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Contrat jeune majeur : l'interruption de la prise en charge de l'ASE peut être justifiée au regard du comportement du jeune (Conseil d'État)

Paru dans Justice le jeudi 20 août 2020.

Il peut être mis fin de manière anticipée à la prise en charge d'un jeune majeur par le service de l'aide sociale à l'enfance (ASE) au regard de son comportement. C'est ce que conclut le Conseil d'État, qui a validé une décision en ce sens, le 22 juillet 2020, prise par la maire de Paris. Celle-ci avait interrompu celle d'un jeune camerounais avant la fin du contrat jeune majeur dont il bénéficiait pour terminer sa formation. Ainsi, peut-on lire dans la décision publiée sur le site du Conseil d'État, "le comportement du jeune majeur, comme le cas échéant sa situation au regard du droit au séjour et au travail, est au nombre des éléments que le président du Conseil départemental peut prendre en considération, au titre du large pouvoir d'appréciation dont il dispose, pour accorder, maintenir ou interrompre la prise en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance d'un jeune majeur de moins de vingt et un ans éprouvant des difficultés d'insertion sociale faute de ressources ou d'un soutien familial suffisants".

Le jeune ressortissant camerounais concerné par l'affaire, né le 8 février 2001 et entré en France en août 2017, avait été confié en 2018 au service de l'ASE de Paris jusqu'à ses 18 ans. Prise en charge dont la Ville de Paris avait décidé le maintien ensuite jusqu'à la fin de l'année scolaire, puis, pour une durée de six mois à compter du 1er août 2019, dans le cadre du dispositif "contrat jeune majeur" pour qu'il puisse terminer sa première année de formation en vue de l'obtention du certificat d'aptitude professionnelle (CAP) hôtellerie, café, restauration. Or, cette même Ville avait mis fin, dès le 29 août 2019, à cette prise en charge parce que son bénéficiaire avait été exclu de plusieurs hôtels en raison de son comportement, et qu'il avait quitté son dernier hébergement depuis le 15 août, sans en informer le service de l'ASE, pour se rendre dans le sud de la France, puis en Italie. Cette décision avait été constestée par l'intéressé et le juge des référés du tribunal administratif (TA) de Paris avait suspendu l'exécution de la décision en octobre 2019 en attendant que le tribunal se prononce sur la légalité de la décision prise par la maire de Paris.

La situation du jeune pris en charge peut-être examinée également en tenant compte de son comportement

Le Conseil d'État, dans le cadre du pourvoi en cassation formé par la Ville de Paris, a, au final, jugé la décision de la maire fondée. En effet, même si le code de l'action sociale et des familles prévoit la possibilité que l'ASE, qui relève du Département, puisse poursuivre la prise en charge à titre temporaire des majeurs âgés de moins de vingt et un ans qui en avaient déjà bénéficié en tant que mineurs, "au-delà du terme de la mesure, pour leur permettre de terminer l'année scolaire ou universitaire engagée" s'ils "éprouvent des difficultés d'insertion sociale faute de ressources ou d'un soutien familial suffisants", néanmoins le président du Conseil départemental "dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour accorder ou maintenir la prise en charge par le service". Celui-ci, écrit le Conseil d'État, peut en effet également "prendre en considération" le comportement du jeune majeur.

De même, le juge, lorsqu'il doit se prononcer et statuer sur un recours, doit aussi "examiner la situation de l'intéressé, en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction et, notamment, du dossier qui lui est communiqué". Or, pour le Conseil d'État, le juge des référés a commis "une erreur de droit" en suspendant l'ordonnance de la maire de Paris, alors que la difficulté de la prise en charge du jeune par l'ASE semblait avérée de par son comportement. Le Conseil d'État s'appuie d'ailleurs aussi sur l'ensemble des faits provenus dès les 18 ans du jeune et après la décision d'interruption de la prise en charge de la Ville de Paris. En tout, le jeune avait été accueilli dans six hôtels successifs dans le cadre de sa prise en charge en qualité de jeune majeur à compter du 8 février 2019 ; il avait fait l'objet en septembre 2019 d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français et interdiction d'y retourner pendant un an, contre lequel il avait formé un recours rejeté par un jugement du TA de Paris ; et il avait été à "à l'origine de plusieurs incidents graves mettant en danger la sécurité des autres résidents" de l'établissement où il avait ensuite été hébergé suite à l'ordonnance du juge des référés du TA de Paris. Dès lors, le Conseil d'État a jugé que les circonstances ne faisaient pas apparaître "un doute sérieux quant à la légalité d'un défaut de prise en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance", même si le jeune majeur souhaitait le maintien de celle-ci ensuite, après avoir validé sa seconde année de CAP, pour pouvoir obtenir un baccalauréat professionnel.

La décision du Conseil d'État ici

Camille Pons

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