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Handicap et défaut d'AESH : l'administration peut ne pas être condamnée si elle a accompli toutes les démarches nécessaires (TA de Nice et de Rennes)

Paru dans Scolaire le mardi 16 juin 2020.

"L'absence de moyens ne peut justifier le non-respect de la décision de la CDAPH (commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées) et le juge condamne systématiquement l'administration si aucun AESH (Accompagnant des élèves en situation de handicap) n'a été recruté, sauf circonstances particulières ou si l'administration démontre qu'elle a accompli toutes les diligences nécessaires." Telle est l'analyse que livre la lettre d'information juridique (LIJ) de mai 2020 que vient de publier la direction des affaires juridiques des ministères chargés de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, au regard de deux jugements émis en début d'année par les tribunaux administratifs de Rennes et de Nice. Ces décisions font suite à des contentieux portés par des familles dont les enfants, en situation de handicap, n'avaient pu être scolarisés dans les temps, faute d'avoir pu bénéficier d'un accompagnant (AESH ou AVS) qui avait été préconisé par leurs Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) respectives. Dans les deux affaires, les familles dénonçaient "une atteinte grave et manifestement illégale" au droit de leurs enfants de bénéficier d'une scolarisation et demandaient aux tribunaux d'enjoindre les recteurs de leurs académies respectives de mettre en place immédiatement l'accompagnement scolaire de leurs enfants. Les deux demandes ont été rejetées par les juges du référé de ces deux tribunaux, respectivement les 10 janvier et 18 février 2020, au motif que l'administration a pu démontrer qu'elle avait "accompli toutes les diligences nécessaires pour parvenir à ce[s] recrutement[s]".

Les deux affaires concernaient des enfants âgés respectivement 3 ans et demi et 5 ans qui s'étaient vu attribuer une aide humaine individuelle en milieu scolaire (à 100 % du temps pour le premier, pour 12 h hebdomadaires pour le second souffrant d'autisme et présentant un taux d'incapacité compris entre 50 et 80 %), aides qui n'avaient pu être mise en place dans les délais. Si, dans chacune des instances, le juge des référés a rappelé que le droit d'égal accès à l'instruction en faveur des élèves handicapés est garanti par la Constitution, par le premier protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par l'article L. 111-1 du code de l'éducation, dans les deux cas, chaque recteur établissait, d'une part les difficultés rencontrées pour recruter un AESH, d'autre part qu'une personne était en cours de recrutement et serait disponible dans des délais restreints.

Les rectorats soumis à de réelles difficultés de recrutement

À Nice, la motivation du rejet s'appuyait notamment sur un courriel du 3 février 2020 dans lequel la coordinatrice départementale de l'accompagnement d'élèves en situation de handicap, en plus de souligner "les difficultés rencontrées par Pôle emploi au cours des campagnes de recrutement de novembre et janvier 2020", avait indiqué que la candidature de la personne proposée par la famille serait examinée lors de la session de recrutement du 11 février 2020.

À Rennes, où la mère avait assorti sa demande au tribunal d'ordonner au recteur d'accorder le bénéfice d'un AESH dans un délai de 24 heures, d'une demande d'astreinte de 500 euros par jour de retard et de versement par l'État d'une double indemnité, pour préjudice moral et pour préjudice financier résultant des frais de la garde de sa fille jusqu'à sa scolarisation, la requête a été rejetée pour deux raisons. D'abord parce que, comme à Nice, l'administration a fait la preuve que, "dans un contexte où le recrutement d'AESH s'avère très difficile, toutes les diligences nécessaires ont été mises en œuvre" : démarches entreprises dès transmission de la décision de la CDAPH en novembre, candidate retenue dès le 11 décembre mais non recrutée après s'être présentée en retard et en état d'ébriété pour la signature du contrat, convocation d'autres candidates, prise de fonction de celle retenue soumise à la réalisation d'un préavis chez son employeur de l'époque mais qui était attendue dans ses fonctions à compter du 3 février. Ensuite, parce que le tribunal a constaté qu' "aucune démarche n'a été accomplie pour une scolarisation dès la rentrée de septembre 2019" mais seulement pour janvier 2020 (la mère justifiait avoir suivi en cela des avis médicaux), alors que la petite fille est âgée de trois ans depuis le 15 juillet 2019 et que la scolarisation est obligatoire dès cet âge là.

Camille Pons

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