans ces enquêtes disent avoir été déjà blessés physiquement par un autre élève, la nationalité, l'origine, la couleur de peau constituent le second motif de harcèlement et 15 % se disent ciblés pour leur physique, spécialement les filles par des remarques sexistes. Le cyber-harcèlement touche quant à lui un jeune sur trois, et un jeune sur cinq dit avoir manqué l'école à cause de ça.

"Ce n'est pas parce qu'on est petit qu'on a des petits problèmes" a-t-on pu entendre dans le clip qui a remporté le concours du ministère de l'Éducation nationale français (auquel 50 000 élèves ont participé en 2020, ainsi que près de 300 écoles dans le cadre du prix spécial créé pour les plus jeunes), clip qui ouvre aujourd'hui la campagne française sur ce sujet. Une jeune québécoise, ambassadrice dans son pays sur cette question et ancienne victime de harcèlement, affirme aussi que "personne ne devrait avoir à remettre en question sa propre valeur".

Camille Pons

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